PMA : la longue attente des femmes noires (suite)

Réalisation d'une échographie pendant une grossesse.
Réalisation d'une échographie pendant une grossesse. ©Getty - Anchiy
Réalisation d'une échographie pendant une grossesse. ©Getty - Anchiy
Réalisation d'une échographie pendant une grossesse. ©Getty - Anchiy
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Pour avoir un enfant qui leur ressemble, les femmes noires, comme Sandrine, attendent en moyenne huit ans avant de bénéficier d'un don d'ovocytes en France. Les donneuses se font rares. Après avoir entendu son témoignage sur Les Pieds sur Terre, Eléonore a décidé de faire un don d’ovocytes.

A 31 ans, Sandrine apprend qu’elle est infertile, à cause de nécrobioses de fibrome ayant bouché les trompes utérines. Elle se renseigne alors sur le don d’ovocytes. Étant d’origine camerounaise, elle fait face à la pénurie d'ovocytes de femmes noires en France. Ces dernières devant attendre en moyenne huit ans avant de bénéficier d’un don d’ovocytes, contre deux ans en moyenne pour les femmes blanches. Sandrine considère alors l’idée d’accepter un don d’ovocytes d’une femme caucasienne. Son conjoint de l’époque, lui aussi d’origine camerounaise, est cependant en désaccord. Il ne souhaite pas avoir un enfant métisse qui soulignerait l’infertilité de Sandrine.

“Il y a une forme de honte d’être une femme infertile, parce qu’une femme infertile c’est un arbre sans fruit, elle ne sert à rien. Car il y a quand même, ce poids-là : l'infertilité est très tabou au sein de la communauté noire, et on fait subir beaucoup de violences à la personne qui est infertile.” Sandrine

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Son conjoint étant devenu violent, Sandrine le quitte. Elle rencontre un autre homme, d’origine congolaise, avec qui elle part au Portugal pour recevoir un don d’ovocytes d’une femme noire. Après plusieurs fécondations in vitro, Sandrine tombe enceinte, mais la grossesse, extrêmement difficile, est arrêtée au bout de huit semaines. Sandrine tente une nouvelle PMA en Ukraine, avant de réaliser qu’elle ne désire pas réellement avoir un enfant.

“Aujourd'hui, je suis heureuse sans enfants, je me bats pour les autres femmes.” Sandrine

Les Pieds sur terre
28 min

Elle aussi franco-camerounaise, Eléonore, 31 ans, est une auditrice fidèle des Pieds sur terre. En septembre 2021, elle a été marquée par le témoignage de Sandrine dans lequel elle abordait les problématiques de PMA pour les femmes noires.

“Ce qui m'avait étonné, c'est qu’il y a un principe d’appariement selon lequel l'enfant doit être le plus ressemblant possible à son parent, ce que je peux complètement comprendre, mais je trouvais quand même ça injuste parce que, pour autant que je sache, je n'ai pas connaissance de ce type de frein quand il faut que des parents blancs aillent adopter aux quatre coins du monde des enfants racisés. Pourquoi ce principe s'applique dans un cas et pas forcément dans l'autre ?” Eléonore

Puisqu’elle pouvait réellement être utile et aider les femmes noires souhaitant avoir un enfant par PMA, Eléonore décide rapidement de faire les démarches pour un don d’ovocytes à l’Institut mutualiste Montsouris, dans le 14e arrondissement de Paris. Sa ponction a eu lieu en septembre 2022.

“Ça reste une opération médicale. Il y a des risques vis-à-vis des injections qu’on prend, parce que c'est des hormones qui sont nécessaires pour s'assurer qu’il y ait le maximum d'ovocytes pour la récolte. J'avais vraiment l'impression d'être un champ de blé dont on allait récolter les fruits !” Eléonore

Soutenue et accompagnée dans sa démarche par sa compagne, Eléonore en a également parlé à ses frères et sœurs, pour qu’ils soient prévenus dans l’éventualité où l’enfant né de son don souhaite la connaître.

« Je n'hésiterai pas à sensibiliser des potes femmes noires à l'avenir, mais vraiment en mode : “Si on peut essayer de ramener le délai de dix ans à cinq, trois, un an, hésite pas”. Ça aurait peut-être beaucoup plus d'impact et ça faciliterait peut-être beaucoup plus les choses s’il y avait une vraie prise en charge de la part du ministère de la Santé, de l'Agence de biochimie avec de vraies campagnes. » Eléonore

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Merci à Eléonore.

  • Reportage : Anna Benjamin
  • Réalisation : Clémence Gross
  • Mixage : Nicolas Depas Graf

Musique de fin : Le Ndem par Lydol