
Aujourd'hui dans les Pieds sur terre, deux histoires de sauvetage de migrants, avec tout le coeur des marins bretons et le travail de longue haleine d'une enquêtrice au service rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge française.
Philippe Martinez commence la pêche en 1982 et passe son brevet de capitaine en 1997. Il dirige un bateau remorqueur ravitailleur en haute mer de 72 mètres de long, il va sauver du naufrage près de deux mille migrants.
Mon équipe est internationale, on ne parle qu'anglais sur le bateau. Je suis arrivé à Malte. La première fois que j'ai vu des migrants, c'était autour du 20 décembre 2013, un bateau gonflable embarquant une centaine de personnes qui passait sans s'arrêter à vingt mètres de nous. Philippe Martinez
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Au large des côtes libyennes, il va faire la rencontre de centaines de migrants.
C'est en pleine mer, à 80 kilomètres des côtes libyennes. Je reçois un message d'un centre d'organisation des secours de Rome, on nous signale une détresse d'un bateau de migrants. Je décide de m'y rendre. Quand j'arrive sur la zone décrite dans le message, on ne voit rien, la mer était belle. J'informe l'Italie que je n'ai rien trouvé. Philippe Martinez
C'est alors que j'aperçois une embarcation bleue, je me dis que je vais faire cap sur eux pour voir ce qui se passe. Eux s'arrêtent, ils étaient partis des côtes libyennes et ils ont été abandonnés par leur skipper. Il y avait environ 140 personnes. Philippe Martinez
Avec mon équipe, on a décidé de les faire embarquer. On a vu un petit bateau gonflable qui s'approchait, je leur fait signe d'approcher aussi et de venir avec nous. Philippe Martinez
J'appelle les italiens pour leur dire que j'ai récupéré les migrants, ils envoient un bateau qu'on ne voit pas arriver. Je me retrouve avec 700 personnes sur mon bateau alors que l'équipe n'est habituellement composée que de vingt personnes. Philippe Martinez
L'équipage a beaucoup aidé. Philippe Martinez
Une fois arrivés, les italiens m'ont dit qu'on avait battu le record du monde de sauvetage... Philippe Martinez
Quand ils sont tous partis, j'ai eu l'impression d'être vidé, j'avais l'impression d'être leur père à tous. Je n'ai pas eu la larme à l'oeil mais presque. C'est étrange de ne pas savoir ce qu'il va leur arriver et de les abandonner. Philippe Martinez
Ce sont toujours les mêmes conditions qui se répètent, ils sont abandonnés par leur skipper, sans eau, sans vivre et se retrouvent en train de couler en pleine mer.
Deux jeunes palestiniennes parlaient français, elle m'ont raconté qu'elles étaient réfugiées en Algérie et qu'elle voulait rejoindre leur famille en Suède. Elles avaient payé le skipper 1000 euros, d'autres avait payé 3000 euros. Philippe Martinez
En tout, j'ai vu défiler 1840 personnes. J'ai fait imprimer des cartes de visite avec mes coordonnées pour qu'ils puissent me faire signe. J'aimerais bien un jour ou l'autre recevoir une bonne nouvelle. Philippe Martinez
L'administrateur de l'Orient voulait me proposer pour la médaille de chevalier de l'ordre du mérite maritime. Il me demande si je l'accepte, je luis dis que j'ai juste fait mon devoir.
Certaines compagnies françaises avaient dit à leur commandants de fermer les yeux. Philippe Martinez
Je suis en colère contre les passeurs. Philippe Martinez

Khadija fuit le Congo en plein conflit et part avec Reiji, son fils de cinq ans sous le bras, une longue errance commence, jusque sur les côtes marocaines. La suite du périple, Khadija la raconte à Amel Kelifa, qui est enquêtrice au service rétablissement des liens familiaux pour la Croix-Rouge française à Paris. Elle a permis les retrouvailles entre une mère et son fils de cinq ans séparés lors d'une traversée clandestine en Méditerranée.
Au moment de la traversée, un compatriote aide Khadija à porter son fils pour monter sur le zodiac, son fils est rapidement envoyé sur un autre bateau sans qu'elle ne puisse le rattraper. Amel Kelifa
Je croyais avoir perdu mon fils pour toujours. Khadija
S'ensuivent de longues démarches administratives pour réunir la mère et l'enfant.
L'important était d'abord de localiser l'enfant. Reiji avait été pris en charge par les services de protection de l'enfance en Espagne, et enregistré sous une autre identité. Il a donc fallu établir une preuve de la filiation. Amel Kelifa
Il y avait ensuite des étapes administratives très complexes pour réunir la mère et l'enfant. La remise en contact a été permise par les résultats des tests ADN. Amel Kelifa
Mais l'enfant ne parlait presque plus qu'espagnol, ayant été scolarisé dans son pays d'accueil. Cela a rendu le dialogue entre la maman et l'enfant très difficile au moment où ils se sont retrouvés. Amel Kelifa
Il a fallu deux ans à partir du moment où Khadija a été séparée de son enfant pour réussir à les réunir. Son fils l'a directement reconnue à travers la vitre à l'aéroport. Amel Kelifa
Je suis très content d'avoir retrouvé ma maman, j'ai pris deux avions pour venir ici. Maintenant je veux aller à l'école et jouer au football. Reiji
1ère diffusion du 15/12/2014
Reportage : Leila Djitli
Réalisation : Peire Legras
Chansons du reportages :
Au milieu : "Ojos pues me desdenais" par Raquel Andueza & La Galania.
A la fin : "The sea" par Morcheeba.
Histoire de Philippe
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17 min
Histoire d'Amel
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7 min
L'équipe
