- Alain Mergier Sociologue, sémiologue, directeur de l'Institut WEI
- François Miquet-Marty Président de Viavoice, institut d'études et de conseil en opinions
« Classes laborieuses, électeurs dangereux ? »… Les « invisibles », les « inaudibles » seront-ils les invités surprises de la présidentielle ? Sur fond de crise, la colère sourde des « Français invisibles » pourrait bien changer la donne. Et il est vrai que l’on entend guère ceux qui naviguent dans la zone croissante du sous emploi chronique ? Comment vivent-ils la crise ? Des heures de chômage partiel, un espacement des missions d’Interim, la queue qui s’allonge à Pôle emploi, les remboursements d’emprunts qui augmentent, pas de quoi faire la Une des journaux…Juste une campagne de la fondation Abbé Pierre lancée ce week-end et qui révèle que 8 millions de Français n’ont pas les moyens de se chauffer. Cette France d’à côté, cette population rurale, périurbaine, exposée à la mondialisation, ne se sent plus représentée, abandonnée par la démocratie….
A cinq mois du premier tour des présidentielles, un vent de révolte souffle sur le débat politique. La campagne lèvera-t-elle le voile sur les inégalités cachées ? Ce malaise d’une communauté nationale, déchirée, éclatée entre les ombres du déclassement et les lumières des privilégiés, sera-t-il cette fois sur le devant de la scène ? Ou l’oreille politique restera-t-elle sourde ? Marine Le Pen, en meeting cet après-midi à Metz, a pris les devants, affirmant ce matin au JDD « Cette majorité silencieuse, c’est moi qui la représente. Ceux que personne ne veut entendre, dont on ne parle pas à la télé, qui ne manifeste pas, sont trop normaux pour les élites. Je les appelle à la révolution patriotique, pacifique et démocratique »…Car, oui, la question de l’extrême droite n’est pas seulement une question politique posée à la droite mais aussi une question sociale posée à la gauche…
Alors, comment voteront ces milieux populaires, dont on parle tant à nouveau, après avoir fait comme s’ils n’existaient plus. Vote extrémiste, ou protestataire, abstention… Et au-delà, est-ce que notre démocratie fait encore sens aux yeux du plus grand nombre ?
Ca s’en va et puis ca revient. Comme une chanson populaire, le peuple oublié s'invite dans les élections le temps d’un refrain puis disparait avant une prochaine éruption sociale ou une surprise électorale. Pourtant, en 1993 déjà, dans La Misère du monde , l’équipe du sociologue Pierre Bourdieu donnait déjà la parole aux ouvriers, employés et paysans déclassés par la mondialisation, ces habitants relégués de quartiers dont l’Etat s’était désengagé. A travers des entretiens marquants, le sociologue mettait au jour la souffrance d’une certaine France que formaient les nouvelles catégories des exclus de l’intérieur . Pourtant, en 2006, dans La France invisible, le sociologue Stéphane Beaud, accompagné par les journalistes Jade Lindgaard et Joseph Confravreux, montrait la situation fragile de citoyens masqués par les chiffres, les statistiques et les politiciens : on y apprenait que la proportion de précaires est plus élevée dans le public que dans le privé, que la plupart des SDF ont une adresse, que les licenciÈs ne retrouvent un emploi quéavec une perte substantielle de revenu. Et voici qu’avec Les oubliés de la démocratie (Michalon), le sociologue et sondeur François Miquet-Marty montre que la démocratie se meurt de ses blessures intérieures, qu’une partie grandissante de nos concitoyens se sent abandonnée, négligée, oubliée. Cette France périphérique où se jouera sans doute comme en 2007, l’élection de 2012 est en état d’insécurité nous dit-il : insécurité physique, insécurité économique, insécurité identitaire, poursuit le sociologue et sémiologue** Alain Mergier** dans Plaidoyer pour une gauche populaire , ouvrage collectif dirigé par Laurent Baumel et François Kalfon (Le Bord de l’eau). C’est pour ces raisons que nous avons décidé d’inviter ces auteurs à débattre d’une question qui sera au coeur de la prochaine élection.
Mais, il ne sera pas seulement question, ce soir que de cette France invisible dénudée, que cette classe laborieuse et de ces électeurs dangereux, les Retours du Dimanche examinent dans la « vie des Idées » qui agitent les pages Débat du Monde , le Retour du de Karl Marx … Enfin, avec Arnaud Le Parmentier , journaliste et au* Monde, * notre Tour du monde prospectif se projette ce soir à Bruxelles.sur la trace des suites du Sommet européen de vendredi….
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