Art ou industrie ? Évolutions technologiques obligent, le 70e Festival de Cannes s'ouvre ce mercredi avec son lot de questions sur l'avenir du cinéma et de ses formats.
On a trop reproché au Festival de Cannes de se contenter souvent, un peu paresseusement, de sélectionner toujours les mêmes en compétition, les fameux "abonnés du festival", pour ne pas se réjouir cette année du renouvellement des compétiteurs en lice pour la Palme. La raison en est conjoncturelle : mis à part le déjà bipalmé Michael Haneke, les habitués n'avaient pas de films prêts cette année, et c'est plutôt au jury qu'on les retrouve, à l'instar de son président, l'Espagnol Pedro Almodovar, ou de l'Italien Paolo Sorrentino, tous deux emblématiques d'un certain goût cannois, tel que l'ont façonné les 70 ans d'histoire du festival.
Quand Netflix débarque, ou la victoire d’Edison
On en avait les prémices l'an dernier : Amazon avait ouvert le festival avec le film de Woody Allen, et présentait également un des meilleurs de la compétition, celui de Jim Jarmusch. Cette année, c'est Netflix qui débarque avec deux films en compétition, ceux de Noah Baumbach et de Bong Joon-ho. La raison en est simple : dans le monde en général et à Hollywood en particulier, les films d'auteur ambitieux n'arrivent plus à se monter financièrement, et les plateformes Internet se sont engouffrées dans la brèche. Sauf qu'au contraire d'Amazon, Netflix n'a aucune intention de sortir ses films en salles. Il y a donc une chance que la Palme d'or de cette année soit réservée au petit écran. Ce serait la victoire du modèle Edison, le visionnement individuel, contre celui de Lumière, la projection en public. Les exploitants de salles français s'en sont émus, d'autant que c'est rien moins que tout le système de financement du cinéma à la française qui en est potentiellement menacé.
Le cinéma, art ou industrie ?
Arnaud Desplechin a signé un film de 2h10, c'est sa "version originale", qu'on verra dans une poignée de salles en France, et qui sortira aux Etats-Unis. Mais pour gagner une séance supplémentaire par jour, on lui a demandé d'en retrancher 20 mn, c'est la dite "version française" du film, celle qui est exploitée à partir d'aujourd'hui dans la majorité des salles, celle aussi qu'on verra ce soir en ouverture du festival. "Le cinéma est un art, par ailleurs c'est une industrie", disait Malraux. La 70e édition du Festival de Cannes s'ouvre donc symboliquement sur un certain rééquilibrage entre ces deux facettes...
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