Une rose est d'évidence poétique : la voir, la sentir, inspire d'emblée le plaisir, à tel point que les roses fleurissent aussi bien dans nos jardins que sur les panneaux publicitaires. Mais d'où vient ce singulier pouvoir des roses ? Qui de la fleur ou de notre imaginaire exalte nos sens ?
- Anne Perez Réalisatrice
Première diffusion : 26-29/12/16
"La parole étouffée sous les roses" signe l'aveu d'impuissance de Francis Ponge devant tant de beauté.
La fleur réelle est transfigurée par la fleur imaginaire, à tel point que coexistent en elle des symboles paradoxaux, de la rose mystique de l’Eglise catholique à la rose rouge du Mur des Fédérés… De l'Antiquité à nos jours, de l'Orient à l'Occident, les roses n'ont cessé de susciter admiration et désirs, chantées par les poètes, effeuillées par les peintres, cultivées pour les fêtes et les dieux. Les classes élevées en faisaient étalage pour signifier leur richesse et leur raffinement. Puis, à partir du XIXème siècle, les roses romantiques de l'aristocratie fleurissent les jardins et les vases des maisons bourgeoises, et envahissent les étals des villes. Cet engouement pour la rose est curieusement emblématique de l'industrialisation. Grâce au travail patient des obtenteurs, à partir de la petite fleur sauvage aux cinq pétales vont naître de larges fleurs turbinées aux centaines de pétales, des couleurs faisant et défaisant les modes, des quantités de roses rouges aux longues tiges emblématiques de la Saint-Valentin. Produites désormais en toute saison par millions, les variétés créées par l'homme n'ont plus grand chose à voir avec la fleur originelle. L'histoire de notre passion pour les roses, parce qu'elle convie de multiples idéaux, reflète plus largement la question de notre propre évolution prise entre l'"abondance heureuse" et une artificialisation désenchantée.
Dans les grandes fêtes de la Rome antique, notamment décadente, on jetait à foison des pétales de rose.
Dans les catalogues des pépiniéristes, il y a une trentaine de roses avant la révolution française et au lendemain de la révolution il va y en avoir 200 et après ça va monter jusqu'à 1000 roses dans les catalogues à la fin du XIXe.
Dans ce premier volet, nous nous aventurons dans une vallée perdue aux confins de l’Ardèche pour rejoindre la roseraie de Berty, fondée par Eléonore Cruse. Dans sa roseraie-sanctuaire, gardienne de plus de 1000 variétés de roses anciennes, elle nous parle de son désir de sauver ces roses fragiles et intensément parfumées, ce patrimoine sensible, face à l’étiolement du parfum des roses modernes. Dans le même temps, Blandine Veith, Valérie Chansigaud et Jacques Ronchon, nous entraînent dans l’histoire de la passion et de l’industrialisation des roses.
Au XVIIIe la rose est une fleur extrêmement distinctive et va se démocratiser tout au long du XIXe.
La longueur de la tige des roses va devenir un critère distinctif.
Avec Eléonore Cruse, de la roseraie de Berty ; Valérie Chansigaud, historienne des sciences et de l’environnement, auteure de « une histoire des fleurs, entre nature et culture » ; Blandine Veith, sociologue, ingénieure de recherche au CNRS ; Jacques Ranchon, des pépinières Paul Croix. Merci à Dominique Peyrard, Karim Meliani, et aux équipes du Parc de la Tête d’Or à Lyon.
Ce documentaire a reçu la bourse Brouillon d'un rêve sonore de la SCAM.
Textes lus par Sarah Chaumette, Claire Poinsignon, Santiago Bordil, Jean-Louis Trintignant : Ténèbres de Robert Desnos ; Poème à Lou de Guillaume Apollinaire ; Angelus Silesius ; Hafez de Chiraz ; Le miasme et la jonquille d’Alain Corbin ; Le château de Raymond Radiguet ; Corps de Federico Garcia Lorca.
Equipe technique : Marie Lepeintre, Claude Niort - Documentation Ina : Linda Simhon, Amelie Briand Le Jeune - Documentation musicale : Romain Couturier - Documentation : Anne-Lise Signoret, Anne-Laure David
Merci à Léa Galanopoulo pour son article dans la revue du CNRS
Une série documentaire de Jean-Baptiste Veyrieras et Mariannick Bellot, réalisée par Anne Perez
Bibliographie :
Valérie Chansigaud, Une histoire des fleurs (Éditions Delachaux et Niestlé)
François Joyaux, Nouvelle encyclopédie des roses anciennes (Edition Ulmer 2005)
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