Une communauté morte-vivante : épisode • 10/5 du podcast Les restes humains, ferments de l’humanité

 La "Capela dos Ossos" (en français : Chapelle des os), à Évora au Portugal.
 La "Capela dos Ossos" (en français : Chapelle des os), à Évora au Portugal. ©Getty -  © REDA&CO
La "Capela dos Ossos" (en français : Chapelle des os), à Évora au Portugal. ©Getty - © REDA&CO
La "Capela dos Ossos" (en français : Chapelle des os), à Évora au Portugal. ©Getty - © REDA&CO
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Nous retrouvons ce soir le sociologue Arnaud Esquerré pour parler de la récente pénalisation de la profanation et de l’assignation des cendres dans le domaine public.

Avec
  • Arnaud Esquerre Sociologue, directeur de recherche CNRS et directeur de l'Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (Iris) de l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS)

Notre rapport aux restes humains a beaucoup évolué au cours de ces dernières décennies. Tout se passe comme s’ils étaient davantage investis par nous ; en témoigne la récente protection par la loi pénale du respect qui leur est dû. Leur qualité de vestige d’une vie l’emporte sur toute autre, notamment sur leur statut d’objet muséal. D’où l’importance de saisir le lien entre les vivants et les morts, ce qu’Arnaud Esquerré, sociologue, chercheur au CNRS et auteur de Les os, les cendres et l’État (Fayard, 2011), appelle la communauté « morte-vivante ».

Je pense que de profonds changements relatifs aux restes humains se sont opérés en Europe depuis, en particulier, les années 1990 et 2000. Et conjointement à cela, les sciences humaines et sociales ont elles-mêmes repris cette problématique à nouveaux frais et se sont penchés sur la question de ce que deviennent et de ce que l’on fait des restes humains.

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Le rapport aux morts et le souvenir que l’on en a se modifient considérablement avec le numérique et les dispositifs qui permettent de revoir et d’entendre les morts.

Depuis les années 1990 et 2000, il y a un souci accru de respecter davantage le corps mort de la part des pouvoirs politiques, et cela se matérialise avec le droit (condamnation de la profanation par exemple).

La crémation n’a été autorisée en France qu’à la fin du XIXe siècle, après la loi de 1887 sur les pratiques funéraires qui s’inscrit dans les grandes vagues de libéralisation de l’époque, et qui donne suite à une question déjà soulevée pendant la Révolution française et contre l’Eglise : « qui dispose des restes humains ? ».

Respecte-t-on les restes humains en les exposant ? Cette question s’est notamment posée en 2009 avec l’exposition « Our body » dans laquelle des restes humains plastifiés étaient exposés. Le fait de payer pour les voir a été considéré comme irrespectueux envers les morts.

>>> Extrait musical choisi par l'invité : " Danse macabre" de Saint-Saëns (ici dirigé par le chef d'orchestre Daniel Barenboim et accompagné par le violoniste Luben Yordanoff).

1ère diffusion le vendredi 22 novembre 2019.

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