Chaque décennie a connu ses prophètes qui lancent leurs carrières littéraires et politiques sur le dos de l’immigration. Dès les années 1910, le mythe prend forme.
La peur d’un changement de population à la suite d’une invasion migratoire n’est pas un nouveau thème dans le discours public français. Avant-même la Première Guerre mondiale, des hommes politiques et des romanciers agitaient le spectre d’une invasion venue des colonies asiatiques et africaines. Les livres qui s’emparent de cette psychose se vendent à des millions d’exemplaires. Après la saignée de 14-18, la France est durablement affaiblie. Avec près de 1.5 millions de jeunes Français qui ne reviennent pas du front, ce sont autant d’enfants qui ne naissent pas. Ce sont les classes creuses.
Parallèlement, des immigrés arrivent des pays pauvres du sud et de l’est de l’Europe. L’angoisse démographique et identitaire prend forme, un climat xénophobe se développe. La petite communauté juive est accusée de s’infiltrer dans les grandes entreprises, les banques, le gouvernement. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, les immigrés représentent moins de 6 % de la population. Mais pour certains, c’est déjà trop : la France serait en passe d’être détruite par ces nouvelles minorités. Une police des étrangers se forme. Ses hommes fourniront les cadres du Commissariat général aux questions Juives de Vichy. Après 1945, il faut reconstruire le pays. Les travailleurs venus des colonies arrivent en métropole. Immigrés, ils sont néanmoins Français. Mais les guerres d’indépendance vont les faire changer de statuts et faire naître des rancœurs tenaces. Bientôt, des partis politiques prospéreront sur ces fractures.
Un podcast de Roman Bornstein, réalisé par Thomas Dutter
Enregistrement : Adèle Caglar
Mixage : Morgane Danan
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