Cinq ans après "Bande de filles", la réalisatrice revient sur les écrans avec « Portrait de la jeune fille en feu » qui a reçu le prix du scénario lors du festival de Cannes 2019. L'occasion pour elle de nous parler du langage des films, d'égalité, d'humour et d'amour sans conflit.
- Céline Sciamma Scénariste et réalisatrice
Céline Sciamma nous propose cette fois-ci un film historique mêlant peinture et histoire d’amour. L’action se situe en 1770. Marianne est peintre et doit réaliser le portrait de mariage d’Héloïse, une jeune femme qui vient de quitter le couvent. Héloïse résiste à son destin d’épouse en refusant de poser. Marianne va devoir la peindre en secret. Introduite auprès d’elle en tant que dame de compagnie, elle la regarde.
Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.
Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.
"C’est le film auquel j’ai consacré la plus longue rêverie. Cinq ans séparent mes deux films, j’ai pris ce temps volontairement, pour faire la synthèse, pour trouver la forme nouvelle qui donnerait corps à cette histoire et aux multiples désirs qui la traversent. C’est un film extrêmement sentimental, très intime et proche de moi, mais aussi politique. Même si j’ai beaucoup écrit pendant le délai que je me suis accordé, cinq ans c’est quand même un peu long, mais j’ai la chance de pouvoir faire des films non pas pour forcément gagner ma vie, mais pour la vivre, et je suis très accompagnée dans les temporalités qui me conviennent."
"Quand j’écris et que fabrique des films, j’essaie d’être un peu primitive et je considère qu’il s’agit d’inventer avant tout la langue du film. Il faut se débarrasser, même si c’est difficile parfois, des envies d’être, qui s’incarnent beaucoup dans les clins d’œil qu’on peut faire aux cinéastes et aux films qui nous ont précédés. Il faut se départir des autres et de l’autorité des choses qui sont achevées, et se dire que les films inventent leur langue et que l’on va essayer de la parler, en étant la plus joueuse possible, et en fabriquant un espace mental dans lequel les spectatrices et les spectateurs se mettent à parler cette langue."
"Le film met en tension des sentiments plus que des personnages, c’est un film d’amour sans conflit. Cette absence de conflit, et la présence d’égalité permet d’avoir une conversation plus profonde, ou en tout cas, nouvelle, sur les différents sentiments qui nous habitent, les différentes dynamiques amoureuses possibles. Si on s’évite des rapports qui écrivent déjà l’histoire, on peut aller plus loin dans son écriture et dans sa pensée."
En tant que femmes, on est en déficit de transmission de notre histoire et donc de nos intimités et de nos émotions, alors, parfois, le cinéma peut redonner un peu de mémoire. Le film amène une consolation dynamique, parce que c’est déflagratoire et humoristique. Même s’il raconte ce qui semble être une histoire d’amour impossible, il s’inscrit dans dans ce qui est possible. Il propose une politique de l’amour qui sort des canons habituels, et raconte l’amour comme une dynamique émancipatrice. Il montre comment nos amours sont la condition de nos curiosités futures, que ce soit pour les œuvres d’art, les émotions, ou tout simplement d’autres amours."
Archives
Roland Barthes, émission « Nuits magnétiques », France Culture, 1986
Stanley Kubrick, entretien enregistré par Michel Ciment en 1975 et diffusé dans l’émission « A voix nue » sur France Culture en 2011
Références musicales
Vivaldi, Concerto pour violon en sol min op 8 n°2 RV 315 P 336 (L'été) : 3. Presto, interprété par Henryk Szeryng
Portrait of David, Wide open doors
Prise de son
Valentin Bobinet
Vous pouvez écouter et/ou podcaster cet entretien en cliquant sur le lien ci-dessus
L'équipe
- Production
- Collaboration
- Réalisation
- Réalisation
- Collaboration
- Collaboration