

Metteur en scène et directeur du CCN (Centre chorégraphique National) de Montpellier, il présente son spectacle "une maison", en tournée en France et à l'étranger jusqu'en mai 2020. L'occasion de nous parler de ses enjeux chorégraphiques, et de l'importance de l'espace et du vide dans ses créations.
Christian Rizzo (Danseur, chorégraphe).
Après la trilogie consacrée aux rapports entre danses d’auteurs et pratiques anonymes, et une pièce dédiée au jeune public, Christian Rizzo entame une nouvelle expérience de groupe sous le titre d’une maison. Concepteur de corps et d’objets depuis ses débuts, le chorégraphe ouvre d’autres paysages poétiques et éphémères à chaque nouvelle création. Une maison vient à point nommé ponctuer sa démarche, et faire basculer les motifs de sa danse, et sera en tournée en France et à l'étranger jusqu'en mai 2020,avec une escale au théâtre National de Chaillot du 27 au 29 février.

Extraits de l'entretien
Quand je crée, les titres arrivent très tôt, comme une promesse que je me fais à moi-même, mais je ne sais pas de quoi ils sont faits. C'est quelque chose qui va résonner, le temps de me mettre au travail, et de rentrer en studio avec toutes les personnes que j'aurai convoquées. Je ne suis pas quelqu'un qui prépare le travail trop à l'avance, je suis plutôt un artisan qui a besoin d'avoir les mains dans le cambouis. D'abord, j'essaie de comprendre pourquoi une pièce s'appelle comme ça en la faisant : il y a un endroit auquel je crois beaucoup, c'est l'endroit de la révélation du spectacle par le processus. En fait, le titre ne vient pas conclure un processus, et donner le nom à quelque chose : le nom préexiste à la forme.
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Pour moi, il était important de penser tout le travail comme un ensemble de fragments qui n'allaient être reliés que par le vide, parce que c'est ce qui m'intéresse le plus : le vide comme conducteur avant qu'un objet unique apparaisse.
Une maison, est un lieu où on rassemble sa mémoire, pour aussi la partager dans l'intimité. C'est un espace de mémoire et de transmission avec différentes temporalités: des désirs d'avenir et la présence de passé.
Il y a deux mots qui me sont extrêmement chers, qui sont : fantômes et nourriture. Pour moi, la question de l'absence est très présente, c'est une façon de concevoir la question du vivant, et de continuer à entretenir une relation avec l'absence, de lui redonner une autre forme. Le corps du danseur est déjà un lieu de mémoire d'autres corps, et de fait, il incarne ces absences. Ce qui m'intéresse, c'est la grammaire anatomique qui s'inscrit dans le langage chorégraphique. En fait, je cherche constamment les corps qui habitent ces fantômes : je crois que, contrairement au vide, je ne supporte pas l'idée de néant. Alors, j'essaie de conjurer l'idée du néant, en faisant que l'absence continue à être quelque chose qui a un potentiel devant.
Je ne peux pas penser un corps s'il n'est pas pris dans un espace : ce que je regarde, ce n'est pas le corps, mais l'espace qu'il génère. Il y a autant de différence entre la chorégraphie et la danse qu'entre un instrumentiste et un compositeur. Je considère que la danse se referme sur le corps, ne s'intéresse qu'aux gestes et ne compose pas avec l'espace environnant. Pour moi, l'enjeu chorégraphique se trouve à cet endroit-là : comment l'espace est inscrit dans le corps, et comment le corps s'inscrit dans l'espace.

Archives
Dominique Gonzales-Foerster, émission "Les mastercalsses", France Culture, 2018
Ryoko Sekiguchi, émission "On ne parle pas la bouche pleine", France Culture, 2016
Dominique Bruguière, émission "Changement de décor", France Culture, 2012
Jérôme Bel, émission "Les masterclases", France Culture, 2019
Références musicales
The residents, In between dreams
David Bowie, Eight line poem
Cercueil, extrait du spectacle une maison de Christian Rizzo
The Do, Too insistent
Prise de son
Sylvain Latu
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