Denis Dailleux : "Photographier, c'est s'emparer du corps"

Denis Dailleux
Denis Dailleux - Domique Mérigard
Denis Dailleux - Domique Mérigard
Denis Dailleux - Domique Mérigard
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Nous recevons le photographe pour la sortie de son livre "Juliette" aux éditions le Bec en l'air et une rétrospective de son oeuvre à travers deux expositions : « Mères et Fils » au théâtre Le Liberté à Toulon, et « Ma tante Juliette » à la Cité de l'image à Clervaux (Luxembourg).

Avec

Depuis quelques années, tout en continuant à photographier lʼEgypte, Denis Dailleux se rend régulièrement au Ghana où il explore de nouvelles relations au corps et à lʼespace, à la vie et à la mort, à la communauté, à la mer, qui ouvrent de nouveaux horizons à sa recherche photographique.
 

Régulièrement exposé et publié dans la presse nationale et internationale, son travail fait l'objet de nombreuses monographies en grande partie éditée par Le Bec en l'air. La dernière en date Juliette vient de paraître chez le même éditeur. Enfin, deux expositions de Denis Dailleux sont visibles actuellement : « Mères et Fils » au théâtre Le Liberté à Toulon, et « Ma tante Juliette » à la Cité de l'image à Clervaux (Luxembourg).

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Les martyrs de la révolution
Les martyrs de la révolution
- Denis Dailleux

Extraits de l'entretien

J'étais au Caire ce 25 janvier 2011, chez moi avec un ami. Je n'étais au courant de rien, sauf que j'entendais des bruits, et je sentais qu'il se passait quelque chose dans la rue. Nous sommes sortis pour voir ce qui se passait, parce qu'une manifestation au Caire c'était exceptionnel, ça n'avait jamais existé. On s'est retrouvé pris dans un tourbillon assez incroyable. J'avoue, qu'à ce moment-là, je n'ai pas pensé que j'étais photographe, j'étais juste un citoyen. J'ai vu des jeunes garçons des quartiers populaires hurler et partir au combat. Là, j'ai vu ce qu'était le courage, et je me suis demandé si j'aurais le courage de mourir pour mon pays. Au début, je ne voyais pas ce que photographiquement je pouvais amener, mais quand j'ai vu les garçons arriver avec la photo de leur ami mort, ça a été un choc, et je me suis dit que j'allais témoigner à ma manière, et leur rendre hommage.

J'utilise un appareil photo, dont la visée est au-dessus, et en fin de compte, je suis dans une petite boîte et c'est ce qui me fascine. Si je ne suis pas plongé dans cette petite boîte, je ne vois pas le monde. J'ai souvent l'impression que les gens n'imaginent absolument pas où je suis, ni qui je suis, c'est comme si je devenais transparent, et que je pouvais mieux saisir le monde qui venait à moi. Grace à cet appareil, l'osmose se fait plus facilement, et peut-être que ça me permet d'être un peu plus prédateur et de voler des images. Pour moi, la photo c'est une fusion, plus qu'une vision.

En photographie, il faut prendre, et parfois il y a une urgence à prendre. Il y a des moments où, on sent que tout est en place, et parfois, on le croit, mais c'est une illusion, rien n'est là. En fait, il faut beaucoup de conjonctions pour que tout soit là, mais aussi, en ce qui me concerne, beaucoup de désir. 

"Le port de Jamestown au Ghana 2009"
"Le port de Jamestown au Ghana 2009"
- Denis Dailleux

Archives

Claude Guibal, émission "Inter soir", France Inter, 2011

Klavdij Sluban, émission "Par les temps qui courent", France Culture, 2011

Pierre Guyotat, émission "Carnet nomade", France Culture, 2001

Ipousteguy, émission "Nuits magnétiques", France Culture, 1978

Anne Muxel, émission "Nuits magnétiques", France Culture, 1995

Références musicales

Radiohead, Videotape

Kamasi Washington, Claire de lune

Prise de son

Ludovic Auger

Vous pouvez écouter et/ou podcaster cet entretien en cliquant sur le lien ci-dessus

L'équipe