Euzhan Palcy : "Je crée avec et pour les enfants"

Euzhan Palcy
Euzhan Palcy - photo Renaud Monfourny
Euzhan Palcy - photo Renaud Monfourny
Euzhan Palcy - photo Renaud Monfourny
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Nous recevons Euzhan Palcy, réalisatrice invitée d’honneur du festival du Film de Femmes de Créteil qui se déroule du 22 au 30 mars. Elle nous parle de ses combats pour changer les représentations, de sa volonté de transmission.

Avec

Euzhan Palcy est la première réalisatrice noire à avoir remporté un Lion d’argent à la Mostra de Venise en 1983, ainsi qu’un César, pour son film Rue Cases-Nègres. Elle a également réalisé une Saison blanche et sèche (1989). Elle est membre du Comité national pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage ainsi que de l’Académie des César et de l’Académie des Oscars.

Quatre de ses films seront projetés dans le cadre du Festival de Films de Femmes : Le combat de Ruby Bridges, Rue Cases Nègres, Siméon et Une saison blanche et sèche. La cinéaste donnera à cette occasion une masterclasse le samedi 23 mars et fera une lecture d’extraits de textes de Maryse Condé et d’Aimé Césaire à la Maison des Arts de Créteil le dimanche 24 mars à 15h30.

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L’éducation est quelque chose d’extrêmement important. Tout comme l’est la représentation. Les caméras vont en banlieue lorsqu’il y a du grabuge, pour filmer les jeunes en train de mettre le feu ou de gesticuler devant les caméras parce qu’ils se voient ensuite à la télévision. Et tout le monde y va. Mais il n’y a rien qui les valorise. Faites des films ! Faites des séries ! Donnez-leur des héros positifs ! Je ne dis pas que ça va régler le problème, mais ça va contribuer à le régler. Il faut qu’il y ait des rencontres entre les créateurs, les cinéastes dans les banlieues. Projetons les films là-bas, organisons des débats, discutons avec ces jeunes. Donnez-leur envie d’être différents, donnez-leur le sentiment qu’ils existent, qu’ils ont des choses à dire et qu’on entende ce qu’ils ont à dire, qu’on leur donne le moyen de s’exprimer. 

Je connais trop bien le pouvoir de l’image, avec un simple film vous pouvez créer une révolution dans le bon sens ou dans le mauvais sens. On peut changer des vies avec un film. On peut créer des milliers de vocations. Quand j’avais 10 ans et que j’ai dit « je veux faire du cinéma » j’avais déjà compris et ressenti ces choses-là. Je ne pouvais pas le formuler comme aujourd’hui, mais je vivais ça au fond de moi. J’étais frustrée, j’étais malheureuse. Je supportais très mal l’idée d’aimer le cinéma, et que cet art que j’aime autant me blesse autant.

Le cinéma a une fonction sociale. Pour moi, le cinéma ce n’est pas juste le divertissement. Mon cinéma je veux qu’il divertisse, parce qu’on ne va pas enfermer les gens dans des problèmes. Mais il faut parler à leur mental, à leur cœur, à leur corps, à leurs fibres. Les faire rire, sourire, soupirer, pleurer. Tout ça à la fois. Mais c’est indispensable que les gens voient ce qui se passe en Afrique du Sud. C’est une chose d’en parler, c’est une autre chose de le vivre. Etre dans le confort de son fauteuil, dans une salle de cinéma, et de voir ce qui se passe dans un pays en sachant que c’est la vérité. Certaines scènes de mes films sont violentes oui. Mais eux ils vivent ça alors le spectateur peut avoir le courage de rester, son derrière dans le fauteuil, il peut regarder, il ne risque rien !

Sons diffusés : 

  • André Brink dans l'émission Voix du silence, France Culture, 1988
  • François Truffaut, au micro de Paula Jacques dans Les après midi de France Culture, 1976
  • Biguine de Chyco Jehelman
  • Extraits du film d'Euzhan Palcy Une Saison blanche et sèche, 1989

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