Katia Kameli :"A travers l’image, je cherche la manière dont on regarde l’histoire"

Katia Kameli
Katia Kameli - Margot Montigny
Katia Kameli - Margot Montigny
Katia Kameli - Margot Montigny
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Rencontre avec l’artiste et réalisatrice franco-algérienne pour évoquer son exposition "Elle a allumé le vif du passé" à la FRAC- Provence-Alpes-Côte d’Azur, du 20 mai au 19 septembre 2021 (initialement prévue du 12 février au 26 mai).

Avec
  • Katia Kameli vidéaste et photographe

A travers des films et des photographies, l’exposition Elle a allumé le vif du passé propose un regard africain, et plus précisément nord-africain et algérien, sur la constitution de grands récits du continent et sur leur circulation internationale, mais aussi sur l’écriture de l’histoire algérienne. L’œuvre de Katia Kameli pose spécifiquement la question de la place des femmes au sein de ces histoires et de cette histoire, et se préoccupe de leur statut d’autrices, de créatrices, de témoins, ou de commentatrices.

Katia Kameli, image extraite de "Le Roman Algérien - Chapitre 3", 2019, Vidéo HD, 45 min.
Katia Kameli, image extraite de "Le Roman Algérien - Chapitre 3", 2019, Vidéo HD, 45 min.
- Katia Kameli, ADAGP, Paris, 2020

Comment regarder l’histoire ?

Une image pour moi implique une lecture et donc, il y a comme pour n'importe quelle lecture, différentes manières de la redistribuer, de la narrer et de la décrire_._ Et puis, et une image est liée aussi à un contexte historique, à une situation, et à un choix qui a été fait pour opérer cette image, comme par exemple, le cadrage. C’est ce qui m'intéresse dans mon travail en tant que plasticienne. En ce qui concerne le terme de roman algérien, je fais effectivement référence à cette notion de roman national, mais que je raccroche à notre manière de lire l’histoire. Pour moi, l’histoire, c’est une notion un peu floue, parce qu’il y a toujours un narrateur derrière n’importe quelle histoire, et donc il y en a toujours une lecture particulière. En fait, mon travail consiste à savoir où on se situe, et de quelle manière on regarde l’histoire, ou une image. Katia Kameli, plasticienne

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Une lecture du passé nécessaire

Les Algériens sont enfermés avec une image du passé, et c’est dû au fait qu’il y a tout un travail sur leur histoire qui n'a pas été fait : c’est ce que questionne mon travail. On leur a confisqué une partie de leur histoire, c'est ce que le FLN a mis en place. Il y a des figures politiques qui n'existent plus. Il est encore nécessaire de faire ce travail, parce que, s’il n’y a pas de lecture du passé, on ne peut pas aller vers l’avant. S'il n'y a pas une compréhension de ces figures du passé, et de la manière dont le FLN a œuvré pour lisser ou pour effacer certaines de ces figures, l'Algérie ne pourra pas avancer, ne pourra pas construire sa propre et sa future histoire. Katia Kameli, plasticienne

"Le roman algérien" de Katia Kameli
"Le roman algérien" de Katia Kameli
- Katia Kameli/ Adagp

Pourquoi rallumer le vif du passé ?

Cette phrase « Elle a allumé le vif du passé » est polysémique, et c’est la raison pour laquelle elle m’intéresse. Elle renvoie à différentes choses, on peut la lire de différentes manières, et c’est justement ce que j’essaie de mettre en place dans mon travail d’analyse des images : allumer le vif du passé, c’est ce que j’essaie de faire et ce qu’on doit tous faire. En cela, je m’adresse aussi aux femmes algériennes, car c’est important qu’elles rallument le vif du passé, parce qu’on essaie trop souvent de leur prendre la parole. Je pense clairement que, si les femmes ne reprennent pas leur place en Algérie, ce pays est voué à la faillite totale. Katia Kameli, plasticienne

Extrait

Le roman algérien, chapitre 1, film de Katia Kameli

Archives

Claire Simon, émission "Les masterclasses", France Culture, 2019

Wassyla Tamzali, émission "Une journée particulière", France Inter, 2019

Références musicales

Boutaiba S’ghir, Malgré Tout

Aicha Kholkhal, Naâma

Prise de son

Anthony Thomasson

L'équipe