Laura Perrudin : "Parfois, le texte est une matière musicale qui contient presque tout"

Chanteuse, harpiste, compositrice, productrice et autrice, Laura Perrudin est remarquée dès 2015 lors de la sortie de son premier album  _Impressions  _Suit Poisons & Antidotes en 2017, ovni pop aux frontières d'une soul teintée d'electronica et d'une folk expérimentale, reposant sur l'utilisation originale d'un instrument créé pour elle : la harpe chromatique électrique. Prêtant sa voix singulière aux recherches et bidouillages électroniques qu'elle affectionne tant, Laura Perrudin compose un univers personnel très fort, qui se matérialise à merveille lors de concerts surprenants.

Avec son nouvel album Perspectives & Avatars, elle creuse le sillon d’une pop, de plus en plus soul, électrique et dansante. Sa poésie franche et sans détour dessine un jeu de rôles, de points de vues et de masques. Album de chansons aux collaborations prestigieuses (Philippe Katerine, Mélissa Laveaux, Becca Stevens, Emel Mathlouthi, Becca Stevens, Ian Chang…) Perspectives & Avatars s’appuie sur un concept d'écriture, où chaque chanson est un personnage, un avatar.

Extraits de l'entretien

Le texte de "The W world" vient de l’envie que j’avais de parler de plein de sujets en même temps, et d’essayer d’en faire une synthèse. Tout d’abord, j’avais l’idée de parler des femmes accusées de sorcellerie. Je me suis beaucoup intéressé à ce sujet, et j’ai fini par comprendre, plus ou moins entre les lignes, qu’une grande partie de ces accusations, qui menaient à la torture at à la mort, étaient une espèce de prétexte pour faire disparaître des femmes dérangeantes, trop libres, trop indépendantes et créatives : des femmes qui n’avaient pas besoin des hommes pour vivre. En parallèle, en regardant l’histoire de l’art, on se rend compte qu’on a fait disparaître symboliquement beaucoup de femmes artistes. Il y a eu un écrémage des encyclopédies de l’art, où les noms qu’on sélectionne avec le temps, sont majoritairement ceux des hommes. Je me suis rendue compte que dans ma formation artistique, j’avais très peu de références féminines, et j’ai trouvé ça vertigineux. Faire disparaître des femmes artistes, c’est faire disparaître des sorcières, des femmes qui ont du pouvoir. Dans "The W world", j'essaie de synthétiser tout ça. Laura Perrudin

"Perspectives & Avatars", comme "Poisons & Antidotes", sont des albums que je fais presque entièrement avec des sons faits avec ma harpe. C’est un solo, avec plein de machines pour transformer le son de ma harpe, et pouvoir jouer de façon percussive de plein de façons différentes. Je suis obligée de redoubler d’inventivité pour trouver la façon de faire les sons dont j’ai envie avec un seul outil. Ca rend le rapport au live un peu particulier. En écrivant ce nouvel album, j’avais en tête de faire marcher cet oxymore d’une harpiste seule sur scène, qui a envie d’avoir un rapport frontal et de danse avec un public. Je tiens à respecter une règle d’or, qui est que je tiens à faire tous les sons sur scène. Je ne veux pas arriver avec des sons pré-produits par des machines qui font tout le travail, et qui instaurent des rails. Cela permet d’aller chercher la tension des gens, à des endroits auxquels ils ne s’attendent pas, et de créer une transe et une danse différentes. Laura Perrudin

Archives

Violaine Mayor, émission "Décibels", France Culture, 2006

Björk, émission "Tendance musiques", France Inter, 2007

Références musicales

Laura Perrudin et Becca Stevens, The W World

Laura Perrudin, Something to lose 

Laura Perrudin et Emel Mathlouthi, MetaSong

Prise de son

Bernard Lagnel