

Pour sa pièce « May B » et la sortie du documentaire " Maguy Marin : l’urgence d’agir ", la chorégraphe évoque l'impact des textes de Beckett dans son processus créatif, l'importance de faire communauté en gardant son individualité, et de s'accorder le droit d'être une femme totale.
- Maguy Marin chorégraphe
« May B » est un fragment d’humanité, une eau-forte avec laquelle en 1981, Maguy Marin congédiait la formation qu’elle avait reçue au sein de l’école Mudra. La lecture de Samuel Beckett a également inspiré Maguy Marin, de par ces « vies fissurées » que glorifie une forme unique de burlesque poignant.
En même temps, paraît le documentaire « Maguy Marin : l’urgence d’agir » de David Manbouch en salles le 6 mars. Tourné pendant la préparation de la pièce « May B », le film traite de transmission, d’engagement, de travail collectif, et porte une réflexion sur l’art qui aide à vivre.

Chez Beckett, il y a toujours des rapports de domination très différents. Et dans « May B », la domination est très présente. On est tous dans une sorte de dépendance, dont on ne pourra jamais se défaire, parce que tout seul on ne fait rien. Mais en même temps, il y a parfois cette haine qu’on a à être plusieurs, et cette incompatibilité obligatoire de coexistence a un côté dérisoire et assez drôle.
Au début, j’ai lu « Fin de partie » de Beckett, puis j’ai commencé à lire un peu tout ce que je trouvais, et ça m’a totalement bouleversée. Ce bouleversement j’ai eu du mal à l’analyser, ça me mettais dans un drôle d’état, pas très rassurant. Ca a agi en moi, infusé pendant beaucoup d’années, et à un moment, j’ai osé me dire que je pouvais faire un travail à partir des œuvres de Beckett, même si ça semblait arrogant, ça a été plus fort que moi, et la chose s’est faite.
Ces gens qui sont là sur le plateau c’est nous, ou ça pourrait être nous un jour, on ne sait pas, en tout cas c’est comme si il y avait une prolongation entre le plateau et les spectateurs. Ceux qui sont assis dans la salle, sont aussi ceux qui sont sur le plateau, et également ceux qui ne viendront jamais au théâtre.
Quand on « refait », c’est pour mesurer la distance qui est encore à faire pour atteindre une certaine densité, une intensité vitale qui se transmet aussi à celui qui regarde. C’est un peu comme un travail d’artisan qui refait le geste avec le moins de parasites possible, de façon à obtenir quelque chose d’assez simple. Nous les artistes, en particulier les acteurs et les danseurs, on est très encombrés par nous-mêmes. Tout le travail consiste à épurer, dépouiller ce qu’on est en train de faire, pour lui redonner son sens initial.
J’avais envie de dire que la création se mâtine complètement du quotidien des gens, de leurs souffrances et de leurs bonheurs. Le travail a toujours été quelque chose qui nous a fait survivre, qui nous a portés dans nos vies avec les peines et les joies.
Archives
Emission « Six jeunes autour d’un livre », à propos de "Fin de partie" de Samuel Beckett, 1970
Histoire de la danse, émission « La fabrique de l’histoire », France Culture, 2009
Extrait
«Maguy Marin : L’urgence d’agir », film de David Mambouch, 2019
Références musicales
Anonyme, Jesus blood never find me yet
Schubert, Der Leiermann
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