En 2020, Le danseur et chorégraphe repart en tournée avec "Trottoir", son spectacle présenté en décembre 2019 au Centre National de la Danse, à Pantin. Il évoque ses questionnements autour du rire et de la violence, ainsi que l'importance du langage et de la réflexion dans ses créations.
- Volmir Cordeiro chorégraphe
Après Rue, duo avec Washington Timbó, de 2015, Volmir Cordeiro aborde maintenant le trottoir comme espace privilégié de circulation de mondes, de travail, de norme, de contact, de fête, de stagnation aussi. En cherchant des états contradictoires, stratégie récurrente dans son travail, la quête de Trottoir sera celle de “casser les impasses”, de permettre que les choses passent, et donc d’autoriser le passage comme une tentative de célébration. Afin de s’écarter de l’impuissance et de l’exclusion qui gouvernent une “tragédie du monde” actuel, les danseurs ne cessent de se transformer, de se masquer et se démasquer, d’être tirés hors d’eux-mêmes dans une épreuve commune d’une extase passagère.
Extraits de l'entretien
Je dis souvent aux danseurs qu'il faut être sur une surface jouissive, où on peut se dire qu'il y a une fête, où on peut danser et célébrer quelque chose, mais que par contre, au sous-sol, il y a trop d'angoisses: il faut être joyeux tout en sachant que dans l'entourage, il y a plein de menaces qui interdisent l'accomplissement de cette joie. C'est dans les tensions, qu'il peut y avoir entre ces forces contradictoires, et que demeure cette disponibilité au corps à se faire trottoir. Le trottoir c'est comme une sensation d'être à la fois autonome, d'être capable de marcher et de se déplacer, et en même temps de savoir qu'on peut s'y faire tuer, violer ou voler : c'est un espace qui est porté par des forces absolument opposantes.
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Pour moi, les joies viennent toujours à des moments imprévisibles et durent très peu de temps. Quand je crée, je cherche toujours cette joie, qui peut déclencher une violence dont on peut rire ensuite. En fait, j'ai envie d'interroger le rire, de quoi rit-on aujourd'hui ? Je pense, qu'à notre époque, il y a beaucoup de rires très jaunes, et interroger cette complexité du rire m'intéresse beaucoup.
Quand j'écris les textes pour les pièces, c'est une manière de me confronter à cette vulnérabilité que pose l'écriture. Le français n'est pas ma langue maternelle, alors je suis sans arrêt en recherche d'une forme de justesse et de compréhensibilité. Je veux me rendre disponible et être aussi du côté de celui qui m'écoute, pour voir si les conditions de paroles et d'écoute sont bonnes. Parfois, des dérangements linguistiques ou des détours de syntaxe vont produire des ruptures ou des hiatus de compréhension, qui font que le langage me travaille beaucoup. J'en ai une fascination, justement parce que je pense qu'il est peut-être l'endroit le plus fortement fragile de ma constitution.
Dans mes créations, J'ai parfois une certaine difficulté à regarder ce qui me traverse. Quand je me sens dans un état créatif, je me confronte tout le temps à la question de savoir pourquoi je suis en train de penser à telle ou telle chose ? Je suis très autoréflexif, j'ai besoin de comprendre comment la pensée s'organise, et je suis toujours en train d'observer comment j'observe. On est absorbé par l'idée que réfléchir, c'est durcir le corps, durcir la mentalité, entrer dans un cadre et emboîter tout ce qui est de l'ordre de l'instinct ou de la sauvagerie. Au contraire, je pense que réfléchir c'est accéder à la pensée poétique.
Archives
Tadeus Kantor, émission "Notre temps", France Culture, 1972
Paul B. Preciado, émission "Par les temps qui courent", France Culture, 2019
Jacques Rancière, émission "A voix nue", France Culture, 2011
Extraits
Trottoir, de Volmir Cordeiro
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Christophe Tarkos, Le parpaing, extrait du recueil L'enregistré (POL, 2014)
Référence musicale
Sexy Sushi, Je doute
Prise de son
Alain Joubert
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