Le crex crex

Râle des genêts (crex crex)
Râle des genêts (crex crex) - Ron Knight (Wikimedia Commons)
Râle des genêts (crex crex) - Ron Knight (Wikimedia Commons)
Râle des genêts (crex crex) - Ron Knight (Wikimedia Commons)
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Voilà un oiseau dont le nom est très parlant et qui correspond parfaitement au son qu’il émet : crex crex… Il faut être noctambule pour l'entendre car le crex crex chante principalement entre 11h du soir et 3h du matin

Cet oiseau aussi appelé râle des genêts ressemble à une petite perdrix en un peu plus élancée, quand on a la chance de l’apercevoir. Car il est très difficile à observer, non seulement parce qu’il ne vit en France qu’une petite partie de l’année, les 3 mois d’été, mais aussi parce qu’il aime se cacher dans les herbes hautes des prairies. La tête placée un peu plus bas que le reste du corps, il reste tapi, aux aguets, redressant de temps en temps la tête pour jeter un coup d’œil aux alentours ou pour pousser son cri. On le verra rarement voler en dehors des périodes de migration à moins d’y être contraint, car il préfère courir pour se déplacer, se faufilant et circulant rapidement entre les herbes.

Ce migrateur venu d’Afrique du Sud s’installe dans nos contrées courant mai pour se reproduire et faire son nid dans les grandes prairies de fauche, celles qui produisent le fourrage dont ont besoin les animaux d’élevage. Mais c’est là où l’histoire du râle des genêts devient triste. Car avec les avancées technologiques, la moissonneuse arrive de plus en plus tôt dans les champs, fin mai, ou en juin selon les années, ne permettant pas à l’oiseau de finir son cycle de reproduction. La femelle, qui couve et élève seule ses petits, se retrouve piégée avec ses jeunes, à l’arrivée de la machine. D’autant qu’ils tardent à s’en aller, auront tendance à courir plutôt qu’à voler, et seront immanquablement rattrapés par la faucheuse. C’est pour cette raison que l’Etat a proposé des mesures d’indemnisation aux agriculteurs afin qu’ils fauchent plus tardivement leurs prairies. Car le râle des genêts est en voie d’extinction. On estime sa population en France à moins de 300 chanteurs, soit moins de 300 mâles.

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Crex crex
Crex crex
- Richard Crossley (Wikimedia Commons)

Le mâle est le seul à chanter. Un chant râpeux, raclement guttural qui fait penser au frottement des dents d’un peigne avec le doigt. Ce chant sert à attirer les femelles pendant la période des amours. Tête dressée, le mâle se livre alors à une parade amoureuse et chantée où il déploie ses ailes ; parade à l’occasion de laquelle il ira éventuellement offrir un petit insecte à l’objet de ses désirs.

Mais ce chant a une autre fonction, car il s’agit d’en imposer aux autres mâles. L’heure est en effet à la querelle, chacun voulant délimiter son territoire. Les mâles se repèrent au chant et s’il y en a un qui s’approche un peu trop près du territoire de l’autre, il va se faire littéralement courir après, tout en chantant. Par ailleurs, on a découvert que sous l’apparente monotonie de ce chant, on pouvait connaître le degré de motivation et d’agressivité de la bête. C’est l’espacement entre les syllabes du chant qui va nous donner des indications. Un mâle un peu mou va avoir un chant constant avec le même laps de temps entre chaque syllabe. Tandis qu’un mâle tonique, puissant et agressif rapprochera les deux syllabes chantées avant d’effectuer un petit silence, crexcrex crexcrex plutôt que crex crex crex. Une subtilité qui permet ainsi aux râles des genêts de s’évaluer et de se jauger au simple coup d’oreille.

Prise de son : Julian Pichenot

Conseiller scientifique : Julian Pichenot

Julian Pichenot, biologiste-écologue consultant, est diplômé d’un doctorat d’université en Biologie de la Conservation. Naturaliste et scientifique, il s’intéresse aux sons de la nature et à leur étude pour le suivi et la conservation des espèces.

En tant qu'espèce menacée en France, le râle des genêts fait l'objet d'un Plan National d'Actions initié par le Ministère en charge de l’Écologie (MEEDDM), en vue de proposer des mesures pour sa sauvegarde.

http://www.rale-des-genets.fr/plan-national-d-actions/