Exil et appartenance, expérience du monde, place de l'individu dans l'aventure collective, l'oeuvre de Robert Kramer faisait du cinéma avec les plus petits moments de vie. Plan large sur un cinéaste du mouvement, figure majeure de la contre-culture et de la contestation dans les années 1960-1970.
- Richard Copans Cinéaste, producteur, fondateur des Films d'Ici
- Patrice Robin Romancier
- Charlotte Garson Rédactrice en chef adjointe des Cahiers du cinéma
Pour Robert Kramer, l'expérience (au sens anglais du terme), c'est un bloc de vie, lié à un personnage, une expérience intransmissible, mais dont il faut essayer de saisir la totalité pour en faire du cinéma. Cette notion de l'expérience est centrale, et traverse tout le cinéma de Robert Kramer, sous différentes formes. Richard Copans
« Pour moi, disait Robert Kramer, chaque film était en soi la création d’une communauté. Une communauté capable d’inventer l’histoire qu’elle vit. Une communauté de gestes, le partage du cadre, d’un espace, du temps. » A l’heure où, partout dans le monde, s’inventent collectivement de nouvelles formes d’action politique et d’être au monde, qui peinent à trouver leur traduction cinématographique, si ce n’est dans la très hollywoodienne superproduction nihiliste qu’est Joker, il est urgent de redécouvrir le cinéma, toujours sur le qui-vive, de Robert Kramer, qui, sans cesse, a remis en cause le modèle dominant, qui est passé de l’ambition de changer le monde à celle de le comprendre. Il a quitté l’Amérique pour devenir, du Vietnam au Portugal, de l’Angola à l’Ukraine, et principalement en France, un citoyen du monde.
« J’ignorais qui verrait mes films. Ma stratégie était, finalement, celle d’une bouteille à la mer », disait encore Robert Kramer. Et pourtant, 20 ans après son décès brutal, à l’âge de 60 ans, c’est bien du monde d’aujourd’hui, que nous parle ce cinéma, qui n’a jamais fait de distinction entre fiction et documentaire, sinon pour la remettre en question. Pour évoquer avec nous dans Plan Large cet « unique et long film, une histoire en continuel devenir », comme la décrivait Robert Kramer, et à l'occasion d'une rétrospective à la Cinémathèque française à Paris, son chef-opérateur, producteur et surtout ami de 20 ans, Richard Copans, et l’écrivain Patrice Robin, qui d’une rencontre tardive avec le cinéaste, alors qu’il préparait la première grande rétrospective de son œuvre, a tiré un très beau récit intime de sa propre vie, avec Kramer en compagnon de route fantôme : Mon histoire avec Robert édité chez P.O.L.
Robert Kramer a été d'emblée considéré comme un auteur à part entière aux Etats-Unis. Alors qu'en France, on l'a compris plus tard avec son film "Milestones", qui fut une révélation éclatante. Ce fut comme un coup de poing. Ce n'était pas seulement passionnant politiquement, mais il proposait une forme cinématographique inouïe. C'était une découverte extraordinaire, un bouleversement. Sa lutte, c'était le cinéma. Il avait la responsabilité d'inventer un nouveau cinéma. Richard Copans
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En fin d'émission, la chronique de Charlotte Garson, sur le cycle RDA 1980/1990, présenté dans le cadre du Mois du documentaire, partout en France. 30 ans que le mur de Berlin est tombé, et dans la foulée a disparu la République Démocratique Allemande, un pays dont on n’a longtemps pas pu, faute d’images, se figurer à quoi ressemblait la vie quotidienne et ses habitants. Dans le cadre du Mois du Documentaire, l’association Documentaire sur grand écran propose une rétrospective itinérante, dans plusieurs salles de France, d’une dizaine de films produits en Allemagne de l’Est, à partir d’une question, posée par le programmateur de ce cycle, l’historien du cinéma Federico Rossin : « peut-on retracer, à travers sa production documentaire, l’effondrement d’un pays qui n’apparaît plus sur les cartes ? ». Le festival Entrevues, à Belfort, programmera du 18 au 25 novembre, 6 films de la DEFA, la société de production d’Etat de la RDA.
Les recommandations de Plan Large
Autour de Robert Kramer : Notes de la forteresse (1967-1999) de Robert Kramer, édition établie par Cyril Béghin est édité chez Post-édition et la rétrospective à la Cinémathèque française à Paris, du 6 au 24 novembre. Mon histoire avec Robert, de Patrice Robin, est édité chez P.O.L. Guns, de Robert Kramer, sortira en janvier 2020, en DVD et version restaurée, en attendant l'intégrale en DVD prévue fin 2020 aux éditions Re : voir.
Le Mois du Documentaire fête ses 20 ans et débute en novembre, un peu partout en France, avec notamment Les Ecrans documentaires à Arcueil du 13 au 19 novembre, et la première édition de Best of Doc, se tient du 20 au 26 novembre dans près de 30 salles en France, avec la projection des 16 des meilleurs documentaires de l'année 2018.
Le nouveau numéro de la revue Images documentaires, intitulé "Visages, la prise du regard", consacre un dossier à l'oeuvre de Jean-Daniel Pollet, et particulièrement à son film L'Ordre (1974), qui sera projeté au Centre Pompidou à Paris, le jeudi 7 novembre à 20h.
Le livre d’Images, de Jean-Luc Godard, sera projeté le 8 novembre, en ouverture du Festival les Instants Vidéo poétiques et numériques (qui se tient jusqu’au 1er décembre à Marseille).
Il était une fois Jean Rouch – 7 films sur Jean Rouch, un coffret 4 DVD aux éditions Montparnasse.
Les extraits de films
- Ice, de Robert Kramer (1969)
- Milestones, de Robert Kramer (1975)
- Doc's Kingdom, de Robert Kramer (1987)
- Route One USA, de Robert Kramer (1989)
- Walk the Walk, de Robert Kramer (1995)
- Cités de la plaine, de Robert Kramer (2000)
- Blanchisseuses (Wäscherinnen), de Jürgen Böttcher (1972)
- Adieu l'hiver, de Helke Misselwitz (1989)
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