La filmothèque idéale de Pascale Ferran : "Le cinéma, c'est un accès possible à des formes de vérités, où on peut faire exister ses rêves"

"Blissfully Yours", d'Apichatpong Weerasethakul (2002), "un film des premières fois, un grand film à voir en salle" selon Pascale Ferran
"Blissfully Yours", d'Apichatpong Weerasethakul (2002), "un film des premières fois, un grand film à voir en salle" selon Pascale Ferran - Why Not Production
"Blissfully Yours", d'Apichatpong Weerasethakul (2002), "un film des premières fois, un grand film à voir en salle" selon Pascale Ferran - Why Not Production
"Blissfully Yours", d'Apichatpong Weerasethakul (2002), "un film des premières fois, un grand film à voir en salle" selon Pascale Ferran - Why Not Production
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Alors que les salles de cinéma sont encore fermées jusqu'en janvier 2021, Plan large poursuit sa série d'émissions en forme d'autoportraits en cinéphiles, avec celles et ceux qui font le cinéma d'aujourd'hui. Pour cette sixième séance, la cinéaste Pascale Ferran nous dévoile sa filmothèque idéale.

Avec

"Pour tous les films qui ne sortent pas aujourd'hui, rappelle la Société des Réalisateurs de Films dans un communiqué publié hier, et intitulé Le Mépris, ce sont des distributeurs et des producteurs qui ne pourront pas s'engager sur de nouveaux projets, ce sont des films qui ne pourront pas exister dans le futur, et autant d'emplois qui seront fragilisés pendant des années. C'est toute la chaîne qui souffre, toute une industrie bloquée, sans compter un appauvrissement grandissant de la culture, qui n'offre d'autre choix que les plateformes de vidéo à la demande."

Heureusement, parmi celles-ci, certaines restent de vrais refuges, où découvrir et retrouver certains de ces films qui nous construisent, nous constituent et nous regardent, dans tous les sens du mot. C’est le cas de La Cinetek, la première plateforme de VOD consacrée au cinéma de patrimoine, inventée en 2015 pour recréer de la transmission, quand les grandes émissions de cinéma avaient depuis longtemps disparu de la télévision. 

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La deuxième film que j'ai vu dans ma vie, c'était "La Belle et la Bête" de Jean Cocteau à la télévision en 1967. Il m'a fait extrêmement peur, mais c'est un rapport constitutif au cinéma. Le cinéma est notamment fait pour apprivoiser ses peurs. "La Belle et la Bête" est la plus grande histoire d'apprivoisement qui existe. C'est un enchantement absolu, c'est un des plus beaux films du monde. C'est un film utile pour les enfants. Il dit aux jeunes filles qu'il faut en permanence rester debout et ça dit aux jeunes hommes et aux petits garçons, que c'est finalement l'attention et la délicatesse qui les rend séduisants. Quand je l'ai revu, j'étais encore plus éblouie par l'inventivité de la façon dont Cocteau crée l'illusion avec énormément de trucages en direct et comment le film est un éblouissement de travail collectif, Cocteau comme visionnaire, comme chef d'orchestre qui essaie de transmettre ses visions et comment ces collaborateurs amplifient le projet, le transforme, le performe. C'est une alliance collective pour arriver à nous faire croire à cette histoire.                
Pascale Ferran  

"La Belle et la Bête", de Jean Cocteau en 1946, le premier choc cinématographique de Pascale Ferran
"La Belle et la Bête", de Jean Cocteau en 1946, le premier choc cinématographique de Pascale Ferran
- SNC (Groupe M6) / Comité Cocteau / G.R. Aldo

Transmettre le cinéma 

Ce rôle de passeur, héritier des ciné-clubs, les créateurs de La Cinetek n’imaginaient sans doute pas alors combien il serait crucial aujourd’hui. Ses créateurs, ce sont 3 réalisateurs, Laurent Cantet, Cédric Klapish et… Pascale Ferran, notre invitée dans Plan Large. Une citoyenne engagée, et avant tout une cinéaste précieuse qui "mijote à feu doux", comme elle aime à dire, autrice de 4 longs métrages en 26 ans, qui sont autant de prototypes et à chaque fois des événements. Ils nous ont aidé, autour d’un château de sable, à trouver de Petits arrangements avec les morts, rappelé qu’il n’y a pas si longtemps, avoir 20 ans était encore L’âge des possibles, fait vibrer aux amours sensuels de Lady Chatterley et s’envoler avec ses Bird People. 

Le territoire cinématographique intérieur de Pascale Ferran

Pour cette nouvelle filmothèque idéale, Pascale Ferran se dessine en cinéphile, et nous dévoile une partie des films qui l'ont construite, du puissant La Belle et la Bête de Jean Cocteau au non égalé Scènes de la vie conjugale d'Ingmar Bergman, en passant par le film monde Mon Oncle d'Amérique, d'Alain Resnais, qui n'est pas sans rappeler Vice-Versa, le très inventif film d'animation de Pete Docter, jusqu'à Yi Yi d'Edward Yang et Blissfully Yours d'Apichatpong Weerasethakul, tous deux touchés par la grâce … Pascale Ferran nous donne à entendre un véritable plaidoyer pour aller voir les films en salles. 

Gérard Depardieu dans "Mon Oncle d'Amérique" d'Alain Resnais (1980)
Gérard Depardieu dans "Mon Oncle d'Amérique" d'Alain Resnais (1980)
- Disponible en DVD et Blu-Ray aux éditions Potemkine

Clint Eastwood, une montagne de cinéma 

En fin d'émission, la chronique de Mathieu Macheret à propos du coffret collector évènement, de l'intégral Clint Eastwood, pour la première fois en 63 DVD et Blu-Ray, rien que ça … L’œuvre complète d’Eastwood, comme réalisateur et comme acteur, deux carrières qui ont toujours communiqué l'une et l'autre et que la Warner propose, pour la première fois, en un immense coffret, pour la modique somme de 300 euros, soit moins de 5 euros par film, sans compter les suppléments. Intégrale donc, à ce jour, du doyen, avec Frederick Wiseman, des cinéastes américains, 90 ans, qui compte bien poursuivre encore sa carrière une bonne dizaine d’années et qui est d'ailleurs toujours en train de tourner son prochain film. Rare sont les figures à avoir traversé plus de 60 ans de cinéma hollywoodien, rare sont aussi ceux comme lui dont la silhouette suffit à résumer le cinéma tout entier, un des corps les plus emblématiques de l'histoire du cinéma. Pour Eastwood, "le véritable héroïsme ce n'est pas sa personnalité, mais la présence, savoir s'éclipser, retourner au néant du monde et se fondre dans l'image".  

Plan large
59 min

Extraits et musiques de films 

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