M comme Kenji Mizoguchi, le plus grand cinéaste du monde

La Rue de la honte, de Kenji Mizoguchi (1956)
La Rue de la honte, de Kenji Mizoguchi (1956)  - Capricci Films / Les Bookmakers
La Rue de la honte, de Kenji Mizoguchi (1956) - Capricci Films / Les Bookmakers
La Rue de la honte, de Kenji Mizoguchi (1956) - Capricci Films / Les Bookmakers
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Auteur de grands mélodrames féministes, maître incontesté du plan séquence, l’œuvre du cinéaste Kenji Mizoguchi oscille constamment entre épure et violence, entre rêve et réalité. Plan large sur un peintre du quotidien, qui a toujours placé les femmes au centre de ses histoires.

Avec
  • Gabriela Trujillo Spécialiste des avant-gardes latino-américaines et européennes, et travaille à l'action culturelle de la Cinémathèque française
  • Mathieu Macheret Critique de cinéma, journaliste au Monde et aux Cahiers du Cinéma

Plan Large, consacré aujourd’hui à un des plus grands cinéastes japonais, le plus grand des cinéastes tout court, pas seulement selon le critique Jean Douchet, mais aussi pour toute la jeune garde critique qui allait donner la Nouvelle Vague  qui le découvrit au début des années 1950, avant la mort du cinéaste en 1956, alors qu’il avait déjà plus de 80 films derrière lui (dont les trois quarts sont aujourd’hui disparus). Le cinéaste, aux films aussi violents dans leur contenu que doux dans leur mise en scène épurée, grand humaniste mais aussi despote de plateaux de cinéma, surnommé « la sangsue démoniaque » par ses collaborateurs, il savait utiliser magistralement le plan séquence. 

Il y a une forme de concentration dans chacun de ses plans séquences, qui permet de donner une tension aux scènes et surtout un souffle qui à la fois s’intègre dans un espace dessiné au millimètre et en même temps participe du mouvement des personnages et les accompagne sur le fil cinématographique. On a tendance à résumer Mizoguchi à cet art du plan séquence, il faut aussi montrer à quel point ça peut être très concret et ça part de problématiques qui sont dues simplement aux conditions de tournage. Mathieu Macheret

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L'âge d'or des années 1950

Alors que sortent en coffret DVD les versions restaurées de ses 8 ultimes chefs-d’œuvre, des Contes de la lune vague après la pluie en 1953, en passant par L'Intendant Sansho (Lion d'Argent à Venise en 1954) jusqu'à son dernier film La Rue de la honte, réalisés pendant cet âge d’or que furent pour lui les années 1950, ce qui rend Kenji Mizoguchi des plus actuels aujourd’hui, c’est la place centrale qu'il donne aux femmes, victimes sacrificielles de mélodrames foudroyants et d’un ordre social qui, dans le Japon féodal comme de l’après-guerre, les réduit à l’état d’esclave ou d’objet, dont la figure de la prostituée est chez lui l’expression ultime, et pour lesquelles il prend toujours parti. Pour évoquer ce grand féministe qui cherchait avant tout à saisir, comme un peintre, la beauté du quotidien, Gabriela Trujillo, de la Cinémathèque française, est notre invitée, au côté du critique de cinéma, Mathieu Macheret

Habituellement, on voit se déployer le génie de la composition de Mizoguchi. Ce qui est admirable dans "L’Intendant Sansho" par exemple, c’est ce qui est de l’ordre du conte et du merveilleux, avec des lucarnes de compassion qui font évoluer l’action et la propagation de l’espérance et c’est là où Mizoguchi atteint le sublime. Il utilise tous les moyens du cinéma pour faire avancer cette histoire dans le merveilleux. Gabriela Trujillo

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En fin d'émission, on reste au Japon, avec la chronique de Mathieu Macheret sur le coffret en 20 films (DVD et Blu-Ray), de Yasujirô Ozu allant de J’ai été diplomé, mais… en 1929 à son dernier film, Le Goût du saké, en 1962. Jusqu’à la fin des années 1980, on ne connaissait de son œuvre que 5 films. Un oubli réparé depuis, grâce notamment au travail acharné de la société Carlotta. De quoi nuancer quelque peu l’image figée d’un cinéaste qui filmerait éternellement, en plan fixe et en champ-contrechamp, à hauteur de tatami, des histoires qui chroniquent les transformations et mutations de la société japonaise par le prisme des relations, souvent cruelles, entre enfants et parents. On oublie par exemple qu’il y a beaucoup d’humour chez Ozu, lui qui a commencé sa carrière, dès 1927, sous forte influence des comiques burlesques américains. 

Bonjour, de Yasujirô Ozu (1959)
Bonjour, de Yasujirô Ozu (1959)
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Les recommandations de Plan Large

Une rétrospective Kenji Mizoguchi est à voir à la Cinémathèque de Nice, jusqu'au 1er février. 

La rétrospective James Ivory est à voir à la Cinémathèque française à Paris, jusqu'au 15 février, et un cycle Jim Jarmusch est à voir au Cinématographe de Nantes jusqu'au 25 février. 

Les Journées du Film sur l'Art, avec une carte blanche à la cinéaste Claire Denis, se tiennent à l'Auditorium du Louvre du 17 au 26 janvier. 

L'exposition Claudine Nougaret : dégager l'écoute est à voir à la Bibliothèque Nationale de France à Paris, jusqu'au 15 mars, avec de nombreuses séances spéciales. 

Les Nuits de France Culture
1h 24

Les extraits de films

  • Les Contes des chrysanthèmes tardifs, de Kenji Mizoguchi (1939)
  • La Vie d’O’Haru femme galante, de Kenji Mizoguchi (1952)
  • Les Contes de la lune vague après la pluie, de Kenji Mizoguchi (1953)
  • L'Intendant Sansho, de Kenji Mizoguchi (1954)
  • L’impératrice Yang Kwei-Fei, de Kenji Mizoguchi (1955)
  • La Rue de la honte, de Kenji Mizoguchi (1956)
  • Crépuscule à Tokyo, de Yasujirô Ozu (1957)
  • Bonjour, de Yasujirô Ozu (1959)
Les Nuits de France Culture
8 min
Plan large
59 min

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