W comme Billy Wilder, le joyeux pessimiste

Audrey Hepburn, dans le film Ariane, de Billy Wilder (1956)
Audrey Hepburn, dans le film Ariane, de Billy Wilder (1956) - Théâtre du Temple
Audrey Hepburn, dans le film Ariane, de Billy Wilder (1956) - Théâtre du Temple
Audrey Hepburn, dans le film Ariane, de Billy Wilder (1956) - Théâtre du Temple
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Plan Large sur le cinéaste Billy Wilder, considéré aujourd’hui comme un grand maître du film noir et de la comédie hollywoodienne, avec des œuvres parmi les plus importantes de l’histoire du cinéma, comme Boulevard du crépuscule ou Certains l'aiment chaud, avec Julie Michot et Mathieu Macheret.

Avec
  • Julie Michot Maîtresse de conférences en anglais à l’Université du Littoral, Côte d’Opale
  • Mathieu Macheret Critique de cinéma, journaliste au Monde et aux Cahiers du Cinéma

Un « boulevardier crépusculaire », qui a fini par se spécialiser « vers les gros vaudevilles », pour Georges Sadoul, le grand historien du cinéma. Le goût de Billy Wilder ? « Reconnaissons qu’il est franchement mauvais, […] pimenté d’une tendance personnelle à affectionner les situations scabreuses et les spectacles répugnants », le tout baignant dans une « laideur » qui « se retrouve à tous les échelons de la mise en scène », déplorait Jean Douchet en 1960 dans Les Cahiers du Cinéma. Alors que la Cinémathèque française lui consacre une rétrospective jusqu'au 8 février à Paris, Billy Wilder, on l’oublie aujourd’hui, fut longtemps l’objet, en dépit de son succès, et sans doute aussi à cause de lui, de procès récurrents en vulgarité et en misanthropie. Vulgarité, parce qu’il n’a pas hésité à filmer, avec brio, situations scabreuses et turpitudes lamentables ; misanthropie, parce que tous ses films, ou presque, ont exprimé, en tragique comme en burlesque, une vision pessimiste et désenchantée de la nature humaine en général, et de la société américaine en particulier. 

La comédie chez Billy Wilder n'est jamais univoque, il y a toujours un fond de tragédie sociale et de scepticisme. Il bascule facilement de l'un à l'autre. La mobilité de la mise en scène permet de jongler avec les émotions. Mathieu Macheret

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Mais là où certains ont dénoncé en leur temps l’œuvre d’un sous-Lubitsch cynique ricanant, c’est de nos jours le moraliste, certes ironique, qui s’est imposé. « Billy Wilder était comme un maître d’œuvre qui connaît ses outils et les utilise au mieux pour forger la structure à laquelle il suspend les guirlandes de son humour et de sa sagesse », écrivait Marlene Dietrich dans ses mémoires. Pour étudier ses outils et dérouler ses guirlandes, Plan Large reçoit Julie Michot, qui a abordé avec précision l’œuvre du cinéaste sous l’angle de la musique diégétique, celle qu’entendent les personnages, dans un livre : Billy Wilder et la musique d’écran : filmer l’invisible, en compagnie de Mathieu Macheret, auteur, personne n’est parfait, du texte de présentation de la rétrospective Billy Wilder à la Cinémathèque française à Paris. 

Le détournement des motifs est constamment présent chez Wilder, sous plusieurs formes. Julie Michot 

En fin d’émission, la chronique de Mathieu Macheret sur la ressortie d'une pépite du film noir : Menaces dans la nuit, de John Berry, en salles le 16 janvier. He Ran All the Way en version originale, sorti en 1951, la même année que Le Gouffre aux chimères de Billy Wilder, « est un film sur le malheur. Ce n’est pas un hasard. Je voulais tourner l’histoire ainsi », dira des années plus tard son réalisateur, John Berry. Malheur pour l’acteur John Garfield, dont ce sera le dernier film avant sa mort d’une crise cardiaque à 39 ans, un an après avoir refusé de donner des nommas à la Commission des activités anti-américaines. Et malheur, en ces temps de chasse aux sorcières maccarthyste, pour une bonne partie de l’équipe : le scénariste, Dalton Trumbo, un des Dix d’Hollywood, est alors en prison. Son prête nom, Guy Endore, sera lui aussi blacklisté, comme les producteurs, deux autres comédiens, et bien sûr John Berry lui-même, qui, dénoncé comme communiste par Edward Dmytryk, refusera à son tour de témoigner et s’enfuira en France, où il poursuivra sa carrière. Menaces dans la nuit n’est donc pas seulement une pépite du film noir, c’était aussi un acte de résistance.

Menaces dans la nuit, de John Berry (1951)
Menaces dans la nuit, de John Berry (1951)
- Swashbuckler (2019)

Les recommandations de Plan Large 

Autour de Billy Wilder: Billy Wilder et la musique d’écran : filmer l’invisible, de Julie Michot est édité par Épure et à paraître : Billy Wilder, cinéma, politique et le poids de l’histoire, d’Emmanuel Burdeau en mai 2019 chez Lux éditions. Projection de La Grande combine, de Billy Wilder, suivie d'une discussion avec Mathieu Macheret le vendredi 8 février à 19h30 à la Cinémathèque française à Paris.

Universal, un studio de légende à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé du 9 au 29 janvier 

Festival Viva Patrimoine au Lux de Valence dans la Drôme du 23 au 29 janvier

La prochaine séance au Majestic Bastille en partenariat avec France Culture a lieu le 22 janvier avec la  projection Les Estivants, de Valeria Bruni-Tedeschi suivie d'une rencontre animée par Antoine Guillot. 

Le cycle Sport et cinéma au Cinématographe à Nantes se déroule du 19 janvier au 19 février, avec notamment Julien Faraut. 

En savoir plus : Filmer le sport
Plan large
1h 00

Extraits de films

  • Assurance sur la mort, de Billy Wilder (1944)
  • La Scandaleuse de Berlin, de Billy Wilder (1948)
  • Boulevard du Crépuscule (Sunset Boulevard), Billy Wilder (1950)
  • Ariane, de Billy Wilder (1957)
  • Certains l'aiment chaud, de Billy Wilder (1959)
  • Avanti !, de Billy Wilder (1972)
  • I wanna be loved by you, chanté par Marilyn Monroe dans Certains l'aiment chaud, de Billy Wilder (1959)
  • Trois extraits de Menaces dans la nuit, de John Berry (1951)

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