

Les mobilisations contre le racisme en France font apparaître des clivages entre plusieurs visions du militantisme. Un certain antiracisme universaliste hérité des luttes des années 80 est remis en cause par une logique plus identitaire et politique. Mais les choses sont-elles si simples ?
Emmanuel Debono (Historien, auteur du blog 'Au coeur de l'antiracisme' sur le site web du Monde, rédacteur en chef du DDV (Le Droit de Vivre), le journal historique de la LICRA).
Qui aurait imaginé que le premier mouvement de masse post-confinement serait provoqué par l'épilogue tragique d’une interpellation policière aux Etats-Unis ?
La mort de George Floyd a entraîné une inattendue vague de contestations à travers le monde, pour dénoncer les méthodes violentes et racistes de tout ou partie de la police.
En France, le Comité Vérité pour Adama, constitué après la mort d'Adama Traoré en 2016, suite à une interpellation policière, a montré une forte capacité de mobilisation : 20000 personnes réunies le 2 juin devant le tribunal de grande instance de Paris.
Une semaine plus tard, ils sont moins nombreux place de la République, toujours à Paris, cette fois à l'appel de SOS Racisme, ce différentiel de mobilisation laissant entrevoir une rivalité et une fracture générationnelle au sein du mouvement antiraciste.
Il est vrai que deux logiques s'y affrontent : la première (la plus ancienne) met en avant l'universalisme du combat quand la deuxième joue sur une approche plus identitaire.
Ce n'est d’ailleurs sans doute pas un hasard si cette dernière logique s'est trouvée validée par l'actualité américaine, tant la dimension communautariste est forte aux Etats-Unis.
Au positionnement moral du combat antiraciste des années 80 se serait donc ajoutée une approche plus politique, visant à dénoncer un racisme institutionnalisé.
Mais cette approche, séduisante, n’est-elle pas réductrice ?
A lire :
L'antiracisme en France, de l'idéal "universaliste" aux luttes "catégorielles", interview d'Emmanuel Debono dans Le Monde
De nouvelles racines pour l'antiracisme, article de Christian Losson, Stéphanie Harounyan, Julien Gester et Charles Delouche publié dans Libération
Le Comité Adama bouscule l'antiracisme français, article de Louis Chahuneau publié sur Slate
Bidonville de Champigny : "Nous nous opposons à l'instrumentalisation de notre histoire et de nos mémoires", tribune d'un collectif, publiée dans Le Monde
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