

Entretien avec le cinéaste Jacques Rozier, mené par Michel Ciment et enregistré au Festival d'Alès. Le réalisateur raconte sa carrière, ses études à l'IDHEC, ses rapports avec la Nouvelle Vague et ses conditions de création, de tournage et de production.
- Jacques Rozier cinéaste
Au cours de cet entretien avec Michel Ciment, Jacques Rozier s'explique sur ses motivations qui l'ont amené à faire du cinéma, "en dehors de la fascination des appareils, en même temps il y avait sans doute l'idée que c'était une façon de vivre où on pouvait s'échapper de la contrainte quotidienne", estime-t-il, même si son désir obstiné d'indépendance l'oblige en réalité à faire face à beaucoup d'obligations.
Le réalisateur revient sur son film "Adieu Philippine" qui traite des dernières vacances d'un appelé qui va partir pour faire la guerre en Algérie. Rozier précise les conditions dans lesquelles ce film a été tourné : "J'ai tourné le film dans un moment où la censure concernant la guerre d'Algérie était très présente, même le mot Algérie ne pouvait pas être prononcé, donc je procédais par allusion."
Jacques Rozier, diplômé de l'IDHEC en 1947, a commencé par travailler à la télévision en tant qu'assistant, " comme tout cette génération qui était à l'IDHEC à ce moment-là ", précise-t-il. " Même si on sortait de l'IDHEC, on ne pouvait pas prétendre faire un film tout de suite comme metteur en scène. Donc moi, je me suis dit que je n'allais pas attendre qu'on m’intronise comme metteur en scène, je vais me donner le pouvoir ! [...] J'ai acheté de la pellicule et je suis parti dans un village du Midi pour tourner mon premier court-métrage qui était Rentrée des classes. Ça a été un film sauvage... ", raconte-t-il quarante ans après.
Fréquentant Jean-Luc Godard, à l'époque de "A bout de souffle", Jacques Rozier évoque la Nouvelle Vague, les méthodes de tournage avec la caméra dans la rue, le mélange d'acteurs professionnels et amateurs. " A ce moment-là, ça correspondait à une démarche extrêmement audacieuse, révolutionnaire même, c'est-à-dire d'oser sortir du studio, d'oser tourner d'autres façons, avec l'idée que le son n'était pas direct pas post-synchronisé ", explique le cinéaste. Pour "Adieu Philippine", il précise les choses, le film n'était pas du tout improvisé par exemple mais il a cherché à " privilégier la liberté de langage des interprètes ", pour lui, "l a direction d'acteurs n'existe pas, on peut conditionner, mettre l'interprète en état ".
Faisant allusion aux difficultés rencontrées pour sortir ses films et aller au bout de ses projets, Jacques Rozier s'amuse à comparer la fabrication d'un film à un " iceberg " en précisant que " la partie visible, c'est le film " : "J'ai beaucoup évolué, j'en suis presque à adorer ce que j'ai brûlé maintenant. Ce que j'ai envie de faire c'est une histoire comique assez forte qui tienne bien le spectateur. On a expliqué à un certain moment que la Nouvelle Vague c'était la découverte des temps faibles, et c'est vrai qu'il y a eu ça, mais maintenant ça m'ennuie complètement : j'aime qu'il se passe quelque chose."
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