

Une récente étude a analysé le placenta de femmes atteintes du coronavirus lors de leur grossesse. Des lésions pathologiques ont été analysées sur plusieurs d'entre ces placentas, sans que le nouveau-né ne soit contaminé.
- Nicolas Martin Auteur, scénariste et réalisateur. Auteur de "Alien, la xénographie !"
C’est une question qui nous a souvent été adressée et pour cause, les précédentes infections respiratoires étaient assez préoccupantes. Si on remonte jusqu’à la grippe espagnole de 1918, le taux de mortalité général était de 2,6%, et de 37% chez les femmes enceintes. Plus près de nous, durant l’épidémie de grippe H1N1, les risques de complications étaient 4 fois supérieures pour elles que dans la population générale.
Il faut dire que l’inquiétude peut être légitime, étant entendu que les femmes enceintes sont dans un état « immunosuppresseur », leur immunité est modulée par la grossesse, or l’on sait aujourd’hui que la Covid, dans sa deuxième phase, entraîne précisément un dérèglement du système immunitaire qui conduit aux formes aiguës.
Alors levons tout de suite le doute : ce n’est pas le cas pour la Covid. Il y a un faisceau de preuves et d’études qui conduit à la conclusion suivante : les femmes enceintes ne font pas de formes plus sévères du fait de leur grossesse, et il n’y a des chances qu’extrêmement minimes de transmission au nouveau-né qui, dans les très rares cas observés, ont une évolution très favorable et guérissent en quelques jours après leur naissance.
Ces conclusions s’appuient sur plusieurs études. Je ne vais pas toutes vous les citer. Mais pour s’appuyer sur la plus récente, une pré-publication d’une équipe de l’université d’Oxford, sur 427 femmes enceintes positives Covid admises dans les hôpitaux, et face à un groupe contrôle de 694 femmes, le taux de mortalité est très bas, seules 3 femmes sont décédées, 9 ont dû passer en soins intensifs. Seuls 12 nourrissons ont été testé positifs ARN au SARS-CoV2 dont 6 d’entre eux dès leurs 12 premières heures. Si présence virale il y avait, les bébés étaient au demeurant tous en bonne santé.
Conclusions : pas de surmortalité chez les femmes enceintes, pas de complications supplémentaires liées à la maladie, et une transmission rare aux nourrissons.
Pour ce qui concerne cette transmission, on peut préciser qu’il y a de fortes chances qu’elle se fasse post-accouchement, étant donné qu’on ne trouve pas de virus dans les voies génitales, et que toutes les analyses effectuées sur le lait maternel se sont avérées – dans une autre étude, négatives pour le CoV2.
Mais il y a pourtant une étude toute récente qui n’a pas tout à fait les mêmes conclusions. Il s'agit de l’étude parue le 22 mai dernier dans l’American Journal of Clinical Pathology qui a étudié les pathologies placentaires liées à la Covid.
Il s’agit d’une étude menée sur 16 femmes, toutes positives Covid, qui ont accouché à l’hôpital universitaire Northwestern de Chicago entre le 18 mars et le 5 mai.
L’une d’entre elle a fait une fausse-couche - sans lien avec la maladie - à 16 semaines, et a donc été exclue de l’étude. Les 15 placentas de femmes arrivées à terme ont été analysés. Il en ressort que comparativement aux témoins, ces placentas étaient plus susceptibles de montrer une caractéristique de ce qu’on appelle une « malperfusion vasculaire maternelle », à savoir des lésions qui touchent les vaisseaux sanguins, et qui peuvent avoir pour conséquence de limiter la croissance du fœtus, voire de provoquer des naissances prématurées ou dans des cas plus rares, la mort à la naissance du nourrisson – ce qui ne s’est produit dans aucun des cas étudiés.
La conclusion est qu’en l’attente d’autres études avec un plus grand nombre de grossesses, une surveillance prénatale accrue pour les femmes diagnostiquées Covid peut être justifiée.
Mais comme nous l’a confirmé Olivia Anselem, gynécologue obstétricienne à la maternité Port-Royal à Paris ce type de lésion histologique au niveau du placenta est courant, n’est pas forcément pathologique, et donc pas nécessairement lié au coronavirus.
Ce qui prime, selon elle, et qu’il faut retenir, c’est la force du nombre : on a aujourd’hui suffisamment de cas d’accouchements sans complications, de naissances sans transmission intra-utérine pour conclure que les femmes enceintes sans comorbidités ne sont pas plus à risque, et que la transmission fœtale, si elle advient, le plus souvent post partum, n’entraîne pas de cas grave chez les nouveau-nés. Une étude française, portant sur 600 cas, devrait être publiée très prochainement et va a priori dans le même sens.
Très pragmatiquement, dans l’état actuel des choses, si une mère positive Covid accouche, la seule précaution à prendre est le port d’un masque au moment de l’accouchement et c’est tout !
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