Quelles séquelles pour les malades du Covid ?

Un papier récent publié dans la revue Science, avait pour titre « Pour les survivants d'un COVID-19 sévère, vaincre le virus n'est que le début ».
Un papier récent publié dans la revue Science, avait pour titre « Pour les survivants d'un COVID-19 sévère, vaincre le virus n'est que le début ». ©Getty - Daniel Balakov
Un papier récent publié dans la revue Science, avait pour titre « Pour les survivants d'un COVID-19 sévère, vaincre le virus n'est que le début ». ©Getty - Daniel Balakov
Un papier récent publié dans la revue Science, avait pour titre « Pour les survivants d'un COVID-19 sévère, vaincre le virus n'est que le début ». ©Getty - Daniel Balakov
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Chaque jour, Nicolas Martin, producteur de La Méthode scientifique, fait un point sur l'avancée de la recherche sur le coronavirus. Il revient aujourd'hui sur les séquelles dont pourraient souffrir les personnes atteintes par le Covid.

Avec
  • Nicolas Martin Auteur, scénariste et réalisateur. Auteur de "Alien, la xénographie !"

Un papier récent publié dans la revue Science, avait pour titre « Pour les survivants d'un COVID-19 sévère, vaincre le virus n'est que le début ». Et de nombreuses inquiétudes s'expriment, pas uniquement chez les patients hospitalisés, quant à ces séquelles qui pourraient aller de complications pulmonaires sévères, avec fibrose notamment, à des états de fatigue généralisée persistants.

Que peut-on en dire à l'heure actuelle ? Tout d'abord, que très logiquement, nous manquons de recul pour avoir une compréhension précise de ces éventuelles séquelles, étant donné que le virus n'a que quelques mois. Il faut donc se baser sur les rares études parcellaires disponibles, et inférer en fonction de ce que l'on connaît des séquelles des autres maladies respiratoires sévères.

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Pour commencer, tout cas grave de pneumonie, associé à une ou plusieurs comorbidités ou maladies chroniques sous-jacentes et couplée à une inflammation prolongée augmente les risques de maladies futures. Un épidémiologiste américain explique, dans ce papier de Science, que les personnes hospitalisées pour pneumonie ont un risque de maladie cardiaque environ quatre fois plus élevé que celui des témoins du même âge dans l'année suivant leur sortie, et 1,5 fois plus élevé dans les 9 années qui suivent.

On sait également que les survivants du SRAS de 2003 ont pu avoir des séquelles pulmonaires persistantes jusqu'à 15 ans d'évolution, ainsi que des séquelles musculo-squelettiques et un stress post traumatique, avec dépression et fatigue chronique jusqu'à 4 ans d'évolution.

L'une des séquelles principales à craindre est la fibrose pulmonaire. Il s'agit d'une altération du tissu qui enveloppe les alvéoles qui sont la zone d'échange gazeux, par laquelle l'oxygène entre dans les vaisseaux sanguins et donc lorsque ce tissu se rigidifie, il provoque une rétractation de ces alvéoles et donc un manque d'oxygène, une diminution de la capacité respiratoire. Dans les cas les plus graves, cela peut aboutir à un SDRA, un Syndrome de Détresse Respiratoire Aigu, dans lequel les alvéoles se remplissent de liquide, et qui peut conduire in fine à des cicatrices qui peuvent causer des problèmes respiratoires à long terme - affection dont la plupart des patients finit néanmoins par récupérer.

Cette inquiétude vient d'une étude publiée très tôt, dès le mois de février, dans la revue médicale The Lancet, montrant que sur un groupe de patient de la ville de Wuhan, quasiment un sur trois avait développé un SDRA. Néanmoins, ces SDRA sont très fortement dépendant de l'état des poumons des patients concernés, la cohorte était en l'occurrence très faible, de seulement 41 patients, et des études postérieures ont montré que ce taux de complications était très nettement réduit.

Ce tableau paraît assez préoccupant. Il est surtout très théorique pour le moment. Et auquel il faut ajouter un élément important : les importants traumatismes créés par la réanimation. Si l'on parle de séquelles, il s'agit bien sûr de séquelles pour les patients les plus gravement atteints, dont on sait que dans l'écrasante majorité, ce sont aussi les patients avec la santé la plus fragile ou les plus avancés en âge.

Si vous ajoutez à ce tableau le fait que les séjours en réanimation sont très « invasifs », avec bien entendu les respirateurs artificiels, avec des sondes d'intubation posées pendant de nombreux jours, les cathéters, les sédatifs comme le dit Martin Dres, qui est médecin réanimateur au service de pneumologie de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière que nous avons contacté, « la réanimation, ce n'est pas une guerre propre ». Les patients qui en sortent sont donc durablement fragilisés par ce séjour. 

Selon lui, parler trop vite de fibrose n'est pas judicieux : il vaut mieux parler dans l'état actuel de nos connaissances d'anomalies de types restrictifs avec amputation du champ pulmonaire. C'est-à-dire un essoufflement persistant au repos, à l'effort, des difficultés à respirer la nuit, ou encore une toux très handicapante qui sont autant de témoignages de l’agression subie par l'appareil respiratoire. 

Se pose enfin la question que j'ai déjà abordée, qui est celle des conséquences psychiatriques, et notamment du développement d'un stress post traumatique pour les personnes les plus gravement atteintes.

Pour conclure, ce qu'il faut retenir, et les deux médecins que nous avons interrogés ont bien insisté là-dessus : c'est que ces séquelles ne concernent pour la plupart que les patients qui ont développé les formes les plus aiguës, et dont on sait qu'ils sont pour l'écrasante majorité dans des états de fragilité physique déjà avancés. Donc non, tout le monde ne va pas faire un AVC, ou un SDRA, ou un stress post-traumatique. Dans les cas d'une forme légère à modérée, tout au plus une asthénie, c'est à dire un syndrome de fatigue généralisée qui peut se maintenir, a priori, quelques semaines après la fin des symptômes.

Ce qui est sûr en revanche, c'est qu'il est important dès aujourd'hui d'assurer un suivi épidémiologique sur le temps long des patients infectés et guéris, et notamment chez les sujets les plus âgés, pour ne pas découvrir, trop tard, une surmortalité différée ou associée à d'autres maladies.

Nicolas Martin et l'équipe de La Méthode scientifique