Y a-t-il ou non transmission du Covid par aérosols ?

Le virus aéroporté pourrait-il s’infiltrer dans les conduits de ventilation et infecter les gens dans les bureaux, les supermarchés ou les moyens de transport ?
Le virus aéroporté pourrait-il s’infiltrer dans les conduits de ventilation et infecter les gens dans les bureaux, les supermarchés ou les moyens de transport ? ©Getty - Bettmann
Le virus aéroporté pourrait-il s’infiltrer dans les conduits de ventilation et infecter les gens dans les bureaux, les supermarchés ou les moyens de transport ? ©Getty - Bettmann
Le virus aéroporté pourrait-il s’infiltrer dans les conduits de ventilation et infecter les gens dans les bureaux, les supermarchés ou les moyens de transport ? ©Getty - Bettmann
Publicité

Nicolas Martin revient aujourd'hui sur la crainte de la transmission du Covid par aérosols et donc par les systèmes de ventilation

Avec
  • Nicolas Martin Auteur, scénariste, réalisateur, producteur, vulgarisateur, et ancien animateur de la Méthode Scientifique.

C’est une crainte qui circule à bas bruit depuis le début de l’épidémie et qui ressort très régulièrement, le SARS-CoV2 est-il aéroporté ? C’est-à-dire peut-il se transmettre ou non pas via les gouttelettes dont on parle tout le temps qui sont, en gros, des postillons, assez gros, mais via des particules plus petites, inférieures à 5 microns ? Des aérosols donc et qui du coup, resteraient plus longtemps en suspension dans l’air, pourraient s’infiltrer dans les conduits de ventilation et infecter les gens dans les bureaux, les supermarchés ou les moyens de transport.

Eh bien une nouvelle étude vient de sortir à ce propos, et vient confirmer ce qui faisait à peu près consensus parmi les chercheurs. Si l’on retrouve bien de l’ADN viral dans l’air, en suspension dans des espaces collectifs, c’est vraisemblablement en bien trop petites quantités pour pouvoir être contaminant, sauf cas particulier de locaux très exigus, non ventilés, ou de grandes concentrations de personnes infectées.

Publicité

Voici ce que dit l’étude : il s’agit de travaux qui ont estimé la concentration d’ARN du SARS-CoV2 dans l’air sur 30 sites – c’est-à-dire sur 30 prélèvement distincts, dans deux hôpitaux chinois de Wuhan, l’épicentre de l’épidémie. Les lieux qui ont été testés sont des endroits fréquentés par les patients – notamment les unités de soins intensifs, de cardiologie ou des toilettes mobiles, des lieux exclusivement réservés au personnel médical, et enfin, des emplacements ouverts au public.

Il faut préciser que les scientifiques cherchent de l’ARN viral – et qui dit ARN ne dit toujours pas virus actif, et encore moins contaminant.

Et voici ce que constatent les auteurs : globalement, les concentrations sont très faibles, voire indétectables. Comme on pouvait s’y attendre, certaines des concentrations les plus élevées sont retrouvées dans les endroits occupés par les patients infectés et notamment les toilettes, qui sont un endroit très exigu, d’1 mètre carré, sans ventilation où l’on retrouve 19 copies d’ARN par mètre cube.

Dans les zones réservées aux équipes soignantes, les concentrations sont comprises entre 16 et 42 copies d’ARN viral par mètre cube mais il s’agit souvent de particules plus grosses, et les chercheurs infèrent qu’il s’agit en fait de gouttelettes qui sont remises en suspension lorsque le personnel soignant retire son matériel de protection, blouses, charlottes, masques etc.

Enfin, dans les lieux publics, les prélèvements montrent une concentration indétectable, ou inférieure à 3 copies par mètre cube à l’exception d’un site d’attroupement à un mètre de l’entrée d’un grand magasin où circulaient des patients en ambulatoire, c’est-à-dire infectés mais maintenus à domicile.

Conclusion des auteurs : ces résultats indiquent un faible risque par voie aéroportée dans les zones bien ventilées ou les lieux ouverts au public.

Radiographies du coronavirus, la chronique
5 min

Néanmoins, elle n’écarte pas entièrement l’hypothèse d’une transmission par aérosols.

En effet, mais pour les personnels soignants qui sont confrontés à de très importantes concentrations virales, notamment au moment de pratiquer des gestes médicaux comme l’intubation, l’extubation qui produisent de très grandes quantités d'aérosols. 

D’autres études aboutissent de facto au même type de conclusion. Une étude chinoise encore, sur un tout petit échantillon à l’intérieur de la chambre d’hôpital de patients mis à l’isolation, qui trouvent des concentrations de l’ordre de 2000 à 4000 copies par mètre cube, tout particulièrement la première semaine de contamination. L'étude conclut néanmoins que de toute évidence, l’aérosolisation n’est pas la voie principale de transmission de la maladie.

Même conclusion encore pour les épidémiologistes qui se sont penchés sur le bateau Diamond Princess, dont je vous ai déjà parlé, et dans lequel les patients isolés plusieurs semaines en vase clos ont été examinés sous toutes les coutures : les auteurs concluent que « le système d’air conditionné centralisé du bateau n’a pas joué de rôle » dans la diffusion du virus, et que « la route aéroportée à longue distance est absente dans le modèle de contamination ».

Pour autant, comme toujours, il ne faut pas exclure tout risque lié aux réseaux de climatisation et de ventilation mais principalement dans les endroits où le virus est extrêmement concentré, du fait de la présence de nombreux malades. Je vous parlais du nombre de copies d’ARN virale trouvées dans la première étude, qui évolue entre une vingtaine et une centaine tout au plus. Imaginez que le nombre de copies par millilitre dans le nez est de 10 à 100 millions de copies d’ARN viral. 

Donc une fois de plus : gestes barrière, distance physique pour éviter de recevoir des postillons, pas de contact des mains aux muqueuses du visage tant qu’on ne se les est pas lavées et un masque, bien entendu, dans tous les endroits peuplés d’un peu de monde pour vous protéger bien sûr, mais surtout pour protéger les autres.

L'équipe