Antoine de Saint-Exupéry est mort le 31 juillet 1944, en héros. Cela fait-il de lui un grand écrivain ? A cette question, Alain Finkielkraut et ses invités, Sylvain Fort, et Vincent Tremolet de Villers, tentent de répondre et de voir au-delà de la candeur du "Petit Prince".
- Sylvain Fort Conseiller en communication, germaniste, traducteur, essayiste
- Vincent Trémolet de Villers Journaliste, directeur adjoint de la rédaction du Figaro.
Alain Finkielkraut revient sur l'œuvre de l'écrivain, en compagnie de ses invités, Sylvain Fort, auteur de Saint-Exupéry Paraclet, et Vincent Trémolet de Villers, journaliste au Figaro.
" Antoine de Saint-Exupéry est mort en héros. Mais cela fait-il de lui un grand écrivain ? A cette question, j'ai longtemps été tenté de répondre par la négative. La joliesse du Petit Prince, la propension à mettre une majuscule au mot homme, et des maximes telles que "aimer ce n'est pas nous regarder l'un l'autre mais regarder ensemble dans la même direction*"* m'ont souvent détourné de le lire. J'avais besoin de formules moins creuses, de phrases plus coriaces, de nourritures plus consistantes et puis, j'ai lu le petit livre de Sylvain Fort, Saint-Exupéry Paraclet. J'ai compris à ses citations, à ses commentaires et à sa ferveur même, que Saint-Exupéry n'est pas un auteur gnan-gnan. J'entrevoyais alors de la profondeur à ce que j'avais pris pour de la mièvrerie ." Alain Finkielkraut
Sylvain Fort
Lorsque la tendresse que vous éprouvez pour le monde est déçue, lorsque la tendresse que vous éprouvez pour les hommes, pour l'humanité est contrariée par la façon dont les hommes et l'humanité se conduisent, alors vous pouvez être porté au renoncement ou à l'indignation. Saint-Exupéry a choisi l'indignation, il a choisi le combat et ce combat, contrairement peut-être à sa légende, n'était pas d'abord le combat aérien mais le combat de la plume.
La littérature de Saint-Exupéry, son œuvre si diverse, est probablement, d'un certain point de vue, inclassable et je dirais même mal classée. La littérature de Saint-Exupéry est une littérature de combat. C'est une littérature qui a non seulement une foi en l'homme mais qui a d'abord une foi dans le langage, dans la parole.
Vincent Tremolet de Villers
Il y a quand même chez lui, une nostalgie - quand il dit qu'en entendant un chant paysan du 15e siècle, on voit tout ce que l'on a perdu" ou encore, "il faudrait faire tomber sur le monde comme un chant grégorien", on peut imaginer cette nostalgie sur d'autres périodes, une déshérence. Mais cette déshérence, 'il ne l'attribue pas à la technique ou à l'outil. De l'avion, par exemple, il emploie ce terme : "c'est un outil". Un outil, ça s'apprivoise, ça se domine et ça se possède.
"La civilisation, ce certain arrangement des choses" (Saint-Exupéry)
Le problème, me semble-t-il pour Saint-Exupéry, c'est le dérèglement des choses. Il a donné la plus grande et la plus belle définition pour moi de la civilisation, il appelle cela "un certain arrangement des choses", et donc, la civilisation n'est pas seulement composée de choses mais des liens invisibles qui les relient. Et ce qui l'inquiète, ce qui l'angoisse, ce qui nourrit sa colère, c'est qu'il voit ces liens se distendre un à un. La machine y participe, mais dans son projet final qui est une Citadelle, il pense pouvoir que l'homme est encore capable de la dominer. (Vincent Tremolet de Villers)
Une rediffusion de l'émission du 16 septembre 2017.
L'intégralité de l'émission Répliques est à écouter en cliquant sur la page.
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