

Selon Marcel Gauchet, la promesse de rupture faite par Emmanuel Macron en 2017 se serait évaporée. Ce quinquennat a-t-il manqué d'ambition ? Quels sont les grands accomplissements pour combattre le "malheur français" à mettre au crédit du chef de l’État ?
- Jean-Louis Bourlanges Député Modem des Hauts de Seine, président de la commission des affaires étrangères et ancien député européen, essayiste
- Marcel Gauchet philosophe et historien, directeur d'études à l'EHESS
Alain Finkielkraut dresse le bilan du quinquennat Macron en compagnie du député MoDem des Hauts-de-Seine, président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Bourlanges et du philosophe et historien, Marcel Gauchet , auteur notamment de deux ouvrages essentiels pour comprendre la situation politique contemporaine de la France : La Droite et la Gauche, histoire et destin (Gallimard "Le Débat", 2021) et Macron et les leçons d’un échec (Stock, 2021).
Selon Marcel Gauchet, Emmanuel Macron a été élu président de la République dans des conditions politiques exceptionnelles. À la tête d'un mouvement inédit "de droite et de gauche", pendant la campagne, il donna l'impression de comprendre le "malheur français" ambiant. L'espérance de changement dégagée par son élection en 2017 s'est finalement étiolée au cours du quinquennat, jusqu'à aboutir à une déception. Désormais "garant de la continuité", le chef de l’État peine à convaincre que ses réformes ont combattu effectivement le sentiment d'un déclin inexorable de la France : "Il laisse le pays au même point. Sans plus de perspectives de redressement d’un destin, perçu majoritairement comme une dégradation multiforme, et avec un système politique plus bloqué que jamais entre une force protestataire, sans capacité gouvernementale, et des gouvernements sans légitimité d’adhésion". Marcel Gauchet, dans le tome II de Comprendre le malheur français.
"Le 7 mai 2017, un homme brièvement ministre mais sans expérience parlementaire devenait président de la République française. Cette élection météorite, au nez et à la barbe des partis traditionnels, cette mise au rencard de la droite et de la gauche avait quelque chose de stupéfiant même si Emmanuel Macron avait bénéficié de circonstances favorables à l'instar du coup d’État judiciaire qui avait mis le favori, François Fillon, hors-course. Avant que tous les candidats n’entrent en scène pour l’élection de 2022, nous allons tenter de faire le bilan du mandat tumultueux qui s’achève. "(Alain Finkielkraut)
Marcel Gauchet
J’ai regardé l’ascension d’Emmanuel Macron comme un événement plutôt positif puisqu’il faisait un juste constat sur l’impasse où nous menait inexorablement un système d’alternance afonctionnel. Je suis déçu car, force est de constater, que nous en sommes au même stade au terme de ce quinquennat : l’état moral de la France va mal. Pour les uns, c’est un signe de folie car les Français n’apprécient pas la réalité de leur destin assez positif et, pour les autres, ce malheur doit être pris au sérieux. Aujourd’hui, nous n’avons pas davantage de perspectives de ce marasme.
Jean-Louis Bourlanges
Il faut cesser de vouloir réenchanter la politique : la politique ne vise pas de donner un sens à la vie mais de permettre au gens de donner un sens à leur vie. Suivant les réflexions d’ Alexis de Tocqueville, on note que, depuis la Révolution française, les Français ont investi religieusement la chose politique. L’invocation révolutionnaire de Macron pendant la campagne – ouvrage programmatique Révolution – a d’ailleurs peut-être flatté cette tendance.
"Les Français sont en état de sécession avec leur offre politique pour une série de bouleversements sociétaux et géopolitiques"
Macron représente la fidélité aux choix fondamentaux "aroniens" dans la défense de l’État de droit, de l’État providence et des États européens pour faire face aux menaces contre nos valeurs.
Marcel Gauchet
Emmanuel Macron a eu un écho particulier sur la promesse d’une refondation de l’Europe : remédier aux dysfonctionnements des institutions de l’UE, le rôle hégémonique acquise par l’Allemagne dans ce cadre, les attributions discutables de la Cour de justice (CJUE). Or, sur ce chapitre, nous voyons bien qu’il y a une défaillance qui aggrave le marasme français : nous pensions avoir une marge de manœuvre sur l’état actuel de l’UE et nous découvrons que – si elle existe – celle-ci est extrêmement faible ; pas en mesure de réactiver l’espérance européenne pour les Français. (...)
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