10 ans après, que reste-t-il des "Printemps arabes" ?

Place Tahrir, au Caire, le 30/12/2011
Place Tahrir, au Caire, le 30/12/2011 ©AFP - Filippo Monteforte
Place Tahrir, au Caire, le 30/12/2011 ©AFP - Filippo Monteforte
Place Tahrir, au Caire, le 30/12/2011 ©AFP - Filippo Monteforte
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De l'avis général, les désillusions entraînées par les soulèvements démocratiques de 2011 dans le monde arabe empêchent toute commémoration festive de leur 10ème anniversaire. Les révolutions restent à mener, en tirant les leçons de 2011. Chang-e 5, un succès lunaire qui fera date pour la Chine.

Nous évoquons ce jeudi un anniversaire très ambivalent.

Il y a dix ans jour pour jour, dans la ville tunisienne de Sidi Bouzid, le jeune marchande fruits Mohammed Bouazizi se donnait la mort, par le feu, à force de misère et de désespoir face à la corruption et la brutalité du régime en place.

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Sur cette étincelle tunisienne, qui a embrasé ensuite ce que l’on a appelé les Printemps arabes de Tunis à Sanaa en passant par Le Caire et Tripoli, je vous laisse réécouter l’excellent reportage de la rédaction diffusé il un peu plus tôt et signé Valérie Crova.

Le Reportage de la rédaction
4 min

Non, sur cet épisode originel je citerai seulement The Guardian, daté d’hier, qui nous fait entendre des Tunisiens de Sidi Bouzid et le rapport très contrastés qu’ils ont aujourd’hui au personnage historique qu’est devenu Mohammed Bouazizi : à la fois, disent-ils "il nous a rendu plus libres" en provoquant par effet domino la chute du dictateur Ben Ali, à la fois "nous sommes 10 ans après cette révolution, toujours aussi pauvres et misérables, sauf que nous sommes aussi désillusionnés en plus de tout le reste". Voilà pourquoi à Sidi Bouzid il y a ce sentiment tenace que Bouazizi "nous a ruiné" pour reprendre cette citation d’une Tunisienne à laquelle The Guardian emprunte le titre de son reportage.

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Mais on parle bien là des printemps arabes, au-delà de la seule révolution tunisienne. D’ailleurs, faut-il vraiment marquer cet anniversaire des dix ans ? "Il n’y a vraiment pas de quoi célébrer", tranche The Economist qui retient surtout, en guise de bilan, "un demi-million de morts, 16 millions de déplacés, et des Etats à peine reconnaissable" à travers le monde arabe de 2020. 

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Au-delà de la vision d‘ensemble, l’héritage du soi-disant printemps arabe, selon la revue britannique, ce sont ces "millions de trajectoires individuelles brisées, de rêves que l’on n’ose plus faire, d’espoirs sans cesse déçus". Pour illustrer ce propos très sombre, The Economist nous fait (par la magie du reportage) parcourir le répertoire téléphonique d’un ancien activiste tunisien, qui à chaque nom d’ami enregistré commente "celui-ci est mort, celui-là est en exil, celui-là a disparu…"

Et comme le rappelle aussi le journal en ligne The New Arab, le printemps 2011, en Egypte, a amené après la parenthèse frériste incarnée par Mohammed Morsi, la dictature militaire d’Al-Sissi qui est bien plus répressive encore que le régime d’Hosni Moubarak ; la Libye est déchirée en au moins deux parties rivales ; en Syrie la population paye encore aujourd'hui, au prix le plus cruel que l’on puisse imaginer, sa tentative de soulèvement contre Bachar El Assad.

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N’y aurait-il donc rien à garder dans cet épisode de 2011, pour le monde arabe de 2020 ?

Il y a bien sûr ce constat, toujours dans The New Arab, qu’au printemps 2011 a succédé "l’hiver arabe" dès 2013, période de glaciation démocratique et de grands tourments géopolitiques ; "les maux de 2011 sont toujours là, corruption, autoritarisme, injustices sociales", il y a une autre constante, plus forte encore depuis un an : succédant à la génération désillusionnée de 2011, il y a une nouvelle jeunesse arabe qui rue dans les brancards d’Alger à Bagdad en passant désormais par Beyrouth. 

C’est sur elle que se focalise The Middle East Eye, pour ne pas complètement sombrer dans la dépression. Cette génération-là , celle du "Printemps arabe 2.0", a bien compris qu’elle a des choses à apprendre, des leçons à tirer de 2011 pour poursuivre les révolutions entamées. 

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Apprendre par exemple, écrit Meghan O’Toole, que "le mur de la peur peut être brisé", qu’il ne faut jamais renoncer à exiger le changement ; apprendre aussi à se réapproprier l’espace public, occuper les places, savoir utiliser l’espace numérique aussi comme lieu d’échange et d’organisation, même si en matière d’outils internet les révolutionnaires d’aujourd’hui n’ont plus avec eux l’effet de surprise qui avait joué il y a dix ans. Et surtout, garder à l’esprit qu’il ne faut pas se satisfaire de changements de surface, de remplacer un régime d’oppression par un autre… être plus vigilant, plus ambitieux encore. 

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Car le Printemps arabe, professe enfin Marwan Bishara pour Al Jazeera, n’est "pas un évènement singulier avec un début et une fin" : c’est un processus de long court qui connaît "des revers et des percées", mais qui n’a pas dit son dernier mot. "Trop de jeunes gens sont morts ces dix dernières années pour ce changement" alors par pitié, écrit Marwan Bishara, ne cédons pas au "cynisme de la défaite", et "ramenons l'idée même de printemps, l’espoir, le courage, dans le Printemps arabe ».

Un aller-retour à présent sur la Lune... en passant par la Chine.

Les Chinois ont la tête dans les étoiles aujourd’hui, après le succès de leur mission lunaire "Chang-e 5" dont la capsule est rentrée sur terre mercredi soir chargée de 2 kilos de poussières et de roches prélevées sur le sol et dans des forages effectués par un petit robot lunaire entièrement made in China.

Pas de doute, affirme The New York Times, cette livraison très long courrier comme on en avait pas vu depuis 44 ans "lance une nouvelle ère de conquête spatiale et surtout de rivalité internationale"… sauf qu’elle ne se déroule plus désormais entre les Etats-Unis et la Russie, mais bien avec la Chine comme ambitieux concurrent.

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Pékin, comme Washington, a pour projet à moyen terme d’installer une base fixe sur la Lune pour en exploiter les ressources minières. C’est pour ça que le choix a été fait de mener des prélèvements de sol, même si selon la justification scientifique officielle reprise par la revue en ligne The New Scientist, les Chinois veulent avant tout "faire progresser la datation du système solaire", et mieux comprendre l’évolution de la composition géologique de ses composantes à travers le temps".  

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En attendant de faire parler ces deux kilos de cailloux lunaires, les Chinois en tous cas tirent un profit médiatique maximum du succès de leur 5e mission lunaire. A présent, écrit plein d’enthousiasme le Global times, "le peuple chinois peut réellement croire que ses rêves de plus amples aventures spatiales, d'expéditions habitées, de base sur la Lune, d'atterrissage sur Mars ou même colonisation d’autres corps célestes, pourront un jour devenir réalité".