Comme un arrière-goût amer

Montage photo du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker.
Montage photo du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. ©AFP - EMMANUEL DUNAND
Montage photo du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. ©AFP - EMMANUEL DUNAND
Montage photo du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. ©AFP - EMMANUEL DUNAND
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Le vote des Etats membres de l’UE, dont l’Allemagne, en faveur du renouvellement pour cinq ans de l'autorisation du glyphosate a eu une conséquence inattendue : la possible mise en échec des pourparlers entre la CDU et le SPD, en vue de parvenir à une grande coalition.

Après plus de deux ans de débat politique acharné sur la question de savoir si le glyphosate est ou non cancérogène, hier, l'Union Européenne a décidé de renouveler pour cinq ans la licence d'utilisation de l'herbicide controversé, le plus utilisé au monde. Et à trois semaines, seulement, de la date d'expiration de la licence actuelle, c'est peu de dire que ce vote apparaît comme une véritable surprise, tant les divisions semblaient insurmontables. Au tour précédent, le nombre de voix requis n'avait pas été atteint. Cette fois-ci, 18 pays ont soutenu la proposition de la Commission et en particulier l'Allemagne, dont le revirement spectaculaire, écrit le magazine POLITICO, a fait pencher la balance. Son confrère belge, L'AVENIR, est lui encore plus explicite : l'Allemagne a tout simplement sauvé, dit-il, le glyphosate. Et de fait, jusqu'à présent Berlin s'était toujours abstenu sur cette question. Non pas qu'en l'absence de certitudes nos voisins outre-Rhin préféraient s'en tenir au principe de précaution, non, le blocage était purement politique. Les conservateurs de la chancelière étaient alors en pleine négociation en vue d'obtenir un gouvernement de coalition avec les Verts, farouchement anti-pesticides. Or ces pourparlers s'étant effondrés, la CDU avait de nouveau les mains libres pour approuver le glyphosate. Et c'est ainsi que, ce matin, le débat dans la presse germanophone ne porte pas tant, finalement, sur les inquiétudes autour de la protection de l'environnement ou de la santé, mais plutôt sur la question de savoir si le virage à 180° de l'Allemagne, hier, est à même de faire dérailler, désormais, les pourparlers de coalition entre les conservateurs d'un côté et les sociaux-démocrates de l'autre. Dans cette série à rebondissement des négociations gouvernementales, écrit la DEUTSCHE WELLE, le patron du SPD Martin Schulz, lequel refusait catégoriquement, il y a encore une semaine, de ressusciter la grande coalition avec la CDU, avait fini par céder à la pression, vendredi dernier, en acceptant de discuter avec Angela Merkel. Sauf que le vote sur le glyphosate pourrait bien mettre, cette fois-ci, un terme définitif à la possibilité d'une nouvelle alliance de la chancelière avec les sociaux-démocrates, pourtant la seule alliance possible mathématiquement qui donnerait à Angela Merkel une majorité au Bundestag et lui éviterait, ainsi, de repasser par les urnes. Hier, le vote a en effet provoqué la colère de la ministre de l'Environnement, membre du parti social-démocrate et farouchement opposée au glyphosate. Barbara Hendricks accuse le ministre de l'Agriculture, Christian Schmidt, d'avoir outrepassé ses prérogatives. Et d'expliquer, notamment, que le matin même, après avoir expliqué à son collègue son opposition à la prolongation de l'herbicide, elle et le ministre de l'Agriculture avaient convenu que l'Allemagne s'abstiendrait à nouveau. De son côté, Christian Schmidt justifie son vote en expliquant que la Commission européenne aurait de toute manière eu le dernier mot et voté en faveur de la prolongation du glyphosate. Dans les colonnes du RHEINISCHE POST, il confie même que l'Allemagne aurait réussi à «imposer des conditions importantes», dit-il, pour restreindre l'usage de l'herbicide. Toujours est-il que la ministre de l'Environnement parle, elle, à présent d'une «rupture de confiance» au sein de la coalition actuelle.

Et pendant ce temps, en Autriche, la constitution du prochain gouvernement est, elle aussi, scrutée de près. Depuis un mois environ, le parti conservateur et le parti d'extrême droite négocient une éventuelle alliance gouvernementale. Une nouvelle réunion des chefs de parti est prévue aujourd'hui. L'occasion pour le journal KURIER de faire le point sur ce premier mois de pourparlers. Les négociateurs auraient d'ores et déjà convenu que les réfugiés (reconnus comme tels) ne seront plus autorisés à demander la citoyenneté après six ans, mais dix ans. Les expulsions devront également être accélérées et les délais de recours raccourcis pour les procédures d'asile. Et puis des restrictions aux garanties minimales (comme les prestations sociales) viseront principalement les demandeurs d'asile. De son côté, le journal LE TEMPS rappelle qu'en Autriche, une coalition avec l'extrême a déjà existé, entre 2000 et 2006. A l'époque, plus de 200 000 Autrichiens étaient descendus dans la rue pour protester. Or depuis l’annonce des négociations, il y a près d’un mois, les rassemblements ont été peu suivis : le dernier en date, l’un des plus importants, n’a réuni que 3000 personnes.

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Le journal LE TEMPS qui nous apprend également, ce matin, que le docile parlement russe a voté un budget où près d’un tiers des dépenses seront désormais absorbées par la sécurité. Les dépenses militaires, en particulier, y font un bond spectaculaire de 32%. Pour cela, Vladimir Poutine a décidé de sabrer dans les postes budgétaires les moins importants à ses yeux : la santé, le logement, la culture et l’éducation. Un arbitrage qui ne laisse planer aucun doute sur les priorités du Kremlin. En revanche, il n’est pas certain que les électeurs, appelés à réélire Vladimir Poutine le 18 mars prochain, partagent les mêmes priorités.

Et quand on parle aujourd'hui de la Russie, la Syrie n'est jamais bien loin. Aujourd'hui, l'ONU tente justement de relancer les pourparlers de paix de Genève, au point mort depuis plusieurs mois.Cette huitième série de pourparlers vise, une fois de plus, à trouver une solution politique à la guerre. Sauf qu’hier soir le régime de Damas, fort de ses victoires militaires, continuait à laisser planer le doute quant à sa participation. Et forcément, lorsque la présence de l'un des principaux acteurs est encore dans les airs à la veille du rassemblement, cela ne présage rien de bon, prévient THE LOS ANGELES TIMES. Un journal syrien laisse entendre, pour sa part, que la délégation gouvernementale ne viendra pas à Genève tant que les factions rebelles exigeront le retrait de Bachar el-Assad. Ou quand la guerre en Syrie apparait plus que jamais dans l'impasse.

Enfin toute la journée d'hier, encore, des politiciens de droite et des internautes se sont déchaînés contre le président israélien. Reuven Rivlinest aujourd’hui la cible d'une virulente campagne de diffamation depuis qu'il a refusé (le 19 novembre) de gracier Elor Azaria, un soldat condamné à 18 mois de prison pour avoir achevé d’une balle dans la tête un Palestinien blessé qui avait, quelques minutes auparavant, tenté de poignarder un autre soldat de l’Etat hébreu. Sur Facebook, notamment, des photos circulent montrant à présent le président israélien affublé du keffieh de Yasser Arafat. Sur d’autres, il porte un uniforme SS ou bien une corde de pendu autour du cou. D'où ce commentaire, amer, du plus grand quotidien du pays YEDIOT AHARONOT : avant, dit-il, ceux qui voulaient insulter une personnalité politique se cachaient derrière l’anonymat, mais aujourd’hui ils le font à visage découvert et ne le regrettent pas. Au contraire, ils en sont fiers.

Par Thomas CLUZEL

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