

Artisan de paix en ex-Yougoslavie, amateur érudit de culture nipponne ou incarnation du charme gaulois prompt à endormir tout un peuple, Jacques Chirac, au lendemain de son décès, laisse des souvenirs contrastés selon la région du monde où l'on lit les journaux.
Une question ce matin : que retiendra le monde de Jacques Chirac ?
On a beaucoup parlé depuis hier de son refus de la guerre en Irak en 2003, de sa politique pro-palestinienne au Proche-Orient, mais assez peu d'un autre chapitre marquant de la politique étrangère de Jacques Chirac : le conflit en ex-Yougoslavie.
L'éclatement, par la guerre dès 1993, de l'ancien bloc communiste des Balkans a bien sûr dans un premier temps marqué la fin de présidence de François Mitterrand, mais pour la chaîne de télévision régionale N1, qu'on ne s'y trompe pas, c'est bien Jacques Chirac, à peine arrivé à l'Elysée fin 1995, qui insisté, auprès des Américains, pour accueillir la conférence de paix où les Accords dits de Dayton ont été signés.
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En voyant les hommages plutôt froids qui lui sont réservés dans les journaux serbes et beaucoup plus chaleureux dans ceux de Bosnie-Herzégovine ou de Croatie, on comprend vite que l'élection du président français, en 1995, a vu un revirement clair de la position de notre pays dans ce conflit des Balkans. Là où Mitterand, nous dit le Daily Beast, avait envoyé des casques bleus français mais rechignait à condamner les atrocités commises par Slobodan Milosevic, l'armée serbe et les serbes de Bosnie... Jacques Chirac, lui, s'est tout de suite rapproché de Bill Clinton pour mettre fin aux massacres. Ensemble ils ont soutenu l'intervention armée des Croates et mis à genoux Milosevic pour le contraindre à signer les accords de Dayton.
C'est là qu'est né l'Etat de Bosnie-Herzégovine, jeune Nation dont le président français restera comme l'un des parrains sinon des pères. En 2011, nous rappelle Radio Slobodna Evropa, Jacques Chirac avait été fait citoyen d'honneur de la Ville de Sarajevo où l'on n'oublie pas les mots qu'il était venu y prononcer en avril 98.
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La paix, Jacques Chirac en aura été l'un des plus fervents artisans dans la région, c'est en tous cas ce que retient la chaîne N1 désormais diffusée dans toutes les Républiques d'ex-Yougoslavie, ce qui était inimaginable il y a 20 ans. A noter qu'hier soir au moment où la tour Eiffel s'éteignait en signe de deuil à Paris, le vieux pont de Mostar, symbole de la guerre de Bosnie, était éclairé, en bleu blanc rouge.
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Au-delà de ces hommages bosniaques, de nombreux médias à travers le monde s'interrogent depuis hier sur cette étrange passion qui semble unir la France à son ancien président.
C'est l'avantage de lire les journaux étrangers et de comparer avec ce qu'on écrit chez nous : on se rend compte qu'en échappant aux passions nationales, en prenant du recul, on commence à voir les choses différemment.
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Moins de 24 heures après la mort du président, il y a apparemment des choses qu'on ne peut pas écrire dans la presse française, alors c'est dans le quotidien britannique The Independent que la journaliste Clémence Michallon ose affirmer ceci : "Jacques Chirac était loin d'être parfait, et ça ne devrait pas poser problème de le dire". Clémence Michallon est frnaçaise, elle vit et travaille à New York, c'est donc un peu ébahie qu'elle a vu son fil Twitter hier se couvrir de messages émus et uniquement hagiographiques de la part de proches dont elle savait qu'ils n'étaient poltiquement pas, pourtant, des partisans de l'ex-président.
Alors la journaliste pose la question : mais quand cessera cette unanimisme obligatoire, cette amnésie collective qui nous pousse à faire comme si le négatif n'avait pas sa place dans le deuil ? Pourquoi éluder le discours sur "le travailleur français, le bruit et l'odeur" en 1991, et la condamnation à deux ans de prison avec sursis en 2011 ? "C'est en jugeant nos dirigeants politiques dans leur globalité, que nous pourrons choisir les prochains avec sagesse à l'avenir", conclut la correspondante frenchie de The Independent.
Mais faut-il s'étonner que nous réagissions avec autant de passion sélective, de sentiment, quand Hugh Schofield de la BBC nous explique que Jacques Chirac était avant tout "un caméléon politique qui avait charmé la France" ?. Un homme dont le "charme gaulois" arrivait à faire oublier jusqu'à l'ampleur colossale de la corruption au RPR ou à la Mairie de Paris.
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Mais même si l'on décide de s'en tenir à cette image d'un "Chirac en premier des charlatans politiques de son époque, en hypnotiseur sans cervelle prompt à mettre les Français dans un état second" (c'est toujours Hugh Schofield qui écrit), on ne peut nier qu'il était "à l'image des Français, ou en tout cas il leur plaisait car il leur renvoyait un reflet proche de l'image qu'ils voulaient avoir d'eux-même : Chirac aimait les gens, la vie, il mangeait, buvait et trompait fidèlement sa femme. Il sortait tout droit d'une époque où la France irradiait la confiance en soi et le pouvoir économique". C'était (à l'époque) terriblement séduisant, et ça a fait oublier aussi bien "son inconsistance idéologique que son absence totale de loyauté en politique".
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La BBC a la dent dure, et ça ne s'arrange pas avec Politico, où là encore c'est un britannique, Paul Taylor, correspondant en France du site d'info européen, qui prend la plume pour nous expliquer que Jacques Chirac incarnait "cet attachant échec français". Echec à s'adapter à une "décennie de déclin où le chef de l'Etat n'aura pas réussi à mener les réformes nécessaires". Le ratage retentitssant des retraites en 1995 l'avait convaincu que la France était "inréformable", alors il a renoncé, accuse Paul Taylor, à endiguer la montée des inégalités sociales et les premiers effets de la mondialisation de l'économie. Comme s'il n'avait pas voulu voir le changement de logiciel mondial qui était à l'oeuvre, tant il était issu de l'ancien monde, de l'ancienne France bien décidée à conserver coûte que coûte l'illusion de sa perpétuation.
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Tout ça n'est pas très réjouissant, ni très valorisant pour notre pays, il faut bien le reconnaître. Alors comme il faut bien se remonter le moral, on terminera en zappant sur la télévision japonaise Asahi TV. Où la mort de Jacques Chirac est présentée comme celle d'un "familier du Japon et de sa culture". D'ailleurs sur le site d'info Jiji.com, on peut lire l'hommage rendu par la Fédération nipponne de Sumo où l'on sent l'émotion contenue d'une discipline qui passionnait le président français au point d'appeler son chien "Sumo", et de donner son nom à un tournoi international où l'on remet chaque année à Nagoya la Coupe Jacques Chirac.
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