Par Eric Biegala
L'Amérique, tétanisée, retient son souffle après l'annonce de menaces imminentes contre ses intérêts et représentations à l'étranger... Annonce, prorogée hier soir par la fermeture d'une vingtaine d'ambassades et de représentations diplomatiques cette fois pour toute la semaine...
"Il y a un étrange climat de "wait-and-see", d'attentisme, autour de cette menace qui semble être à la fois spécifique et follement vague, * note le New York Times ; les fonctionnaires fédéraux disent qu'ils ont intercepté quelque communication électronique discutant d'attaques dans les prochains jours, note le journal ; mais disent également n'avoir aucune information quant au lieu où celles-ci pourraient se produire". Sur son site web, le mensuel The Atlantic tente de résumer ce qu'on sait de ladite menace ; elle serait "sérieuse, liée à Al Quaida et "en phase terminale" ; une menace basée au Yemen mais qui pourrait ne pas en être originaire ; une menace qui pourrait se matérialiser sous forme d'une seule attaque ou d'une série coordonnée d'attaques ; ce que l'Amérique sait de ce complot trouve son origine dans de récents échanges entre des cadres éminents d'Al Quaida interceptés ces derniers jours"* , affirme The Atlantic . Et puis il y a eu les récents messages d'Ayman Al Zawahiri, le numéro un d'Al Quaida appellant publiquement à la vengeance après de récents bombardements de drones américains au Yemen..."Le seul aspect de l'affaire sur lequel tout le monde s'accorde c'est que la branche d'Al Qaida au Yemen est derrière la menace, note le New York Times , qui rappelle que *le groupe - dénommé Al Quaida dans la Péninsule Arabique - a tenté ces dernières années de monter des attaques assez sophisitiquées. L'une d'elle essayant de faire exploser en vol un avion au dessus de Detroit en 2009 ; le terroriste portait des explosifs cousus dans ses sous-vêtements ; quelques mois plus tôt, le groupe avait aussi tenté de tuer le chef du renseignement saoudien avec une bombe implanté dans le corps même de l'attaquant grace à une opération de chirurgie... les fonctionnaires américains pensent que ces deux attaques ont été imaginées par Ibrahim al-Asiri, l'un des chefs d'Al Quaida dans la Péninsule Arabique, que l'administration Obama essaie de tuer dans sa campagne d'attaques par drones au Yemen". * Le Washington Post ** précise pour sa part qu'Interpol a également lancé une alerte globale de sécurité l'agence suspectant fortement l'implication d'Al Quaida dans de récentes et spectaculaires évasions en Irak, en Lybie et au Pakistan, évasions qui ont permis a des centaines de militants de s'égayer dans la nature. "Interpol note aussi que ces craintes renouvelées coincident avec les derniers jours du Ramadan. Cette semaine marque également, rappelle le quotidien, l'anniversaire des attaques à la bombe contre les ambassades américaines de Nairobi et de Dar es Salaam en Tanzanie qui avaient fait 200 morts en 1998. Quant à l'anniversaire du 11 septembre, c'est dans quelques semaines à peine !"
Aussi vague soit-elle, l'alerte générale lancée par le Département d'Etat semble satisfaire la quasi totalité du spectre politique américain. *"les parlementaires Républicains sont souvent très critiques des décisions du Président Barack Obama, * remarque ainsi Voice Of America ; mais en la matière, pas vraiment ! * Même le présidnt, Républicain, du comité pour la sécurité intérieure de la Chambre des représentants Michael Mc Caul a indiqué (sans ironie aucune) qu'il trouvait "très malin" * d'annoncer ainsi la fermeture de ces ambassades. Le représentant républicain estime en effet que "quand on fait savoir aux terroristes qu'on est au courant de leurs projets, qu'on est sur leurs talons, souvent ils se couchent et n'agissent pas" assurait-il ce week-end sur CBS ...Il y a aussi dans cette affaire une sorte d'opération "on ouvre le parapluie avant l'averse", note **Foregin Policy ** qui cite abondammant le président du comité "terrorisme et contre-prolifération" à la Chambre des Représentants Ted Poe : *"Le Département d'Etat ne veut pas se retrouver dans une situation telle que celle dans laquelle il s'est retrouvé après l'attaque à Benghazi l'année dernière, où le consulat américain n'avait pas été sécurisé malgré de nombreuses demandes en ce sens pendant des mois" * explique Ted Poe ; l'attaque - qui avait couté la vie à l'ambassadeur américain en Lybie ainsi qu'à trois agents américains - avait surtout entrainé vagues après vagues de critiques de la part du Congrès, rappelle Foreign Policy ; un Congrès qui reprochait à l'administration Obama de n'avoir pas fait suffisemment pour protéger sa représentation diplomatique en Lybie et les personnels qui s'y trouvaient... Le résultat de toute cette histoire, c'est que le terrorisme ça marche écrit en substance Jeffrey Goldberg, l'éditorialiste de l'agence Bloomberg ** ; "on dirait qu'Al Quaida ou sa branche dans la Péininsule Arabique a réussi à terroriser une fois de plus les Etats-Unis d'Amérique, mais cette fois sans avoir à faire exploser le moindre gramme de C4... la fermerture préventive de ces 21 ambassades au Moyen orient et en Afrique du Nord ne me parait pas particulièrement avisée, écrit encore Jeffrey Goldberg : quel message cette sorte de "ne dites pas qu'on vous avait pas prévenu" sera ainsi déchiffré par les citoyens du Moyen Orient ? On a déjà complètement brouillé tout message autour du courage américain en transformant nos ambassades en bunkers... Aujourd'hui on admet que ces bunkers ne sont même pas sûrs... Et ensuite ? * poursuit l'éditorialiste de Bloomberg , ensuite on décidera quoi ? De faire en sorte que nos ambassadeurs ne quittent plus Washington ? On implantera des ambassades virtuelles ? sur Facebook ? "En fait, si message il y a c'est aussi à destination des Américains semble dire Jeffrey Goldberg... message qu'il résume d'ailleurs dans le titre de son éditorial : "Avertissement aux Américains ! , * écrit-il, "Il faut avoir peur, très peur" ! et de conclure en ces termes : "peut-être y aurait il eu une autre manière de gérer la sécurité de nos diplomates une manière qui aurait évité de faire passer au monde entier le message selon lequel Al-Quaida peut déstabiliser l'Amérique avec une telle facilité".
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