Pour sauver son industrie agro-alimentaire, l'Allemagne a mis en place un véritable pont aérien avec la Roumanie pour faire venir, malgré la pandémie, des milliers de travailleurs roumains au péril de leur santé. Au Canada, la langue française "victime col"atérale du coronavirus" ?
La question est posée d'emblée par The Guardian : "l'approvisionnement en fruits et légumes des Européens de l'ouest vaudrait-il plus que la santé de milliers de Roumains ?"
Question légitimement posée par le quotidien de Londres, tant il nous rappelle que les exploitations agricoles allemandes, dans lesquelles on produit notamment à cette saison la fameuse asperge blanche de Thuringe, emploient chaque année à la même période environ 300 000 travailleurs immigrés, pour la plupart venus de Roumanie, pour récolter à bas coût et dans des conditions souvent précaires les précieux primeurs.
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Or cette année, les autorités de Bucarest on très tôt imposé à leur population un confinement strict avec mobilisation de l'armée pour en surveiller la bonne application ainsi qu'un couvre-feu général après 10 heures du soir. Et aujourd'hui la Roumanie peut s’enorgueillir d'avoir plutôt bien contenu jusque-là la propagation du coronavirus et le nombre de décès induits.
Sauf que, pendant que les Roumains s'enfermaient chez eux pour se protéger, l'Allemagne frappait à leur porte : les producteurs d'asperges et compagnies n'avaient plus de main d’œuvre, le pourrissement sur pied et la faillite menaçaient, alors il fallait illico trouver un moyen de ramener en masse les Roumains dans les champs allemands.
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Ce fut fait, il y a environ deux semaines explique The Guardian, quand les gouvernements allemand et roumain se sont entendus sur la mise en place d'une dérogation spéciale pour sortir des dizaines de milliers de citoyens roumains de leur confinement, organiser un véritable pont aérien et ouvrir exceptionnellement les frontières de l'Allemagne, le tout donc au nom de la continuité vitale de l'asperge blanche.
Depuis, presque pas un jour ne passe sans que des charters venus de Roumanie n'atterrissent sur le sol allemand. L'un des derniers en date pas, plus tard que ce mardi relève la NDR, la radio publique du nord de l'Allemagne, a atterri à Hambourg avec à son bord (en plus de quelques touristes Allemands qui étaient restés bloqués en Roumanie) 174 travailleurs roumains venus de la région de Iasi, dans l'est du pays, amenés là spécifiquement, nous précise-t-on bien, pour récolter les fruits et légumes dans les exploitations du nord allemand (sinon, ils n'auraient tout simplement pas été autorisés à venir).
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La NDR nous précise aussi que "la température de tous les voyageurs a été prise au départ de l'avion et un examen de santé a été mené sur chacun après l'atterrissage", histoire de rassurer les Allemands qui pourraient craindre que ces flots d'immigrants ne risque d'amener le coronavirus avec eux... mais en fait la vrai crainte c'est l'inverse, et c'est là qu'est le fond du problème : en Roumanie, on l'a dit, l'épidémie semble plutôt maîtrisée, mais en Allemagne, comme le notent bien d'ailleurs les journaux de Bucarest, il semble y avoir une reprise des contaminations, alors que le déconfinement doit débuter lundi prochain.
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Pire, plusieurs foyers de contamination sont apparus justement dans des chaînes de production de l'industrie agro-alimentaire. Le plus récent fait frémir le quotidien roumain Adevarul : 200 travailleurs ont contracté la Covid-19 dans un abattoir dans la ville de Birkenfeld, pas loin de la frontière française, qui emploie 500 roumains sur ses 700 salariés en tout.
Certains journaux allemands, comme l' AbendBlatt de Hambourg, ont beau parler des travailleurs roumains comme de "sauveurs" dont l'arrivée providentielle a permis d'éviter la faillite à de nombreuses petites exploitations, la réalité est souvent beaucoup moins glorieuse. La Deutsche Welle en langue roumaine diffusait tout récemment un reportage sur les mauvais traitements réservés aux Roumains en Allemagne, les règles d'hygiène et de distanciation des travailleurs pas respectées, les examens médicaux pas réalisés, et certains immigrés qui sont "abandonnés à même la rue" dès qu'ils donnent des signes de maladie.
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Des journées de douze heure, pas de week-end ni de jours fériés : faut-il s'étonner avec ce producteur de la région d'Hanovre cité par Bild que les Allemands ne veuillent pas occuper eux-mêmes ces emplois ? Surtout aux salaires que sont près à accepter les Roumains, qui vu la situation économique dans leur pays, n'osent même pas demander une prime spéciale pandémie pour couvrir les risques pris pour leur santé.
Voilà donc le prix que l'on fait payer à des dizaines de milliers de Roumains pour sauver l'alimentation et l'industrie ouest-européenne, résume The Guardian. Prix auquel il faut encore ajouter le risque aussi que ces Roumains rentrent chez eux, quand la saison sera terminée, avec le virus dans leurs bagages. "Rarement les inégalités sociales qui minent l'Europe n'étaient apparues sous un jour aussi cru" conclut le quotidien britannique.
Au Canada la langue française souffre elle aussi en ces temps de pandémie.
Le français "victime collatérale du coronavirus" : on trouve cette formule sur le site de la chaîne québécoise TVA qui nous rapporte la colère des organisations de défense de la francophonie au Canada quand elles ont appris que, du fait de l'urgence de la crise sanitaire, certaines obligations qui garantissent le bilinguisme anglais/français étaient allégées.
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Précisément, il s'agit de l'obligation pour les importateurs de produits au Canada de faire figurer, sur les étiquettes de leurs produits, les informations en français autant qu'en anglais. Ces derniers jours, explique Radio-Canada, l'organisme Santé-Canada a assoupli ces exigences, autorisant que des désinfectants ménagers et des savons corporels soient importés et vendus avec seulement des étiquettes en anglais.
Ça peut paraître dérisoire, mais c'est une question de défense du français, toujours obligé de se pousser du col face à l'anglais majoritaire aux ¾ à l'échelle du pays, et "c'est aussi une question de santé publique", assure la Fédération des communautés francophones et acadienne la FCFA citée par Radio-Canada : si les informations ne sont pas écrites en français sur l'étiquette, les utilisateurs francophones risquent de mal les utiliser au péril de leur santé.
Le Devoir, à Montréal, a beau citer le Premier ministre, francophone, Justin Trudeau selon qui ces dérogations à la règle du bilinguisme seraient "absolument inacceptables dans d'autres moments", mais sont ici justifiées par les circonstances exceptionnelles de la pandémie... l'affaire semble tout de même plus grave que de simples modes d'emploi sur des savons ou des produits ménagers.
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Depuis le début de la crise, les atteintes au respect du français comme langue officielle, au même niveau que l'anglais, se multiplient, selon la FCFA qui s'insurge (également dans les colonnes du Guardian) contre le fait que "dans les provinces d'Ontario et du Nouveau-Brunsmick, les consignes officielles à la population n'ont pas toujours été traduites en français". Selon les défenseurs scrupuleux de la francophonie canadienne, l'urgence de la crise n'excuse pas tout, et révèle surtout le mépris d'Ottawa pour la langue de Molière.
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