Le plus dur est encore à venir pour David Cameron

Boris Johnson
Boris Johnson - EPA
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Chaque matin, l'actualité vue au travers de la presse étrangère. Aujourd'hui: le ralliement du populaire maire de Londres Boris Johnson au camp des "Pro-Brexit" complique encore la campagne que doit mener le Premier ministre David Cameron en faveur du maintien de la Grande-Bretagne dans l'UE.

"Le plus difficile commence, pour David Cameron":

Cc'est un titre du quotidien suisse Le Temps... et cil est question bien entendu de la campagne pour ou contre le Brexit. Le référendum aura lieu, on l'a appris ce week-end, le 23 juin en Grande-Bretagne, et les vrais ennuis ne font que commencer pour le pensionnaire du 10 Downing street.

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Certes, David Cameron a obtenu, après 8 mois de diplomatie incessante, un accord à Bruxelles, un "statut spécial dans l'Union" pour son pays, mais rien de comparable, nous dit-on, à l'aigreur du débat qui vient de débuter au Royaume-Uni.

A Bruxelles, analyse Le Temps, le Premier ministre britannique voulait le beurre et l'argent du beurre... rester dans l'UE, en tirer plus de profit avec moins de contraintes. Son chantage au Brexit a fonctionné, il faut dire que lui avait une vraie arme de dissuasion à mettre dans la balance, ce qui a sans doute manqué cet été aux Grecs. L'éditorialiste suisse Ram Etouaria rappelle, à toutes fins utiles, que c'est avec des arrières-pensées de politique interieure que Cameron s'est lancé dans cette aventure du référendum. Il l'a fait parce que sa formation, le Parti conservateur, perdait du terrain au profit des eurosceptiques de Nigel Farage, et du parti Ukip. Il va devoir à présent en assumer le prix.

Car ce référendum qui s'annonce est en train d'atomiser la classe politique britannique

Ou en tous cas de créer une véritable schisme dans le camp conservateur... 6 ministres du gouvernement Cameron feront campagne pour la sortie de l'UE, contre donc leur premier ministre... Parmi eux il y a le mibnistre de la Justice Michael Gove, un ami très proche de David Cameron... et Ian Duncan Smith, un ancien leader des Tories. Liste des partisans du Brexit à laquelle il a fallu ajouter hier la voix du tonitruant (et populaire) Boris Johnson. Le maire de Londres pour qui, nous raconte le Guardian, ça a été "un crève-coeur" que de devoir prendre cette décision. Pour lui, l'accord conclu par Cameron vendredi à Bruxelles ne pousse pas assez loin la réforme de l'UE.  Au fond, dit-il, ce qu'il faut proposer aux britanniques c'est de reprendre le contrôle, la souveraineté... de ne plus s'en remettre à un élément supra-national...

Révélatrice, la réaction du 10 Downing street, citée, là encore, par le Guardian: "Ce que nous voulons pour notre pays, c'est le meilleur des deux mondes: bénéficier des emplois et des investissements qu'apporte l'Europe, sans les contraintes de l'Euro et de Schengen..." Le beurre et l'argent du beurre... voilà qui est clair.

Toujours est-il que le ralliement de Boris Johnson au camp des pro-Brexit... c'est vraiment un coup dur pour David Cameron!

Et c'est ce que confirme le Wall Street Journal. Le maire de Londres, c'est une personnalité politique de poids, outre-manche. Il sera la tête d'affiche du camp du NON au maintien dans l'UE... même s'il assure qu'il ne participera pas à des débats à la télé face à des membres de son propre parti. La campagne qui s'ouvre va laisser de profondes cicatrices, prédit le quotidien américain... qui annonce que si le Brexit" obtenait la majorité en juin, Cameron devrait quitter la tête du gouvernement. Le parti Conservateur n'y survivrait sans doute pas, et ça pourrait accélérer l'implosion d'une Union Européenne déjà moribonde.

Le Wall Street Journal décrit lui aussi un David Cameron qui ne voulait pas se retrouver dans une telle position, mais qui n'a pas su résister à la pression des eurosceptiques. Au point de se retrouver, vendredi, à Bruxelles, acculé à défendre un accord qui discrimine clairement les travailleurs polonais en Grande-Bretagne, en les privant de droits sociaux.

Le pire c'est que cet accord de Bruxelles, "le beurre et l'argent du beurre", il semble ne satisfaire à peu près personne, de l'autre côté du Channel... et il se transforme en piège pour Cameron, obligé de défendre les concessions qu'il a obtenues, sans passer pour un laquais au service de l'Union.

Le Daily Mail a fait ses comptes: plus de la moitié des parlementaires conservateurs ont pris position pour le Brexit: il rappelle aussi que Boris Johnson et David Cameron s'affrontent depuis les bancs de l'école: la prestigieuse Eton, puis Oxford. Pour acheter la loyauté de son vieux rival, le premier ministre lui aurait proposé le poste de ministre de l'Intérieur, ou des Affaires étrangères... ce n'était sans doute pas assez, pour l'ambitieux Johnson. Ses amis tentent tout de même de rassurer, un peu partout dans la presse britannique: pas question de faire du référendum un match fratricide, "Cameron contre Johnson". Du côté des bookmakers, en tous cas, la côte du maire de Londres comme prochain leader du Parti conservateur vient de grimper... à deux contre un.

Quant à l'issue du référendum, qui aura lieu, rappelons-le, dans 4 mois... elle reste très incertaine.

On verra dans les prochains jours si l'épisode Johnson booste ou non le camp des pro-Brexit dans les sondages. En tous cas, rappelle Le New York Times, il ne faut pas s'y tromper: n'en déplaise à David Cameron, le vote des britanniques, c'est la règle pour tout référendum, ne se fera pas tant sur une question politique précise ( par exemple "pour ou contre l'accord obtenu vendredi à Bruxelles") que sur des considérations beaucoup plus larges: le vote du 23 juin devrait porter en lui les ressentiments sur l'Union Européenne et ce qu'elle est devenue, sur la montée du nationalisme britannique, sur la crise migratoire, la nostalgie, le racisme, ou simplement le rejet des conservateurs au pouvoir.

Par Camille MAGNARD