Germaine de Staël craignait-elle d'être folle ?

Portrait de Germaine de Staël
Portrait de Germaine de Staël ©Getty - NC
Portrait de Germaine de Staël ©Getty - NC
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La redécouverte de trois nouvelles de Germaine de Staël, jusqu'ici jamais publiées, éclaire nouvellement l'ensemble son œuvre : on savait que, pour elle, la littérature doit éclairer les passions les plus complexes, mais on découvre que le côtoiement de la folie y occupe une place importante.

Avec
  • Stéphanie Genand Professeur à l'Université de Bourgogne, spécialiste de la littérature du XVIII° siècle, présidente de la société des études Staëliennes

De Madame de Staël, on connait les romans (Delphine ou Corinne ou l'Italie) ainsi que les traités (De la littérature, De l'Allemagne), genre qu'elle préférait d'ailleurs au premier. Celle qui revendiquait davantage son œuvre comme travail de pensée que de fiction fut ainsi l'une des inventrices de la figure l'intellectuelle au féminin, et le salon qu'elle tiendra rue du Bac compte parmi les hauts lieux de la pensée révolutionnaire, l'un des premiers ou la philosophie cède le pas à la politique.

Toutefois, la femme des Lumières est aussi l'introductrice du Romantisme en France, et son écriture s'en fait également l'écho : l'empire des passions incontrôlées le dispute régulièrement à l'autorité de la raison et de la mesure. C'est ce que l'on découvre un plus encore dans ses nouvelles, où Stéphanie Genand révèle « une Staël folle ou attirée jusqu’au vertige par la folie ». Ainsi adresse-t-elle à son amie Juliette Récamier en 1809 une formule brillante de concision, pour dire le désœuvrement face aux impuissances de la raison :

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C'est je ne sais quoi en nous que la tempête agite.

Ce qui se dessine en creux, c'est une vertu de l'écriture selon Germaine de Staël : la possibilité de triompher du tumulte, de ne pas être submergé par lui... Et de rendre compte au plus près, par la fiction, de la peur du vacillement.

La Pièce jointe de Romain de Becdelièvre passe par Anselm Kieffer pour (peut-être) parvenir à son tour à Germaine de Staël...

La Pièce jointe
3 min
  • L'invitée : Stéphanie Genand est professeure à l'université de Bourgogne, spécialiste de la littérature du XVIIIe siècle et présidente de la Société des Études Staëliennes. Elle est l'autrice de Sympathie de la nuit, essai qui précède la publication de trois nouvelles inédites de Germaine de Staël (Flammarion, 2022), ainsi que de La chambre noire, Germaine de Staël et la pensée du négatif (Droz, 2016) et d'une biographie de Sade (Gallimard, "Folio biographies", 2018).

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