Pourquoi Tabou de Murnau est-il un grand film ?

Friedrich Wilhelm Murnau (à droite) et son caméraman Ernest Palmer, en 1928.
Friedrich Wilhelm Murnau (à droite) et son caméraman Ernest Palmer, en 1928. ©Getty - ullstein bild Dtl.
Friedrich Wilhelm Murnau (à droite) et son caméraman Ernest Palmer, en 1928. ©Getty - ullstein bild Dtl.
Friedrich Wilhelm Murnau (à droite) et son caméraman Ernest Palmer, en 1928. ©Getty - ullstein bild Dtl.
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"Le plus grand film du plus grand auteur de films", comme le désignait Éric Rohmer, mêle le sentiment d'évidence et de simplicité dans sa beauté plastique à une histoire qui touche immédiatement au mythe, où l'amour est en prise avec les interdits du tabou.

Avec
  • Nicolas Chemla Romancier et essayiste
  • Noël Herpe Écrivain, cinéaste et historien du cinéma

Un film noir tourné dans la lumière tahitienne, telle est l'originalité du dernier film de Friedrich Wilhelm Murnau, tourné en 1931 et qui compte parmi ses chefs-d’œuvre. Le film multiplie d'ailleurs les oxymores semblables : l'exultation des corps le dispute à la part ténébreuse de son sujet, et la limpidité du geste cinématographique aux difficultés rencontrées au cours de la réalisation.

Car Tabou se range dans la catégorie des films maudits, lui dont on raconte qu'il en avait brisé un, tabou, en occurrant le déplacement de pierres sacrées au cours du tournage. Ainsi les récits de l'élaboration de ce films sont-ils truffés de catastrophes inexpliquées, de malédictions prononcées ou de lieux profanés : une légende noire qui culmine dans l'accident de voiture qui emportera son réalisateur à 42 ans le 11 mars 1931, alors qu'il se rendait justement à New York pour y présenter son film... 

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Reste que le film maudit est aussi, sans doute, un film béni : un témoignage précieux d'une Bora-Bora disparue, entre rêves à la Gauguin et projet partiellement documentaire ; un sommet du sens tragique au cinéma qui marquera plusieurs générations de réalisateurs ; et une réflexion fulgurante sur les interdits qui traversent les sociétés humaines.

  • Les invités : Noël Herpe est historien et écrivain de cinéma. Il est le co-auteur de la biographie d'Éric Rohmer parue en 2014 aux éditions Stock (avec Antoine de Baecque, 608 p.), il a également signé un essai intime d'écriture cinéphile, Les films me regardent (2021, Hémisphères, 211 p.).
    Nicolas Chemla est romancier et essayiste. Après des livres consacrés au bodybuilding des années 1970 ou aux "boubours", les "bourgeois bourrins", son dernier ouvrage est le "roman vrai" du tournage de Tabou, Murnau des ténèbres (2021, Le Cherche Midi, 240 p.).
La Pièce jointe
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