Quand la France aménageait le futur

Sur son affiche électorale de 1981, François Mitterrand posait, fort et tranquille, devant l’image d’une France millénaire, la France des clochers. L’image, déjà mensongère dans ces années 80 balbutiantes, serait aujourd’hui impossible à publier autrement que pour les besoins d’une brochure touristique retouchée : les paysages français s’organisent désormais le long d’autoroutes, de nationales et de ronds-points, dans un grand système circulatoire qui dessert ici des zones commerciales, là des lotissements, ailleurs, des banlieues hérissées de grands ensembles. « La France moche » a dit un jour Télérama, celle de l’étalement urbain sans fin ni forme. Peut-être pas, mais une France passée au crible de 70 années de bulldozers, de tentatives heureuses ou ratées et d’une certaine idée de la modernité, c’est certain.

Cette métamorphose spectaculairement rapide a une histoire dont nous proposons de raconter 4 jalons.

Le rendez-vous manqué avec un architecte de la Reconstruction qui espérait faire autre chose que des grands ensembles. L’invention de la plus grande zone commerciale de France au Nord de Marseille, à l’heure où la France touchait du doigt son rêve d’abondance. L’épopée autoroutière, que nous regarderons depuis le journal de bord de l’écrivain Julio Cortázar et depuis les aires de l’autoroute A6, concentrés de paradoxes, mi-Luna Park mi-enfer d’hydrocarbures. Enfin, à Cergy-Pontoise, quand la folie bâtisseuse de l’Etat gaullien colonisait une boucle de l’Oise pour inventer, en 1965, la ville de l’an 2000.

Une série documentaire de Camille Juza, réalisée par Franck Lilin