"Vie et Destin" de Vassili Grossman - Page 2

Le rêve de Sofia était étriqué et timide ; elle rêvait d'une boîte de conserve cabossée avec un peu de liquide tiède dans le fond.

David ressent la mort avec l'acuité et la profondeur dont seuls les enfants et les grands philosophes sont capables.

Un nouveau maître, la guerre, aurait vite fait de rattraper les mauvais élèves, de remplir les oublis, d'indiquer les révisions à faire.

Les relations entre les gens étaient belles à Stalingrad. L'égalité et la dignité vivaient sur cette rive de glaise arrosée de sang.

Si on assurait un minimum de soutien à l'immeuble "6 bis", il pouvait tenir encore longtemps et, de ce fait, perturber les plans des Allemands.

Serioja ne sait pas si au 6 bis se sont retrouvés des hommes hors du commun, ou alors si des hommes ordinaires, dans cette maison, sont devenus extraordinaires.

L'Etat n'a-t-il pas mis sa puissance à créer un nouveau passé, à désigner de nouveaux auteurs à des exploits déjà anciens, à faire disparaître les vrais héros ?

Qu'a dit Tchekhov ? Commençons par aimer, respecter, plaindre l'homme ; sans cela, rien ne marchera jamais chez nous. Et cela s'appelle la démocratie.

"Vous savez ce que j'ai entendu dire ? Les terrassements que nous sommes en train de faire sont destinés à des chambres à gaz."

Erchov sentait que la victoire sur Hitler serait aussi une victoire sur les camps de la mort où avait péri sa mère, ses sœurs, son père.

Novikov découvrit que ce sentiment inconnu de lui jusqu'alors, le sentiment du bonheur, n'avait besoin ni de regards, ni de paroles, ni de pensées.

Le rêve de Piotr s'était, aujourd'hui, enfin exaucé, celle qu'il aimait serait sa femme... Et ses chars avaient reçu l'ordre de marcher sur Stalingrad.