Agressions sexuelles et médiatisation : le vice et la vertu ?

Avant-première du film J'accuse, en présence de Roman Polanski et de Sidonie Dumas, Alain Goldman, Luca Barbareschi, Jean Dujardin, Emmanuelle Seigner, Vincent Perez, Alexandre Desplat et Gregory Gadebois, Paris, UGC-Normandie, 12 novembre 2019
Avant-première du film J'accuse, en présence de Roman Polanski et de Sidonie Dumas, Alain Goldman, Luca Barbareschi, Jean Dujardin, Emmanuelle Seigner, Vincent Perez, Alexandre Desplat et Gregory Gadebois, Paris, UGC-Normandie, 12 novembre 2019 ©Getty - Stephane Cardinale - Corbis
Avant-première du film J'accuse, en présence de Roman Polanski et de Sidonie Dumas, Alain Goldman, Luca Barbareschi, Jean Dujardin, Emmanuelle Seigner, Vincent Perez, Alexandre Desplat et Gregory Gadebois, Paris, UGC-Normandie, 12 novembre 2019 ©Getty - Stephane Cardinale - Corbis
Avant-première du film J'accuse, en présence de Roman Polanski et de Sidonie Dumas, Alain Goldman, Luca Barbareschi, Jean Dujardin, Emmanuelle Seigner, Vincent Perez, Alexandre Desplat et Gregory Gadebois, Paris, UGC-Normandie, 12 novembre 2019 ©Getty - Stephane Cardinale - Corbis
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Le monde du cinéma français est en état de choc. Après les révélations d'Adèle Haenel sur Mediapart, le réalisateurRoman Polanski est visé par de nouvelles accusations de viol. Dans ce climat, que peut la justice ? Et à quelles règles les médias sollicités par les victimes doivent-ils se soumettre ?

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Le 4 novembre dernier, une semaine avant la sortie du nouveau film de Roman Polanski, J’accuse, l'actrice Adèle Haenel révèle à Mediapart avoir été victime d’attouchements et de harcèlement sexuel de la part du réalisateur Christophe Ruggia lorsqu’elle avait entre 12 et 15 ans. Invoquant les lenteurs de la justice et la difficulté des femmes à se faire entendre, elle annonce également n’avoir pas voulu porter plainte et préférer confier son histoire à une journaliste de Mediapart à la procédure judiciaire. 

L’émission  diffusée en direct sur le site de Mediapart suscite aussitôt une vague  d’émotion considérable. La Société Française des Réalisateurs (SRF) publie un communiqué de soutien à l’actrice, annonçant dans la foulée l’exclusion immédiate de ses rangs de Christophe Ruggia, tandis que Haenel fait la Une des magazines. Deux jours plus tard en dépit de ses dénégations, une enquête judiciaire était ouverte contre Ruggia.  

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Le 8 novembre, Le Parisien entre à son tour dans la danse en publiant les  déclarations de Valentine Monnier une photographe et ex-mannequin français de 62 ans. Valentine Monnier affirme avoir été agressée sexuellement par Roman Polanski lors d'un voyage au ski en Suisse, en 1975, et précise que ce nouveau témoignage après tant d’années de silence lui est inspiré par le courage d'Adèle Haenel et par la sortie  prochaine de J’accuse. Bien que déjà condamné en 1977 pour relations  sexuelles illégales avec une mineure de 13 ans, et en butte avec la SRF qui a milité contre la rétrospective de ses œuvres en 2017, Polanski dément ces accusations mais sans effets : le monde du cinéma français est en état de choc. Prévu pour assurer la promotion de J’accuse au 20h de TF1, Jean Dujardin annule au dernier moment sa venue, Emmanuelle Seigner, qui joue également dans le film, ne se rend pas à  l'enregistrement de l'émission Boomerang sur France Inter, et l'émission d'Antoine de Caunes, Popopop, enregistrée avec Louis Garrel, le troisième acteur du film, n’est pas diffusée. 

C’est entouré de gardes du corps que Polanski se rend à l’avant-première de J’accuse organisée au cinéma  UGC-Normandie à Paris en présence de plusieurs personnalités. Le film reçoit une standing ovation de sept minutes, tandis que non loin de là, dans le 5e  arrondissement, des manifestants font annuler celle prévue au cinéma Le Champollion, avec l’argument suivant : "On veut dire aux spectateurs qu'en allant voir un film de Polanski, ils se rendent complices d'une justice patriarcale." 

Celui-ci est repris par Marlène Schiappa et par la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye qui annoncent qu’elles n’iront pas voir le film, tandis qu’une sénatrice socialiste appelle à son boycott. Adèle Haenel, de son côté, propose que les projections de J’accuse soient "encadrées" de discussions sur le viol.

La "justice" médiatique permise par la notoriété permet-elle de faire mieux entendre les victimes, ou fait-elle le jeu du populisme? 

Marc Weitzmann s'entretient avec Marilyn Baldeck juriste  et déléguée générale de l’Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail (AVFT), Samuel Blumenfeld,  journaliste au Monde, Olivia Dufour juriste,  journaliste et auteure de "Justice et médias, la tentation du populisme" (LGDJ) et Jordan Mintzer, journaliste,  correspondant à Paris pour le Hollywood reporter

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