Pourquoi la déconstruction provoque-t-elle tant de confusion, et que peut-on dire aujourd’hui de son héritage, aux Etats-Unis comme en France ? Tentative de bilan intellectuel en temps de crise, débat autour de la notion de déconstruction en compagnie d'Emmanuel Faye et Elisabeth Roudinesco.
- Elisabeth Roudinesco historienne de la psychanalyse et présidente de la Société internationale d’histoire de la psychiatrie et de la psychanalyse (SIHPP)
- Emmanuel Faye professeur de philosophie moderne et contemporaine à l'Université de Rouen Normandie.
Le mot "déconstruire" est devenu un vrai signe des temps. Aux USA, la déconstruction est à la mode, en France elle est même passée dans le langage courant. Quelqu’un comme Sandrine Rousseau par exemple peut parler de son "homme déconstruit" sans que personne ne l’interroge sur ce que cela signifie. Lors du colloque "Après la déconstruction : reconstruire les sciences et la culture", qui s’est tenu début janvier à la Sorbonne à l’initiative du président du Collège de philosophie Pierre-Henri Tavoillot, on a aussi pu entendre que la déconstruction remontait jusqu'à Kant.
Au-delà des approximations et délires, cependant, la polémique que ce colloque a suscité et qui se poursuit, aujourd’hui ouvre un débat bien plus profond. Qu’est-ce que la déconstruction, cet évènement intellectuel nommé pour la première fois dans le département français d’une université américaine par Jacques Derrida, et qui est devenu en quelque décennie une référence intellectuelle majeure des deux côtés de l’Atlantique ?
Pourquoi le débat sur ses sources est-il si polémique, pourquoi la déconstruction provoque-t-elle tant de confusion, et que peut-on dire aujourd’hui de son héritage, aux Etats-Unis comme en France ?
Les invités du jour
Marc Weitmann reçoit
- Emmanuel Faye, professeur à l'université de Rouen Normandie, auteur de "Heidegger, l'introduction du nazisme dans la philosophie" (2005) et récemment de la tribune “Cessons de prendre pour une pensée critique la “déconstruction” dérivée de Heidegger” dans Le Monde.
- Elisabeth Roudinesco, historienne et psychanalyste, auteure de "Soi même comme un roi, essai sur les dérives identitaires" (2021) et récemment de la tribune "On ne combat pas des dérives en faisant la guerre à l'intelligence."
La notion de déconstruction, référence intellectuelle majeure des deux côtés de l’Atlantique
Emmanuel Faye revient sur l'origine du terme déconstruction employé par Derrida en 1964 et rappelle son ancrage heideggérien. Elisabeth Roudinesco replace le concept dans l'histoire de la philosophie et précise "la déconstruction, c'est l'idée de déplacer, non pas de détruire. Il y a à la fois un travail critique sur les textes pour faire apparaitre le sous-texte et critiquer le dogme". Emmanuel Faye propose une analyse en contrepoint : "il faut vraiment voir la différence entre une philosophie critique qui contextualise les textes qu'elle étudie, qui voit le poids de l'histoire et de la politique et la déconstruction, qui a des procédés rhétoriques très récurrents -interminables préambules, questions ouvertes à des réponses indéfiniment différées, un programme de travail jamais mis en œuvre-."
Pour en savoir plus
- "Cessons de prendre pour une pensée critique la “déconstruction” dérivée de Heidegger", tribune par Emmanuel Faye, Le Monde, 30 janvier 2022.
- "On ne combat pas des dérives en faisant la guerre à l’intelligence", Le Monde, 20 janvier 2022.
- Les conférences du colloque : "Que reconstruire après la déconstruction", Observatoire du décolonialisme.
Générique
Musique diffusée
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