Récits : l'autre guerre

Un char russe en mouvement près la ville de Kharkiv en Ukraine, le 24 février 2022
Un char russe en mouvement près la ville de Kharkiv en Ukraine, le 24 février 2022 ©Maxppp - ZURAB KURTSIKIDZE
Un char russe en mouvement près la ville de Kharkiv en Ukraine, le 24 février 2022 ©Maxppp - ZURAB KURTSIKIDZE
Un char russe en mouvement près la ville de Kharkiv en Ukraine, le 24 février 2022 ©Maxppp - ZURAB KURTSIKIDZE
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Le retour de la guerre en Europe provoque une forme de sidération dans la population. Comment l'appréhender ? Quels points communs avec la façon dont d'autres grands événements historiques ont été vécus ?

Avec
  • Johann Chapoutot Professeur d’histoire contemporaine à l’Université Paris-Sorbonne - Paris IV

Du retour du tragique au retour de l’histoire, du changement d’époque à la nouvelle Guerre froide ou au 11 septembre européen… 

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la presse mondiale et les leaders occidentaux, à l’instar d’Emmanuel Macron dans son adresse aux Français le 2 mars dernier, rivalisent de formule pour tenter de donner une grille de lecture à ce nouveau conflit sur le sol du Vieux continent. 

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L'histoire ce n'est pas que des tanks, ce n'est pas que des armes, ce n'est pas que la guerre. L'histoire c'est la trame du temps, la trame de notre vie. Et c'est la manière dont nous vivons, dont nous lisons et dont nous habitons le temps. Johann Chapoutot

Et les audiences s’envolent… des chaines d’infos qui nous donnent à voir la guerre en temps réel, aux soirées et numéros spéciaux des journaux, radios ou télévisions, à la série « Serviteur du peuple » du comédien devenu président Volodymyr Zelensky dont les droits de diffusion s’arrachent dans le monde entier. Une quête de sens qui peut permettre, parfois, de juguler l’angoisse et la sidération.

Comment lire cette image du retour à la guerre quand certaines zones du monde, en Syrie, Irak ou Afghanistan n’ont jamais quitté cet état ? Quel recul possible quand les discours sur le risque de guerre mondiale, de guerre totale, ou nucléaire s’invitent ici et là dans les fils de nos réseaux sociaux ? Comment déconstruire les récits de cette géopolitique contemporaine quand la communication en temps de guerre a des conséquences directes sur les populations, inquiètes, et déjà usée par deux années de pandémie… 

Si nous voulons être à la hauteur de l'histoire et faire véritablement histoire, il faut se défaire des références permanentes à la grande histoire qui se veulent exaltantes, pour utiliser notre esprit critique, faire marcher notre cerveau et voir les enjeux qu'il y a derrière cette guerre : les enjeux climatiques. La véritable histoire, hélas, elle se fait là. A un moment où notre maison brûle, et comme le disait le président Chirac, nous regardons ailleurs. Si l'on fait ce travail d'examen critique des véritables enjeux, alors on peut de nouveau faire histoire en état véritablement maîtres de notre destin. Johann Chapoutot

A lire :

"Être antimoderne n'a pas grand sens", Une conversation avec Johann Chapoutot sur le site Le Grand Continent

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