L’histoire que nous allons vous raconter est bien étrange. C’est celle de Marthe Robin, une femme qui aurait vécu sans boire ni manger, maintenue en vie par la seule volonté divine. Une enquête menée par le Père Conrad de Meester, vient pourtant semer le doute au sein de la communauté catholique.
- Isabelle de Gaulmyn Journaliste, rédactrice en chef du quotidien La Croix
- Patrick Sbalchiero Historien, spécialiste des phénomènes mystiques
Le Père Conrad de Meester, un religieux spécialiste des figures féminines mystiques, était en charge du procès de béatification de Marthe Robin à la fin des années 80, lorsqu'il commence à douter : Marthe Robin était-elle vraiment en proie à des phénomènes mystiques ? Il se lance dès lors dans une enquête qui aboutit à la publication posthume d’un ouvrage intitulé La Fraude Mystique de Marthe Robin. Pour en savoir plus sur Marthe Robin et sur sa possible fraude, nous avons consulté l'historien Patrick Sbalchiero et la journaliste Isabelle de Gaulmyn.
Qui était Marthe Robin ?
Petite paysanne née dans la Drôme, Marthe Robin tombe grièvement malade au lendemain de la Première Guerre mondiale et entoure très vite son mal d’une aura divine : elle s’enferme dans une chambre qu’elle ne quittera plus jusqu’à sa mort, et dans laquelle elle recevra des milliers de croyants. Proche des grandes figures catholiques de son époque, elle marqua la communauté en créant notamment les "foyers de charité", présents encore aujourd'hui dans le monde entier.
Selon Isabelle de Gaulmyn, pour comprendre le rayonnement mystique de Marthe Robin, il est nécessaire de s’intéresser à la communauté catholique et ses évolutions au cours du XXe siècle :
Dans l’Église catholique, elle a représenté sans doute, une manière de se raccrocher à quelque chose, à une époque où les catholiques étaient très troublés (…). Là, il y avait une femme qui semblait avoir un contact direct avec Dieu et qui proposait finalement une figure qui leur permettait de reprendre de l’assurance." Isabelle de Gaulmyn, journaliste
Cette femme devait sa notoriété à la densité présumée de sa vie mystique : sans raison médicale apparente, elle semblait souffrir de paralysie, de cécité, était incapable d’ingérer la moindre nourriture et était en proie à des crises qui faisaient apparaître des plaies sanguinolentes sur son corps tous les vendredis.
Des doutes sur l’authenticité de son récit
Mais les doutes au sein de la communauté catholique apparaissent par le biais d’un carme, le père Conrad de Meester. Religieux flamand très connu pour ses études sur les femmes mystiques, il est chargé d’analyser les écrits de Marthe Robin en 1988, pour soutenir son procès en béatification. Ce qu’il découvre en se penchant sur ses écrits le pousse à envisager la thèse d’une « fraude mystique » sans précédent : la « sainte » se serait non seulement rendue coupable de plagiat, mais il semblerait qu’elle écrivait elle-même ses textes, et aurait donc la faculté de se déplacer et de voir.
Ce livre est une vraie enquête policière avec une minutie incroyable, qui correspond à son tempérament : c’est un savant, c’est un théologien, pour lui la foi est quelque chose de sérieux et je pense que quelque part il a été très choqué par ce qu’il a trouvé.
Le procès en béatification de Marthe Robin est toujours en cours, et pourrait bien, malgré la publication de cette enquête, aboutir. L’historien Patrick Sbalchiero rappelle en effet que la béatification n’est pas conditionnée à l'expérience de phénomènes mystiques. De plus, pour les partisans de Marthe Robin, l’enquête du père Conrad de Meester n’est qu’une expertise négative parmi vingt-huit autres expertises, et ne dispose ainsi pas d’un pouvoir d’entrave à la béatification.
Extraits :
Biographie du Père Michel-Marie Zanotti-Sorkine
Témoignage des membres des foyers de charité
Emission Le téléphone sonne, 1981
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