Le tournoi de tennis Roland Garros se déroule en France mais très rapidement sans Français, éliminés. Charles Pépin, philosophe et journaliste, nous rappelle l’importance de l’échec, constructif, quand les jeunes joueurs de tennis français rencontrent finalement l’adversité du réel trop tard...
Cette année encore, les finales en simple du tournoi de tennis de Roland Garros se joueront sans les Français, éliminés. Pourtant, les joueurs français font partie des meilleurs joueurs au monde. Qu'est ce qui explique cet échec ?
Avec Charles Pépin, philosophe, écrivain et journaliste, auteur des Vertus de l'échec aux éditions Allary.
Avant de perdre au plus haut niveau, les joueurs français ont été très bons voire les meilleurs quand ils étaient plus jeunes et c’est ce paradoxe qu’il faut questionner. Quand on entend leurs phrases d’après défaite, on entend des choses consensuelles, conformistes, ce qui leur manque c’est un rapport à la singularité. Ça s’explique par une raison simple qui vient de la manière dont ils sont formés par la Fédération française de tennis : excellente mais très normative. Ils apprennent tous à jouer pareil et le problème c’est qu’ils sont excellents mais tous à peu près de la même façon. Vers 14 ou 15 ans, ils n’ont jamais véritablement eu l’expérience de l’échec qui vous oblige à développer un talent singulier pour vous en sortir...
Cette école très normative, très classique, fait quand même des joueurs français des joueurs excellents : beaucoup sont entre 100ème et 15ème mondiaux, ce qui est très rare. Finalement l’extraordinaire paradoxe c’est d’avoir autant de joueurs très très bons et aucun joueur véritablement exceptionnel, là ça questionne l’esprit français dans son essence...
Richard Gasquet a été en finale du Championnat du monde des Petits As à l’âge de 13 ans face à Nadal et il a très facilement gagné contre lui... On voit alors dans les yeux de Nadal une curiosité, il est en train d’apprendre de sa défaite et il en apprend plus en une défaite que Gasquet en quinze victoires. Au fond, dans l’échec, le réel, en résistant, nous montre de quoi il est fait. Mais quand comme Richard Gasquet on a été le premier mondial de l’âge de 8 ans à 14 ans, on n’a été que dans l’ivresse du succès, on n’a pas eu la chance de rencontrer la résistance du réel.
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"Superfail" est notre nouveau podcast "natif", né comme podcast et originaire du numérique, sans passer d’abord par l’antenne hertzienne. C’est Guillaume Erner, le producteur des Matins de France Culture, qui se lance sur cette nouvelle "antenne" numérique : chaque vendredi matin, retrouvez une histoire d'échec, de fail, décryptée avec un invité. Un nouveau programme à part entière à écouter à votre rythme, quand vous le désirez. Et qui a pour ambition d'explorer les possibilités offertes par le média, en termes de ton, d'écriture, de durée...
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