Par Christine Delorme Réalisation : Gilles Mardirossian Qui pouvait mieux raconter sa vie de producteur qu' Humbert Balsan lui-même ? Fin janvier 2005, il reçoit dans son bureau du 14, rue Montmartre deux journalistes de Libération, Olivier Séguret et Stéphane Piatzszek qui préparent un livre d'investigation sur le cinéma français. Le dictaphone est posé sur la table. C'est la tombée de la nuit. Humbert Balsan sort une bonne bouteille de Château-Latour à laquelle il ne touchera pas. Il revient de Berlin où il a présidé l'Académie Européenne du Cinéma "Tu as un bureau, Humbert?" s'était étonnée sa co-productrice tant elle s'était habituée à le voir dans sa mercédès avec tous ses dossiers. Humbert Balsan était passé maître dans ce jeu savant de l'apparition et de la disparition. Ce jour-là, Humbert Balsan avait posé pour un photographe devant l'affiche dessinée par Savignac. Une affiche destinée à la rétrospective Bresson qui s'était déroulée au cinéma Les Acacias.Il avait retiré l'affiche du mur de son bureau qu'il avait descendu au bas de l'escalier. *"J'ai le souvenir que Bresson me parlait tout le temps, en particulier des directions de regard, de tête. Plus à gauche, plus à droite..." * disait-il. Une direction de regard qui le guide dans le choix des films d'auteur qu'il va produire et un documentaire qu'il réalise sur Nadia Boulanger le confirme dans la justesse de ses intuitions. C'était dix jours avant sa mort, le 10 février 2005. Septembre 2006. On peut encore déchiffrer sur la boîte à lettres du 14, rue Montmartre le nom de sa dernière société de production, Onion Pictures, la quatrième, après Odyssey, Paris-Classics et Lyric International. A notre arrivée, le directeur de production chargé de la liquidation judiciaire épluche les dossiers d'une faillite, ô combien prolifique. Onion pictures a un catalogue de 66 films. 66 films, deux fois 33, chiffre initiatique de la quête passionnée d'Humbert Balsan, producteur et acteur. Premier film de producteur en 1979, le maître-nageur. une version française complètement loufoque de "On achève bien les chevaux" réalisée par Jean-Louis Trintignant, où la piscine est l'espace de jeu choisi par le nabab pour faire couler les pauvres, et il est déjà ferré au jeu de la production qu'il conçoit comme une création. Avec son panache et un brin d'excitation, la voix d'Humbert Balsan semble balayer toutes les autres. Ces autres voix résistent et apportent de nouvelles touches à l'autoportrait - un autre angle, une autre lumière, une nouvelle énigme. Sur la photo où il a posé devant l'affiche de Robert Bresson, on distingue en arrière-plan la chevelure blanche du cinéaste, son oeil et sa main qui tient l'objectif de 50 mm, la focale qui lui avai servi à cadrer Lancelot du lac, comme tous ses autres films.. Le regard de Robert Bresson est dirigé sur Humbert Balsan qui fixe l'objectif de façon frontale. Avec : Humbert Balsan, Dona Balsan, Natalie Balsan, Christian Bourgois, Paolo Branco, Mylène Bresson, Youssef Chahine, Pierre Chevalier, Gildas Golvet, Yolande Moreau, Gilles Sandoz, Ernest-Antoine Sellières, Frédéric Sichler, Elia Suleiman, Sandrine Veysset.
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