Musique et politique

Esteban Buch
Esteban Buch
Esteban Buch
Esteban Buch
Publicité

1/2 La transmission du "non".

"Compositeur, théoricien et enseignant, poète, chef de file de la Seconde École de Vienne, inventeur du dodécaphonisme... Arnold Schönberg (1874-1951) fut un des plus grands créateurs du XXe siècle. Cette liste serait incomplète sans ajouter « peintre ». Il réalise, à partir de décembre 1908 et pendant quelques années, une œuvre hors norme, dans laquelle les autoportraits et les portraits de ses proches voisinent avec ce qu’il intitulait des Regards – sortes de visions hallucinées –, des caricatures, des scènes de nature ou des études de décor pour ses opéras.

C'est le travail du peintre Schönberg qui est montré dans l'exposition "Arnold Schönberg, Peindre l'âme" qui se tient au Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme jusqu'au 29 janvier prochain.

Publicité

Bénéficiant de prêts exceptionnels, elle met en lumière, à travers 300 oeuvres et documents, la qualité singulière de cette production, en la situant dans son contexte artistique viennois, avec des œuvres de Richard Gerstl, Egon Schiele, Oskar Kokoschka ou Max Oppenheimer. Par un choix de travaux contemporains de Kandinsky, elle rappelle les liens entre les deux créateurs, unis dans leur art par une approche conjointe des pratiques musicales et picturales."

A l'occasion de cette exposition, Marc-Alain Ouaknin s'entretient aujourd'hui et dimanche prochain sur les relations entre "musique et politique" en général et autour de l’œuvre de Schönberg en particulier avec avec Esteban Buch, auteur du "Cas Schönberg, chez Gallimard en 2006 et tout récemment Trauermarch, L'orchestre de Paris dans l'argentine de la dictature, aux éditions du Seuil.

L'invité

Né en 1963 à Buenos Aires, de nationalité française et argentine, Esteban Buch est directeur d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris, où il dirige le Centre de Recherches sur les Arts et le langage (CRAL, EHESS/CNRS) et la spécialité Musique du Master de l’EHESS.

Spécialiste des rapports entre musique et politique au vingtième siècle dans une perspective historique et musicologique, il a consacré des recherches à des figures du canon musical classique et contemporain, telles que Beethoven, Schoenberg et Ginastera. A partir d’une enquête sur les musiques politiques (hymnes nationaux), il travaille sur la musique dans des contextes de violence politique tels que la Première Guerre mondiale ou les dictatures militaires en Argentine. Il s’intéresse également aux rapports entre musique savante et musique populaire (le tango en particulier), dans le cadre d’une réflexion plus générale sur les théories sociologiques de la culture.

Daniel Barenboïm dirigeant la 5e symphonie de Mahler avec le Chicago Orchestra
Daniel Barenboïm dirigeant la 5e symphonie de Mahler avec le Chicago Orchestra

Il est titulaire d’une Habilitation à Diriger des Recherches (Paris I, 2003), d’un prix d’Esthétique du CNSMDP (2000), du doctorat en Sciences du Langage - Option Arts et Littérature de l’EHESS (1997), et du diplôme de l’EHESS (1992). En complément à sa formation musicale, il a suivi à Buenos Aires des études d’analyse musicale avec Francisco Kröpfl et de sémiologie avec Oscar Steimberg (1986-1989).

Outre sa carrière universitaire, Esteban Buch a publié l’essai historique El pintor de la Suiza Argentina (Sudamericana, 1991), dénonçant des nazis exilés dans la ville de Bariloche, en Patagonie (dont Erich Priebke, condamné à Rome en 1998) ; il a été protagoniste du film documentaire Juan, como si nada hubiera sucedido de Carlos Echeverría (1987), sur les disparus de la dictature argentine; et il est l’auteur de livrets d’opéras contemporains, pour Richter de Mario Lorenzo (2003) et Aliados de Sebastián Rivas (2013).

Bibliographie de l'invité

Il est l’auteur, notamment, des ouvrages Música, dictadura, resistencia - La Orquesta de Paris en Buenos Aires (Fondo de Cultura Económica, 2016), L’affaire Bomarzo – Opéra, perversion et dictature (Editions de l’EHESS, 2011), Le cas Schönberg – Naissance de l’avant-garde musicale (Gallimard, 2006), La Neuvième de Beethoven – Une histoire politique (Gallimard, 1999) et Histoire d’un secret – A propos de la Suite Lyrique d’Alban Berg (Actes Sud, 1994), ainsi que coéditeur des collectifs Composing for the State - Music in Twentieth Century Dictatorships (Ashgate, 2016), Du politique en analyse musicale (Vrin, 2013), Tangos cultos (Gourmet Musical, 2012) Réévaluer l’art moderne et les avant-gardes (Editions de l’EHESS, 2010) et La Grande guerre des musiciens (Symétrie, 2009). Deux fois lauréat du Prix des Muses, il est par ailleurs fellow de la John Simon Guggenheim Memorial Foundation et a reçu le diplôme au mérite en musicologie de la Fondation Konex de Buenos Aires.

Programmation musicale

Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.

Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.

La conférence au Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme

mercredi 7 décembre 2016, 19h30-21h00

Le livre de l'invité

Décembre 1977 : les relations franco-argentines sont en crise à la suite de l’assassinat des deux religieuses françaises proches des mères des disparus. La visite de Daniel Barenboïm et de l’Orchestre de Paris à Buenos Aires en juillet 1980 pose la question du pouvoir critique des musiciens face à cette dictature féroce.

Au Teatro Colón, la Cinquième Symphonie de Gustav Mahler, qui s’ouvre sur la Trauermarsch – une gigantesque marche funèbre, où Adorno avait entendu « un cri d’effroi devant pire que la mort » –, fut suivie d’une ovation interminable en l’honneur des musiciens français et de leur chef israélo-argentin, de retour dans sa ville natale après vingt années d’absence. Mais comment l’interpréter ?

Trente-six ans plus tard, Esteban Buch propose un essai sur les significations politiques de la musique où l’auteur devient acteur de son propre récit :

« J’y associe l’histoire de ma famille errant entre les nazis et les militaires latino-américains, et une réflexion sur le rôle des arts dans le comportement des élites argentines pendant la dictature. Ce parcours entre histoire et mémoire débouche sur une discussion théorique du concept de résistance et ses variantes – dissidence, dissensus, protestation, opposition, négativité, critique –, qui souligne le plus petit dénominateur commun à tous, le mot non.»

Nourri de musicologie, de sciences sociales et de littérature, ce livre retrace une énigme musicale au cœur d’une Argentine devenue le théâtre silencieux d’un des crimes majeurs du xxe siècle.

L'exposition Schönberg au MAHJ

Jean-Louis Andral, directeur du musée Picasso, Antibes, et Fanny Schulmann, conservatrice chargée de l’art moderne et contemporain, musée d’art et d’histoire du Judaïsme, Paris, sont les commissaires de l'exposition.

L'équipe