Baptiste Amann écrit et met en scène "Amours premiers (Fugue)" pour l'Ensemble 28 de l'école ERACM de Cannes Marseille. Anne Brochet répète la pièce de Laurent Mauvignier "Tout mon amour", mise en scène par Arnaud Meunier. Un message d'Estonie.
- Baptiste Amann Metteur en scène
- Anne Brochet Comédienne et écrivaine
Anne Brochet, comédienne, réalisatrice, écrivaine. Avec Philippe Torreton, Jean-François Lapalus, et deux jeunes comédiens issus des promotions 28 et 29 de L’École de la Comédie de Saint-Étienne, elle partage la scène de Tout mon amour, la pièce de Laurent Mauvigner mise en scène par Arnaud Meunier, dont la première devait avoir lieu le 23 février à la Comédie de Saint-Étienne (Saint-Etienne). Tout mon amour est la première pièce de Laurent Mauvignier, publiée comme ses romans aux Éditions de Minuit (2012). Dans une maison qui fut le théâtre d’événements tragiques, un homme (Philippe Torreton) et sa femme (Anne Brochet) reviennent après dix ans d’absence. Lui, vient enterrer son père. L’enterrement, les affaires familiales à régler, le couple aimerait faire vite, ne pas s’attarder, mais une série d’événements et quelques fantômes vont néanmoins le retenir…
Baptiste Amann, comédien, auteur, metteur en scène. Il signe et met en scène Amours premiers [Fugue] avec des jeunes comédien.nes de l'ensemble 28 à l'ERACM, l'Ecole Régionale d'Acteurs de Cannes et Marseille, dont lui-même est issu. Présentée comme une variation sur la rupture amoureuse, la pièce est tissée par fragments au moyens de deux fils rouges : L’Art de la fugue de Jean-Sébastien Bach et la figure de Johannes Kepler, astronome du XVIème siècle, dont les théories sur le mouvement des planètes ont posé les bases de la loi d’attraction universelle, découverte plus tard par Isaac Newton... Au moment de la parution de Fragments d’un discours amoureux, Roland Barthes disait qu’il fallait distinguer l’histoire d’amour qui appartient à ce que la société produit comme fantasme vis à vis du sentiment amoureux (largement relayé par la littérature, le cinéma) et le discours amoureux, c’est à dire le soliloque que le sujet amoureux produit dans sa tête, qui lui est bien plus fragmentaire.
Les messages vocaux de Rémi Mesnard et Perrine Livache, élèves comédiens en troisième année à l'ERACM, interprètes de Amours premiers [Fugue], sur leur travail avec Baptise Amann pour ce spectacle
Des nouvelles du théâtre dans le monde : un message de Tallinn en Estonie, Triin Sinissaar.
La lettre de Baptiste Amann à ses jeunes acteurs et actrices :
"Le théâtre ce n'est pas comme le vélo.
Il ne suffit pas d'en avoir fait un jour...
Faire du théâtre c'est avancer en vaincu dans l'exploration de la mécanique humaine.
C'est avoir choisi un outil archaïque pour soigner une maladie incurable.
C'est hurler son amour du monde à travers un entonnoir.
C'est une expérience de foi.
Que ceux parmi vous qui ne sont pas touchés par l'image de cet enfant acharné qui, coûte que coûte, veut bâtir son château de sable malgré la marée montante, que ceux-là, oui, arrêtent le théâtre. Il n'y aura pour eux dans ce chemin que frustrations, déceptions, malentendus.
Il faut beaucoup de romantisme en soi pour faire du théâtre. Aujourd'hui peut être plus encore qu'hier.
Le théâtre ce n'est pas comme le vélo.
Il ne suffit pas d'en avoir fait un jour.
Les acquisitions sont permanentes, les découvertes infinies.
Son secret, non révélé depuis des siècles, ne s'approche que par l'artisanat patient de quelques obsessionnels.
C'est l'art imperceptible du présent,
c'est-à-dire : l'équilibre du funambule, réajusté sans cesse au dessus du vide
c'est-à-dire: le point d'apesanteur entre l'ascension et la chute
c'est-à-dire : la permanente circulation du sang, de la respiration dans nos veines et nos boyaux, toujours la même et pourtant toujours nouvelle.
Faire du théâtre c'est devoir accepter de ne pas atteindre son objectif.
Car l'objectif est à l'intérieur.
Et qu'il est changeant.
Le théâtre ce n'est pas comme le vélo
Le théâtre c'est tous les jours.
C'est comme le levain.
Le levain est une méthode de fermentation pour la levée du pain qui date de l'Egypte ancienne. Il s'obtient à partir d'un mélange de farine et d'eau.
On dit, que pour une pratique professionnelle, il faut stabiliser son levain pendant deux mois sans l'utiliser jamais.
Ensuite, chaque jour de fournée de pain, il faut à partir de la base, utiliser une part du levain et refaire son mélange pour le lendemain.
Si l'on s'arrête, le levain meurt et on ne peut plus produire.
Ces six mois d'école qu'ils vous restent, utilisez-les pour bien finir la stabilisation du mélange.
Et puis en sortant, faites du théâtre tous les jours!
N'attendez pas qu'on vous emploie!
Investissez la moindre salle, le moindre espace et déployez-y vos expériences.
Suivez vos blessures, elles ouvriront des sentiers singuliers vers le vrai.
Bien sûr que l'époque n'est pas favorable:
Les théâtres sont fermés, c'est l'hécatombe dans notre profession; tout est là pour nous convaincre que nous ne sommes pas utiles; que nous sommes dépassés par la catastrophe.
Bonne nouvelle, les conditions sont donc réunies pour que de la poésie advienne.
Je vous souhaite de tout mon cœur de ne pas vous laisser envahir par la peur, le découragement, la vacuité. Je vous souhaite de la joie.
Une joie dévastatrice, débarrassée de l'espoir, écrasant tout sur son passage pour libérer l'horizon.
Nous ne savons pas si nous pourrons jouer le spectacle devant du public.
Ce serait un désastre. Nous en serions tous, très meurtris.
Mais au-dedans de nous, là où résonne ce qui fait tenir debout, nous n'en aurons rien à foutre.
Car dès demain nous serons ces enfants acharnés, qui coûte que coûte voudront bâtir leur château de sable malgré la marée montante."
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