Nouvelle écoute ! Ahmed El Attar a grandi au Caire. A 16 ans il part en France, découvre Renaud et l'esprit critique. A son retour, il quitte les sciences informatiques pour le théâtre. Il travaille sur le rapport avec l'autorité en Egypte. Il fonde le festival D-CAF au Caire.
- Hassan El Geretly metteur en scène
- Ahmed El Attar Auteur et metteur en scène
Nouvelle écoute de cette émission enregistrée au Caire le 8/05/2017.
Le bruit arrange le pouvoir. Il n’y a pas de silence. Il n’y a pas de raison d’en faire, il vaut mieux se saouler de musiques, de klaxons, de trafic, de télévision très forte, de petites phrases et ne pas trop réfléchir. Ahmed el Attar a mis en scène un spectacle où il reconstitue des conversations de téléphone – avec son père, son fils, des amis- il nous les restitue telles quelles, mais il doit hausser le ton, parce qu’en fond il y a la musique d’un transistor, très fort, comme dans les petites échoppes des rues cairotes. Il faut tendre l’oreille, pour entendre l’espoir, les doutes pendant la Révolution. Malgré le bruit il y a des voix. Ça parle, ça pense, ça ne se résigne pas. Ca s’appelait « De l’importance d’être un arabe ». Ahmed el Attar est réputé têtu – comme les gens du Sud de l’Egypte. Il a grandi au Caire, il a très vite compris que dans la ville des klaxons, il fallait créer des poches de silence. Des espaces nouveaux. Créer du temps. Au théâtre il travaille le langage et ses pièges – il a compris très vite que la langue était dévoyée : on vous ment, on vous manipule, on vous dit le contraire de la vérité. Il a grandi avec des mensonges, des faux discours. Alors sur scène pendant près de quinze ans, il a mis au centre : des conversations de café, des coups de téléphones, des entretiens d’embauche… il a collé des bouts de réalité pour faire entendre l’absurdité. Il travaille le conflit avec l’autorité : on a le même rapport à son père qu’avec un patron ou un président – Il pense que ce rapport-là est malade. Il l’affronte. Pour son père, le choix du théâtre c’est la défaite. Mais Ahmed el Attar créé du silence, et des rendez-vous. Il a été assez fou en 2012 pour imaginer un festival d’art contemporain et de performance dans le centre du Caire. Ça s’appelle D CAF. C’est chaque printemps. La question de la censure, ce n’est pas la bonne. Ce n’est pas comme ça que ça se pose. La question c’est : comment on se rapproche le plus possible de la ligne, sans forcément l’enjamber, comment on la frôle. Comment on avance avec une Révolution qui, même si on en a effacé les traces, reste indélébile dans les corps et les esprits. Depuis 2011 il a fait un spectacle : The Last Supper – un diner chez une famille cairote aisée. Une sorte d’expérience du vide, avec ceux qui parlent encore pour ne rien dire, mais qui ont gardé le pouvoir. Le bruit ça les arrange. Mais Ahmed el Attar creuse un peu de silence au cœur du Caire, pour faire résonner ce qui parle, ce qui pense, ce qui ne se résigne pas
Ahmed El Attar, auteur et metteur en scène égyptien, fondateur du festival D-CAF Downtown Contemporary Arts Festival, c'était la 6è édition au printemps 2017. C'est un festival qui mêle artistes internationaux et égyptiens autour de la création. Son dernier spectacle The Last Supper met en scène la bourgeoisie cairote loin des préoccupations de la Révolution.
Hassan El Geretly, metteur en scène fondateur de la compagnie El Warsha, première compagnie de théâtre indépendante en Egypte créée en 1987.
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