Épisode 5/5 : Pierre Molinier (1900-1976), "à mon seul plaisir"

Il était exactement dans le privé comme il était publiquement. Il était d’un naturel confondant, au sens étymologique du mot, au sens où l’on se sentait confondus. Il nous montrait que c’était possible d’être ainsi dans la vie. Pierre Chaveau

La vie de Pierre Molinier est truffée d’épisodes, vrais ou fantasmés, tous dignes des films du plus mauvais genre.  On retient son fétichisme pour les jambes des femmes, sa passion morbide pour sa sœur, son goût des armes à feu, l’utilisation du sperme dans ses peintures, ses déambulations en bas de soie dans la sage ville de Bordeaux.

Sans oublier sa fin tragique, son suicide sur son lit, revolver dans la bouche. Mais on ne peut cantonner Pierre Molinier à une succession d’anecdotes sombres ou décalées. 

C’est un homme très convaincu, acharné à soutenir et défendre sa singularité. Ce qui faisait de lui aussi bien un homme charmant qu’un personnage extrêmement irascible. Jacques Abeille

La vente aux enchères chez Drouet en novembre 2016, où se sont vendus ses photomontages, peintures, collages, objets personnels, bas, masques retravaillés redessinés montre que le personnage est depuis quelque temps, sorti du strict cercle des initiés pour prendre la place qu’il mérite dans l’histoire de l’art. 

Aujourd’hui Pierre Molinier est présent dans toutes les grandes collections de musées, dont le musée d’Orsay et le centre Georges Pompidou.

Adoubé par André Breton jusqu’à ce que leur vision de l’érotisme les éloigne, cet artiste a magnifié l’art de la couleur, du glacis, et la vision des corps. Il a révolutionné la photographie avec ses collages et ses photomontages. Il a enfin ouvert la voie aux questions d’androgynie, du corps transformé et des transidentités.

Il est considéré comme un précurseur par les générations d’artistes qui s’intéressent à la question du body art, du corps contraint, du corps travesti et de l’érotisme, une sorte de grand-père infréquentable auquel tout le monde se réfère !

Pierre Molinier a un manque d’inhibition spectaculaire, il peut parler des choses les plus sexuellement marquées sans aucune hésitation, sans craindre le "qu’en dira-t-on". Il lâche les choses violemment, sans aucune retenue. L’évidence du personnage prime sur la vérité historique. Il a ce souci d’être lui-même et de ne pas dépendre d’un créateur. Pierre Petit

La fille de peintre Françoise Molinier, présente son père dans l'émission Présence des arts le 21 janvier 1980 sur France Culture :

Un documentaire produit et réalisé par Céline du Chéné et Laurent Paulré. Prise de son : Jean-André Giannecchini. Mixage : Alain Joubert. Documentation : Annelise Signoret et Christelle Rousseau de l'Ina. Collaboration : Juliette Dronne. (1ère diffusion : 8 septembre 2018).

Pour aller plus loin

La voix de Pierre Molinier est extraite des archives personnelles de Patricia Dupuy des éditions du Renard Pâle (enregistrement de Jean Bernard fait en 1971) et des archives de Pierre Chaveau publié en 2003 en livre-CD : Molinier, entretien avec Pierre Chaveau aux éditions Opales/Pleine Page

Le site Molinier-Infos, consacré à l'oeuvre du peintre et photographe surréaliste

Le Chaman et ses créatures, préface de Pierre Molinier, éditions William Blake and Co, 1995

Cent photographies érotiques, préface de Pierre Bourgeade, éditions Borderie, 1979

Pierre Molinier, Mes Jambes, 1965 : un film disponible dans la vidéothèque de la Maison Européenne de la Photographie

Dominique Roland, Les Jambes de Saint-Pierre, 2013 : un documentaire disponible en DVD chez Marmitafilms :

Pierre Petit, " Molinier et l'inceste : du fantasme à la réalité", communication au colloque international : Autour de l'inceste, Université Michel de Montaigne-Bordeaux-3, 6 décembre 2008

Mélodie Marull, " L’autoportrait plastique et textuel chez Pierre Molinier", Carnet des jeunes chercheurs du CREM, Centre de recherche sur les médiations

Le site officiel du photographe Gilles Berquet

Le site officiel de l'artiste plasticienne Mirka Lugosi

Le site des éditions du Renard Pâle