Aretha Franklin (1942-2018) : une quête insatiable

Aretha Franklin chante dans les studios d'Atlantic Records lors de l'enregistrement de 'The Weight' le 9 janvier 1969 à New York City
Aretha Franklin chante dans les studios d'Atlantic Records lors de l'enregistrement de 'The Weight' le 9 janvier 1969 à New York City ©Getty
Aretha Franklin chante dans les studios d'Atlantic Records lors de l'enregistrement de 'The Weight' le 9 janvier 1969 à New York City ©Getty
Aretha Franklin chante dans les studios d'Atlantic Records lors de l'enregistrement de 'The Weight' le 9 janvier 1969 à New York City ©Getty
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Surnommée « Lady Soul », couronnée « The Queen Of Soul », la voix, l’émotion et l’énergie d’Aretha Franklin subliment la musique afro-américaine.

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Chanteuse hors pair et pianiste aux 75 millions de disques écoulés, elle est l'artiste féminine ayant vendu le plus dans l'histoire de l'industrie discographique. Elle incarne aussi, subtilement, le combat pour l’égalité des Afro-américains en général et des femmes en particulier. Mais Aretha Franklin, c’est aussi une recherche effrénée du regard de l’autre et de la reconnaissance, exigeante, tumultueuse et désespérée de l’amour des hommes.

Abbey Lincoln a propos d'Aretha Franklin et de "Respect". Opus, 29/06/1991

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Aretha Franklin, son père le pasteur CL et sa sœur Caroline à New York en 1971
Aretha Franklin, son père le pasteur CL et sa sœur Caroline à New York en 1971
© Getty - Anthony Barboza

Sa carrière, commencée très tôt, sous l’impulsion de son père, pasteur enflammé, s’inscrit totalement dans la double histoire des Afro-américains pour la reconnaissance de leurs droits et des femmes noires pour échapper au machisme du ghetto. Tout, de sa naissance à Memphis, dans ce sud au racisme féroce, à sa vie à Detroit, ancien fief de l’industrie automobile connaissant le déclin économique, de sanglantes émeutes et un taux de criminalité record… tout transpire un double succès. La réussite commerciale, la reconnaissance et une renommée internationale, certes. Mais aussi la réussite d’une femme noire. La reine de la soul dépasse désormais Elvis Presley dans les classements.  

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L’amour, la jeune Aretha en manque de manière évidente durant ses jeunes années. Elle est écartelée par le départ du foyer familial de sa mère, fuyant un mari, certes admirable militant pour les droits civiques, mais aussi homme à femmes, puis par sa mort prématurée. Autour d'elle, ce sera l'hécatombe : elle perd frères et sœurs, et son père qu'elle admirait, après cinq ans de coma, des suites d'une blessure par balle. Cet amour, dont elle a un besoin absolu, Aretha le trouve charnellement dès l'âge de 12 ans. Trois ans plus tard, après deux histoires extrêmement précoces, elle a déjà donné naissance à deux enfants. Elle n’a ni la maturité suffisante ni les moyens matériels de les élever. A l'église de son père, elle chante le gospel avec la plus grande émotion. Et passionnée par le jazz, le blues et le rythm & blues de son temps, elle se lance dans une carrière musicale dès 1960. 

1978, à Detroit, mariage d'Aretha Franklin avec Glynn Turman
1978, à Detroit, mariage d'Aretha Franklin avec Glynn Turman
© Getty - Michael Ochs Archives

Après quelques années, le producteur Jerry Wexler voit grand pour elle : en la mettant au piano, il libère toute sa ferveur et c'est le triomphe immédiat à partir de 1967, les tubes et les tournées incessantes. Ses années de gloire coïncident avec la montée en puissance du mouvement des droits civiques et du féminisme, dont Aretha Franklin devient une figure, malgré elle, avec des chansons comme "Respect" ou "Think". Les années 70 sont moins florissantes : tandis que le succès s’estompe, elle divorce de son mari, infidèle et violent, sombre dans la dépression, la boulimie et l'alcool.   

La carrière d’Aretha Franklin se relance au début des années 80 mais le feu sacré s’éteint. La facilité commerciale contamine son succès retrouvé. L’argent ne manquant plus, être reconnue, aimée encore et toujours, importe désormais davantage que la qualité de ses albums. Alors, elle multiplie les duos prestigieux mais rarement essentiels. La consécration lui procure de vives émotions et une fierté immense. Mais, colérique, jalouse, paranoïaque, exigeante, consumée par sa passion d’aimer, la diva fait peur. Et sa recherche obsessionnelle et tumultueuse de l’amour ne s’apaisera jamais. S'amourachant d'hommes violents et délaissant les plus attentionnés, Aretha Franklin cherchera jusqu'au bout la reconnaissance du métier et l'amour du public ... comme un substitut.    

Aretha Franklin sur scène au Park West Auditorium à Chicago, 23 mars 1992.
Aretha Franklin sur scène au Park West Auditorium à Chicago, 23 mars 1992.
© Getty - Paul Natkin

Avec : Sébastian Danchin, écrivain, biographe d'Aretha Franklin, producteur de musique ; Gayelynn McKinney, musicienne, batteuse d'Aretha Franklin ; Dee Dee Bridgewater, chanteuse américaine de jazz ; Joby Valente, chanteuse polyvalente et comédienne martiniquaise ; Jackie Lombard, productrice de concerts ; Nicole Bacharan, historienne, spécialiste des Etats-Unis.    

Remerciements à Bertrand Richard. 

Un documentaire de Philippe Roizes, réalisé par Rafik Zenine. Prises de Son : Yann Fressy et Alia Housseni dans les studios de Mayotte. Mixage Alain Joubert. Archive INA : Gwen Michel. Collaboration : Julia Martin.

Tweet du président des Etats-Unis, Barack Obama, le 16/08/2018.
Tweet du président des Etats-Unis, Barack Obama, le 16/08/2018.
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