Deux bonnes dans une maison bourgeoise : épisode 3/2 du podcast Les soeurs Papin

Les soeurs Papin en 1928
Les soeurs Papin en 1928 - Domaine public - Wikimédia commons
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Ah ! les bonnes qui ont tué leur maîtresse ! Presque un siècle plus tard, la lecture du crime est d’emblée celle d’une vengeance sur fond de lutte de classe.

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Dès que l’ordre social est évoqué, il faut flairer la mystification. Car le mystère troublant de ce crime d’une indicible cruauté reste jusqu’à aujourd’hui insondable. Simone de Beauvoir La force de l’âge (Gallimard, 1960)

1933. La foule s’amasse devant les grilles du tribunal, dans ce théâtre du fait divers, l’identification aux sœurs Papin entraine une salle comble. L’opinion publique au cœur de la crise économique s’émeut pour les deux orphelines. Car trouver une famille pour placer ses filles comme domestiques est une véritable aubaine.

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Certes pour deux jeunes bonnes, dans une maison bourgeoise, les jours se suivent et se ressemblent : pas de relations extérieures sans autorisation, pas d’ami, pas d’amant. Les sœurs Papin vivent dans une extrême austérité et une totale dépendance à leur "maîtresse". Leur dévouement total, la peur de casser un objet, la retenue sur la paie, les réprimandes...

Archive Ina :

Témoignage de Madame Geneviève Guyot, bonne dans les années 1950 27/08/1997 France Culture

3 min

Quelques jours avant le crime, le fer à repasser grille. Le jour du crime, à 17 h, un court-circuit plonge la maison dans la pénombre. Le drame approche. La suite est connue. La maîtresse et sa fille seront cruellement assassinées. Frappées à coups de marteau et de couteau, elles sont ensuite découpées comme des lapins prêts à cuire.

On enlève les yeux des lapins quand on est une bonne cuisinière, les sœurs Papin

Le crime des soeurs Papin
Le crime des soeurs Papin
- Domaine public

Au procès, trois cliniciens réputés lors de la commission des faits rejettent la possibilité d’un état de démence. Pas folles les sœurs donc en 1933. Penseurs de l’hérédité et théoriciens de la simulation s’écharpent. Les deux sœurs se murent dans le silence sans mobile. À la police, elles dirent qu’elles n’avaient rien à reprocher à leur maîtresse. Christine, après cinq mois d’incarcération est sujette à diverses syncopes et hallucinations. Elle se livre à des exhibitions érotiques, se met en prière ou tente de s’arracher les yeux. On ne devrait pas rendre la justice dans la fièvre des après-dîners et des digestions difficiles, dénonce le journal radical L’œuvre...

Non, l’affaire n’est pas close !

Des courriers de l’expert psychiatre nommé au procès, longtemps restés dans le grenier familial, éclairent aujourd’hui une part d’ombre du procès des sœurs Papin.

Pour en parler

  • Fréderic Chauvaud, Professeur d’histoire à l’Université de Poitiers
  • Jean Allouch, psychanalyste
  • Isabelle Bedouet, auteure et psychothérapeute
  • Bertrand Ogilvie, auteur et philosophe