Dans son nom, déjà un poème. Dans son œuvre, les éclats intenses du geste artistique. Peindre, photographier, sculpter, et toujours renouveler ce geste. Tracer un monde infusé de mythes antiques, de textes poétiques, d’éros aussi. Et s’émerveiller.
- Marie-Laure Bernadac conservatrice générale du patrimoine, chargée de l’art contemporain au Musée du Louvre de 2003 à 2013.
- Richard Leeman professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université Bordeaux-Montaigne.
- Eric Mézil Directeur de la Collection Lambert en Avignon
- Jonas Storsve conservateur du Cabinet d’arts graphiques du Centre Pompidou.
Par Julien Rosa. Réalisation Gaël Gillon. Archives Ina : Nathalie Durand.
Insaisissable, Cy Twombly ? Avec ses toiles immenses remplies de signes, de mots parfois illisibles, de coulures de couleurs, on sera, au choix, déconcerté, ébloui, intrigué, agacé ou amusé. Un enfant pourrait le faire ? Essayez donc pour voir. Roland Barthes, lui, a essayé au matin du 31 décembre 1978, en vain : "Je comprends que l’art de Twombly est une incessante victoire sur la bêtise des traits : faire un trait intelligent, c’est là l’ultime différence du peintre […] : aucun trait ne semble doué d’une direction intentionnelle, et cependant tout l’ensemble est mystérieusement dirigé" ("Sagesse de l’art" in Cy Twombly. Paintings and Drawings, 1979).
Lexington-Rome. Une formule qui sonne comme l’aller-retour d’une vie passée à cheval entre deux rives de l’océan. Lexington, petite ville de Virginie, terre-mère de l’artiste américain, qui choisira un chemin esthétique bien différent de celui de ses contemporains (et amis), qu’ils se nomment Warhol, Rauschenberg ou Johns. Et Rome, à l’ombre d’un palais, ce sol fertile où sont enracinés, pêle-mêle, citronniers et légendes. "Je suis influencé par tout ce que je vois, disait Cy Twombly – une peinture, mais aussi un surgissement du ciel." Un artiste, oui, mais avant tout un regardeur du monde.
Car la peinture de Twombly est aussi nourrie de ses voyages, à travers le monde et à travers ses livres. Un art imbibé de paysages et de poésie, de Mallarmé à Rilke, de Sappho à Pound. Une peinture qui jaillit de la toile, mais également une exploration photographique et une production sculpturale moins connues mais tout aussi puissantes. Et derrière l’œuvre, l’homme se fait discret. Secret même. Presque pas d’interviews, pas de commentaires sur son travail. Seule la peinture a quelque chose à dire d’elle-même.
Comment, donc, définir le "style Twombly" ? Comment décoder le geste artistique qui se refuse à toute catégorisation ? Et comment tenter, avec pudeur bien sûr, l’esquisse d’une vie passée à créer, à aimer, à découvrir, à regarder ? En suivant les péripéties d’un Américain à Rome, ce documentaire se propose de tracer subjectivement les grandes problématiques qui irriguent son œuvre afin d’en extraire la substantifique moelle. Pas pour donner un sens définitif à un art qui s’appréhende instinctivement, mais pour se demander finalement, comme Barthes : "qu’est-ce qui se passe, là ?"
Liens :
Site de la Fondation Twombly.
Cy Twombly sur le blog de Philippe Sollers.
Le ciel Giotto de Cy Twombly, au plafond de la salle des bronzes antiques du Louvre.
Cy Twombly ou "non multa sed multum", texte de Roland Barthes, paru dans le catalogue raisonné des œuvres sur papier de Cy Twombly.
Dans une rare interview, Cy Twombly évoque son travail avec le directeur de la Tate Gallery, Nicholas Serota (the Guardian, 3 juin 2008).
Le réalisateur John Waters rend hommage à l’audace de Cy Twombly dans une video exclusive en ligne sur le site The creators project.
Le roi des traces - Cy Twombly au Centre Pompidou, par Jean-Baptiste Gauvin, sur le site Un point culture.
Untitled (Cy Twombly), texte de Stéphane Lambert paru dans la revue La Règle du Jeu en octobre 2011.
Une œuvre savante et sensuelle - Cy Twombly au Centre Pompidou - 30 nov 2016 - 24 avril 2017.
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